Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en abordant ce débat, les mots passion, courage, engagement me viennent immédiatement à l’esprit, aussitôt suivis par les mots pénibilité, préjugé et invisibilité.
Ainsi, le monde agricole n’échappe pas à ce que vivent les femmes en général, quel que soit le secteur d’activité concerné.
Une fois de plus, les travaux de la délégation démontrent l’apport indéniable des femmes dans l’agriculture, comme dans tous les domaines.
Permettez-moi de remercier les six corapporteurs – cinq sénatrices et un sénateur – en regrettant que n’apparaissent pas « sénatrices et sénateurs » sur la couverture du rapport, mais seulement « sénateurs », comme il est de règle, paraît-il, dans notre Haute Assemblée.
Je vous invite, mes chers collègues, à lire le livre d’Éliane Viennot Non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin, ce qui devrait aider à changer cette règle bien arbitraire !
Ma première question portera sur la présence des femmes dans les instances dirigeantes du monde agricole. Quelles mesures comptez-vous prendre pour que la parité y soit respectée ? Par parité, madame la secrétaire d’État, j’entends 50 %.
Ma deuxième question sera axée sur le statut juridique de la femme conjointe ou collaboratrice d’agriculteur, car beaucoup d’entre elles travaillent encore sans un véritable statut. Quelles sont vos intentions pour améliorer cette situation ?
Enfin, pour présenter ma dernière question, je m’appuierai sur le témoignage d’une agricultrice du département des Côtes-d’Armor, cher à ma collègue Christine Prunaud : « J’aime mon métier, il me demande beaucoup d’investissements et de persévérance. » et de continuer « il ne me laisse que peu de temps pour les loisirs, car c’est plus qu’un métier… Je commence ma journée de travail à six heures du matin qui ne s’achève qu’à dix-neuf heures trente ! ».
Les questions sociales sont prépondérantes dans ce secteur d’activité : faibles revenus, retraites insignifiantes, non-reconnaissance du travail de ces femmes… Quelles mesures comptez-vous prendre, madame la secrétaire d’État, pour apporter un peu d’espoir aux femmes agricultrices en améliorant profondément leurs conditions de vie ?
J’ai entendu que vous réfléchissiez, que vous aviez travaillé sur cette question. Au-delà des réflexions, il y a nos recommandations et il faut des moyens, comptez-vous les mettre en œuvre ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes. Il est indispensable de réfléchir avant de mettre en œuvre des politiques publiques. Le rapport dont nous discutons aujourd’hui nourrit cette réflexion.
Votre question porte, en premier lieu, sur la parité dans les instances représentatives agricole. Lors des dernières élections, en 2015, les femmes représentaient 45 % du corps électoral de la mutualité sociale agricole.
Au sein des conseils d’administration des 35 caisses locales, la proportion d’administratrices croît régulièrement depuis quarante ans. Entre 1974 et 1999, la part des femmes a crû fortement puisqu’elle est passée de 7,2 % à 26,1 % ; depuis, elle n’augmente plus que légèrement, passant 27,1 % en 2005 à 28,8 % en 2015.
Sur les 35 caisses locales, 7 sont présidées par des femmes pour les cinq années à venir.
Au niveau central, si vous me permettez cette expression, la parité est en train d’être atteinte : sur les 25 administrateurs élus, 12 sont des femmes
Mais j’observe là encore la persistance de ce que l’on appelle le plafond de verre, puisque, malgré cette relativement forte proportion de femmes, le président et le vice-président sont des hommes.
Pour les prochaines élections de la MSA, qui auront lieu en 2020, une réflexion est actuellement menée pour déterminer les conditions dans lesquelles pourront être appliquées les dispositions de l’ordonnance n° 2015-950 du 31 juillet 2015 relative à l’égal accès des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration des mutuelles.
Pour ce qui concerne les chambres d’agriculture, lors des échanges avec les syndicats dans le cadre de la préparation du prochain renouvellement des membres, le ministre de l’agriculture a proposé que les bureaux des chambres puissent appliquer la règle de mixité d’ores et déjà retenue pour l’élection des membres de chambre lors du scrutin de 2013, à savoir un candidat de chaque sexe par groupe de trois candidats.
Tous les syndicats ont fait part de leurs difficultés. Toutefois, il nous reste encore un peu de temps pour les convaincre du bien-fondé d’une telle demande de parité dans ces instances.