C’est toute notre stratégie contre les violences faites aux femmes qu’il faut repenser.

Définition pénale du viol et des agressions sexuelles

Publié le 30 octobre 2025 à 09:26

Chaque année, en France, 230 000 femmes sont victimes de viol, de tentatives de viol ou d’agressions sexuelles. Seules 6 % des victimes portent plainte et moins de 1 % des violeurs sont condamnés. Nous ne pouvons plus détourner le regard de ce fléau.

Si les grandes affaires de Bobigny et d’Aix ont fait bouger les lignes, la France, pays des droits de l’homme, n’est pas encore celui des droits des femmes.

Nous partageons le combat contre la culture du viol et pour la libération de la parole des victimes, et saluons l’intention de ce texte.

Mais nos interrogations demeurent. Modifier la définition pénale du viol pour y insérer le consentement a des conséquences complexes. Les juges savent déjà manier cette notion avec souplesse pour reconnaître la sidération ou l’emprise, certaines affaires récentes l’ont prouvé. Le centre du procès ne risque-t-il pas d’être déplacé non plus sur les actes de l’agresseur mais sur le comportement de la victime ? Combien de fois a-t-on entendu, dans un commissariat ou une salle d’audience : « elle n’avait pas dit non », « il ne savait pas qu’elle n’était pas consentante » ? Dans l’affaire de Mazan, certains ont même osé parler de « viol involontaire » dès lors que Gisèle Pélicot, droguée, n’avait pas dit non !

Le procès d’un violeur ne doit pas devenir celui de la victime. Or c’est à la plaignante de démontrer qu’elle n’a pas consenti ! On culpabilise les victimes au lieu de protéger leur dignité.

Nous devons faire bien plus pour lutter contre les violences sexistes. La culture du viol prend ses racines dans notre société patriarcale. D’où l’urgence d’adopter enfin la loi-cadre intégrale contre les violences sexuelles réclamée par les associations féministes. C’est le manque criant de moyens et de volonté politique qui permet à 99 % des violeurs de ne jamais être condamnés. Il manque chaque année 2,6 milliards d’euros pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, dont 332 millions pour les violences sexuelles.

Protéger nos filles, nos femmes ne devrait pas avoir de prix. Il faut une véritable politique continue et coordonnée, pilotée au plus haut niveau, impliquant tous les ministères concernés ; il faut une vraie politique de prévention dans tous les milieux, une formation obligatoire des professionnels, des structures d’accueil spécialisées, des juridictions dédiées, une prise en charge pour toutes les victimes. Nous partageons les intentions du texte mais regrettons ses effets de bord ainsi que l’absence d’étude d’impact et surtout de moyens. C’est toute notre stratégie contre les violences faites aux femmes qu’il faut repenser.

SilvanaSilvani

Sénatrice de Meurthe-et-Moselle
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