Une réforme d’ampleur était indispensable pour accompagner la diversification des missions confiées aux collectivités locales, mais ce texte manque de volonté politique : sous couvert d’une réforme, il ne fait que poursuivre cette politique conduite depuis 2002, consistant à affaiblir la fonction publique dans son ensemble. Contrat à durée indéterminée, suppression de postes, fermetures de services publics de proximité : vous démantelez la fonction publique ! Même chose avec le transfert des T.O.S. aux collectivités locales, néfaste pour le statut, gênant pour les collectivités et véritable menace pour la continuité territoriale du service public.
Ce transfert alourdit la fiscalité locale et compromet les comptes de la C.N.R.A.C.L. Comme l’indique M. Dolligé dans son rapport, sur le transfert des T.O.S. et des D.D.E., le décalage de date de référence entre l’État et les collectivités locales, l’impossibilité technique dans laquelle ces dernières se trouvent de mesurer les effectifs transférables, le fait que les emplois vacants ne soient pas inclus dans le calcul, obligeront 68 % des collectivités interrogées à devoir recruter des agents supplémentaires.
M. HYEST, président de la commission. - 78 % des agents se sont déjà prononcés pour leur transfert, et 85 % dans mon département.
Mme MATHON-POINAT. - Oui mais cela porte sur la moitié des effectifs concernés, ceux qui ont déjà exercé leur droit d’option.
M. HYEST, président de la commission. - Vous affirmiez qu’aucun agent n’accepterait le transfert.
M. HORTEFEUX, ministre délégué. - Les agents ont deux ans pour se prononcer, l’opération est un succès !
Mme MATHON-POINAT. - Passons la querelle des chiffres... Voyons la formation. Le droit individuel à la formation (D.I.F.), transposé mécaniquement du secteur privé, réduit la durée de formation à 20 heures par an, cumulables il est vrai pendant six ans, mais avec un plafond de 120 heures qui devront être prises en dehors du temps de travail. Cela met en cause le principe fixé en 1971, selon lequel la formation est effectuée pendant le temps de travail et cette durée ne tient aucun compte de la durée réelle des formations : la préparation au concours interne de rédacteur ou d’attaché comptant entre 150 et 250 heures par an, nous sommes loin des 20 heures. C’est l’ascenseur social que le gouvernement bloque avec le D.I.F., en particulier pour les catégories C ! Le D.I.F. est soumis à l’accord de l’employeur territorial : s’agit-il d’un droit de l’agent, ou de l’employeur ? Le risque d’une décision arbitraire de la part de la collectivité locale existe. Les frais de formation seront à la charge de l’autorité territoriale : c’est déroger au principe de mutualisation et cela fait dépendre le D.I.F. des financements locaux alors que nombre de collectivités locales sont déjà exsangues du fait de votre politique.
Le droit de mutation est également remis en cause : dans les trois années suivant la titularisation, la collectivité d’accueil devra rembourser le coût de la formation ; quelle collectivité pourra se le permettre ?
L’avenir du C.N.F.P.T. est menacé : son financement est loin d’être assuré, alors que ses missions s’accroissent ; la formation sera déconnectée de l’emploi, du fait de la séparation fonctionnelle du C.N.F.P.T. et des centres de gestion ; le C.N.F.P.T. risque de n’être qu’un prestataire parmi d’autres sur le marché de la formation, ayant perdu son rôle d’interlocuteur privilégié des collectivités territoriales.
L’organisation des concours, qui sera désormais régionalisée, remet en cause le principe de l’égalité des candidats devant l’emploi public.
Certes, le Sénat a supprimé, en première lecture, le Centre national de coordination des centres de gestion, qui affaiblissait le rôle du C.N.F.P.T. Cependant, les compétences et les moyens de financement du C.N.F.P.T. se réduisent à une simple fonction résiduelle de formation.
Ce texte risque d’accentuer les inégalités entre les agents territoriaux, ce qui aura des conséquences sur les missions de service public assurées par les collectivités.
Les commissions administratives paritaires seront présidées par l’autorité territoriale ou son représentant, y compris lorsqu’elles siègent en conseil de discipline - alors qu’elles sont aujourd’hui, dans ce dernier cas, présidées par un magistrat des juridictions administratives. Cette modification met en cause l’impartialité de la commission, car la collectivité locale sera juge et partie.
M. Jean-Claude GAUDIN. - Comme dit M. Guérini, ceux qui paient commandent.
M. BRET. - Elle ne le connaît pas !
Mme MATHON-POINAT. - Depuis 2002, le gouvernement s’est employé à dénigrer la fonction publique et les fonctionnaires et à affaiblir les services publics. Or, 77 % de nos concitoyens ont une bonne opinion de la fonction publique, selon un sondage effectué les 21 et 22 novembre en collaboration avec l’institut C.S.A.
Ce texte ne répond pas aux besoins d’une véritable modernisation de la fonction publique territoriale. Il oublie sciemment les revendications exprimées par l’ensemble des organisations syndicales : rien sur le maintien du pouvoir d’achat et la revalorisation du point d’indice, l’augmentation des salaires pour 2007 sur la base minimum de l’inflation prévue ou encore sur la refonte globale de la grille indiciaire ! Nous voterons contre !