Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Mes cher(e)s Collègues,
Aujourd’hui est un jour important pour la Nouvelle-Calédonie. En effet, nous sommes réunis en Congrès, pour voter la modification de l’article 77 de la Constitution, qui précise la définition du corps électoral spécial pour les élections au congrès et aux assemblées provinciales de la Nouvelle-Calédonie.
L’Assemblée Nationale et le Sénat avaient déjà voté ces dispositions en 1999.
Mais, depuis le 24 janvier 2000, date du Congrès ajourné par le Président de la République en raison du retrait du texte renforçant l’indépendance de la magistrature, nous attendons impatiemment, avec les représentants du peuple kanak, le vote de ce projet de loi constitutionnelle. La parole donnée depuis tant d’années va enfin être respectée.
Il était temps, car un nouveau report de ce vote risquait de déstabiliser à nouveau la situation en Nouvelle-Calédonie. L’espoir est né, je dois le rappeler, les accords signés à l’Hôtel Matignon le 26 juin 1988 par le Premier Ministre, huit représentants du RPCR et cinq représentants du FLNKS. Ces accords ont été ensuite précisés et confortés par les accords de Nouméa, le 5 mai 1998.
Outre le vote parlementaire de 1999 que j’évoquais, les Accords de Matignon, ont été approuvés par référendum national, le 6 novembre 1988. Les Accords de Nouméa, bien plus précis quant au corps électoral, ont été validés par 72 et 74 % des participants de Nouvelle-Calédonie. La parole donnée engage donc non seulement les représentants du peuple des gouvernements successifs, mais aussi, la Nation, le peuple tout entier.
Pourquoi ce collège électoral spécifique ? Le peuple kanak a souffert ; le colonialisme l’a menacé ; chassé de ses terres, refoulé et parqué dans des réserves et enfin, exhibé en métropole au titre de curiosité exotique, il a droit à une reconnaissance pleine et entière.
N’oublions pas non plus que le sang a coulé en 1988, à Ouvéa ; les accords de 1988 ont évité une guerre civile certaine, résultant d’erreurs évidentes que l’on peut qualifier de politiques. L’identité kanak et le passé colonialiste de la Nouvelle-Calédonie était alors le cœur du problème.
Les Accords instituent un corps électoral « gelé » et non pas « glissant », c’est-à-dire adaptable aux nouveaux arrivants. Dans le premier cas et conformément aux accords passés et au vote successif du Parlement, seuls les habitants de la Nouvelle-Calédonie résidant depuis plus de dix ans en 1998, pourront voter aux élections concernant l’Assemblée de Province et le Congrès. Cette disposition d’exception, déjà validée pour les référendums à venir, relative à l’accession à la pleine souveraineté, correspond à la volonté fondatrice d’une citoyenneté calédonienne au sein de la citoyenneté française.
C’est ce concept qui constitue le socle de l’équilibre trouvé, mais néanmoins fragile et qui fût la condition de l’arrêt des violences, d’une cohabitation sereine entre communauté, tournée vers l’avenir.
Les accords de Nouméa prévoient un transfert progressif et irréversible de toutes les compétences, sauf des compétences dites régaliennes, à la Nouvelle-Calédonie, sur une durée de 15 à 20 ans. Au terme de cette période, un ou plusieurs référendums décideraient de l’accession ou non de ce territoire à la pleine souveraineté.
Ce corps électoral correspond à un objectif politique précis, accepté par tous les signataires. Ce fut une décision politique, partagée, assumée, de pérenniser le corps électoral existant, pour les scrutins concernés.
L’avenir de la Nouvelle-Calédonie dépend de notre vote. Il est temps, il est grand temps que la représentation nationale soit unie et déterminée pour l’aider à entrer dans une nouvelle période de son histoire.
Aujourd’hui, la Nouvelle-Calédonie est sur la voie de la réconciliation, une voie qui intègre son passé pour parvenir à affirmer son identité.
En conséquence, les sénateurs et sénatrices du groupe communiste républicain et citoyen, renouvelleront leur vote positif, à ce projet de loi constitutionnelle.