Si nous ne sommes pas hostiles au dépistage – j’y reviendrai dans la présentation de notre amendement n° 153 –, nous estimons que le droit en vigueur comporte un certain nombre de dispositions qui permettraient de l’assurer. Dès lors, nous ne comprenons pas l’utilité du système dérogatoire nouveau qui nous est proposé. D’autant que celui-ci présente un danger, déjà souligné, notamment, par M. Hervé : l’atteinte portée à un certain nombre de libertés individuelles – là aussi, nous en parlerons plus en détail dans quelques instants.
Alors que les mesures de protection du secret médical et des données personnelles sont aujourd’hui d’ordre législatif, le projet de loi les ramène dans l’ordre réglementaire. Cette dégradation dans la hiérarchie des normes pose à nos yeux un problème fondamental. C’est pourquoi nous préférons maintenir le régime actuel, dans lequel la protection des données individuelles est garantie au plan législatif. Non que nous nous défiions des décrets que le Gouvernement pourrait prendre, mais parce que le futur dispositif ne doit pas être éloigné du contrôle, absolument nécessaire, du Parlement.
C’est cette déchéance de la protection des libertés individuelles du niveau législatif au plan réglementaire qui nous conduits à nous opposer radicalement à l’article 6. Pour autant, nous n’entendons pas laisser les professionnels de santé sans armes ; c’est la raison de notre amendement n° 153, que je présenterai dans quelques instants.
Je partage rigoureusement l’argumentation de M. Bonnecarrère.
Contrairement à ce que vous avez pu suggérer, monsieur le ministre, le débat sur l’article 6 n’oppose pas les tenants et les opposants du dépistage. Nous sommes tous favorables au dépistage et à ce qu’un maximum de moyens soit donné à l’État pour assurer cette mission. N’ayez aucun doute sur nos intentions.
La discussion que suscite l’article 6 porte sur l’opportunité de créer aujourd’hui, par ce texte législatif, un système dérogatoire, alors que, comme vous l’avez très bien dit et comme l’a confirmé Alain Milon, un certain nombre de systèmes permettant ce dépistage existent déjà dans la législation actuelle. Nous voulons comprendre pourquoi vous ne pourriez pas mobiliser des systèmes qui présentent l’avantage fondamental d’être éprouvés, notamment sur le plan du respect des libertés individuelles et du secret médical.
Nous voulons comprendre pourquoi, d’un point de vue médical, vous avez besoin de créer un système qui déroge à un certain nombre de libertés publiques respectées par ailleurs, ce que nous contestons.
Dans ce débat, monsieur le ministre, nous attendons de vous de la précision. Comme vous le savez, ce projet de loi sera déféré au Conseil constitutionnel. L’intention du législateur sera déterminante pour que le Conseil puisse en apprécier exactement l’utilité et le mode opératoire. En outre, cette saisine ouvrira la porte à de futures questions prioritaires de constitutionnalité (QPC). Par conséquent, quelle que soit l’issue du vote sur les amendements, nous tenons absolument à ce que votre argumentaire soit le plus précis possible.
Je vous le dis, je ne crois pas du tout à la nécessité de mettre en place un système visant à faciliter le traitement informatique des données. Cela me paraît tout à fait accessoire en comparaison de ce que vous nous proposez par ailleurs.
J’aimerais un argumentaire un peu plus fin, un peu plus précis et un peu plus médical.