Malaise dans la jeunesse : miroir d’un système en crise

Débat à la suite du dépôt du rapport public annuel de la Cour des comptes sur la jeunesse

Publié le 27 mars 2025 à 12:09

La jeunesse est le miroir de notre société. Elle est plurielle, fragmentée, traversée de tensions et de luttes. Elle partage une même volonté : l’accès à l’éducation, à l’emploi, au logement, à l’autonomie.

Le rapport de la Cour des comptes nous rappelle la gravité de la situation de la jeunesse. Notamment en matière de précarité et de souffrance psychologique. Qui peut ignorer ces files d’étudiants devant les Restos du Cœur ou la montée inquiétante des troubles mentaux chez les 18-24 ans ? Le mal-être des jeunes est d’abord le produit d’un système politique qui a échoué.

L’étendu de vos travaux, vous le comprendrez, suscite une réflexion politique. Car ce mal-être est autant social que politique. Il trouve sa source dans les échecs ou les renoncements des différentes majorités gouvernementales. Le néolibéralisme à fait de la jeunesse le cheval de Troie de la flexi-sécurité : le laboratoire d’une société déshumanisée, où les contrats précaires, les stages interminables et l’ubérisation du travail sont devenus, pour trop de jeunes, la norme.

L’accès à un travail digne, stable et rémunéré semble de plus en plus inatteignable. Ce système, qui utilise le discours de “l’employabilité” pour justifier l’exploitation et la précarisation, n’a que trop duré.

On teste, on dérégule, on met en concurrence.

Après Parcoursup, cette brutalité sociale se retrouve aussi sur le marché du travail : 42 % des jeunes en CDD après leurs études, 38 % des non-diplômés encore au chômage trois ans plus tard. Et les inégalités de genre qui perdurent : 20 % des jeunes femmes en temps partiel contre 12 % des hommes. Dès le premier emploi, l’écart de salaire se creuse.

Territorialement, la fracture s’aggrave. 14% de chômage en plus pour les jeunes des quartiers populaires.

Aujourd’hui, un nombre croissant de jeunes s’engagent. Dans les associations, mais aussi dans des luttes politiques. En 2023, 44 % des jeunes se sont engagés dans une association. Une progression nette ! C’est une dynamique qui ne se résume pas à une simple réaction face à la précarité. Elle incarne une véritable volonté de changer la société. En témoigne le rejet croissant du système capitaliste, responsable de la crise climatique et des inégalités croissantes.

Selon l’IFOP, En 2023, 60 % des jeunes considéraient que le capitalisme était le principal responsable de cette crise. 64 % d’entre eux aspirent à un monde plus solidaire et équitable.

Cette aspiration ne se limite pas à un rejet du système en place. Il s’agit aussi de proposer une alternative : une éducation réellement démocratique, non soumise aux impératifs du marché. Le néolibéralisme a transformé l’éducation en une simple préparation à l’intégration dans le marché du travail, mais il nous revient de repenser l’éducation comme un outil d’émancipation. Ayons l’ambition de transformer l’école en une “institution du commun”, contrôlée démocratiquement par les usagers, les professionnels et la population.

Nous devons abolir la concurrence entre établissements, éradiquer la ségrégation ethnique et sociale, et repenser l’inclusion. Il ne s’agit pas seulement de défendre une école d’État face à une école de marché, mais de repenser cette école afin qu’elle soit véritablement un vecteur d’égalité, de justice sociale et de solidarité.

Mais repenser l’école, c’est aussi interroger la jeunesse sur son rapport au travail. Quel monde du travail préparons-nous ? Produire quoi ? Pour qui ? Dans quelles conditions ? Il est temps d’affirmer une autre vision : celle d’un travail libéré du chantage à l’emploi, reconnu pour sa valeur sociale et non pour sa rentabilité immédiate.

Il est grand temps de changer de cap et d’offrir aux jeunes les moyens de construire leur avenir.

Pascal Savoldelli

Sénateur du Val-de-Marne
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Mais repenser l’école, c’est aussi interroger la jeunesse sur son rapport au travail. Quel monde du travail préparons-nous ? Produire quoi ? Pour qui ? Dans quelles conditions ? Il est temps d’affirmer une autre vision : celle d’un travail libéré du chantage à l’emploi, reconnu pour sa valeur sociale et non pour sa rentabilité immédiate.

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