GDF-Suez : une fusion qui pousse GDF au démantèlement

Publié le 18 octobre 2006 à 15:49 Mise à jour le 8 avril 2015

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

Mon intervention est relative à l’organisation de nos travaux et au travail de la Commission.
Jeudi dernier, deux révélations importantes ont été faites au cours de nos débats et en ont légitimement perturbé le bon déroulement.

Premièrement, la presse a annoncé la volonté de F. PINAULT d’acquérir la branche environnement du groupe Suez.
Cette opération, très importante si elle se déroulait, mettrait à mal, de toute évidence, le projet de fusion entre GDF et Suez, projet qui légitime au yeux du gouvernement, la privatisation.

Je note que M. PONIATOWSKI avait alors parlé de « ragots » en évoquant les articles de presse de ce jour.
Nous n’en sommes plus là puisque M. BRETON a annoncé hier à l’Assemblée Nationale, l’ouverture d’une enquête de l’autorité des marchés financiers pour vérifier qu’il « n’y a pas de problème » sur le cours en bourse de Suez.
M. le Ministre, M. le Rapporteur, de toute évidence, notre débat se déroule avec en toile de fond une bataille financière particulièrement opaque, dont personne ne peut dire qui en sortira vainqueur.
Les parlementaires que nous sommes, le Sénat, peut-il continuer de débattre d’un projet qui mène GDF à l’inconnu, qui pousse GDF au démantèlement.

Peut-on décider de cette privatisation alors que chaque jour, chaque semaine, amènent son lot de révélation.
N’est-il pas étonnant M. le Ministre, alors que vous jurez la main sur le cœur respecter la transparence que vous déclariez sans sourciller hier à l’Assemblée Nationale, en évoquant l’intervention de François PINAULT : « c’était un projet qui a eu lieu au moins de juin et est mort en septembre. Il a été exhumé et l’AMF va regarder pourquoi et dans l’intérêt de qui ? ».

Cela signifie-t-il que le gouvernement a mené les débats à l’Assemblée Nationale sans informer les députés de ce plan financier qui s’ourdissait ?
Cela veut-il dire que vous entendez poursuivre les débats sans savoir qui trame quoi, sans savoir à qui le bien public va être bradé ? Il ne s’agit pas d’une simple spoliation mais d’une dilapidation de la propriété publique.

Avant de reprendre le débat, nous devons être éclairés sur les tractations autour de l’action Suez.
M. le Ministre, le parlement a non seulement son mot à dire quand les requins tournent autour de leur proie, il a le devoir, je dirais le devoir constitutionnel de protéger le bien de la Nation.

Vous devez répondre sur ce point.
Deuxièmement, nous ne pouvons reprendre les débats sans connaître précisément les conséquences des nouvelles exigences de Bruxelles, de la Commission européenne sur les actifs de GDF et Suez.
Une dépêche d’agence annonçait une augmentation significative des cessions confirmant là aussi au démantèlement.

Quel intérêt de fusionner si le futur groupe équivaut en puissance à GDF aujourd’hui ?
M. le Ministre, qu’en est-il du nouveau calendrier pour l’éventuelle fusion ?

Au nom du groupe CRC, je demande qu’une réponse, ici même et maintenant, soit apportée à ces remarques. Je maintiens la demande de suspension des débats. Est-il envisageable de poursuivre, alors que l’autorité des marchés financiers enquête sur le contexte de la privatisation de GDF.
En tout état de cause, je vous demande M. le Président, une suspension de séance pour permettre à chacun de réfléchir sur le contexte nouveau du débat et afin que la Commission et le gouvernement nous apportent des réponses circonstanciées.

Yves Coquelles

Ancien sénateur du Pas-de-Calais

Ses autres interventions :

Secteur de l’énergie, GDF-Suez : conclusions de la commission mixte paritaire

Epilogue législatif, la majorité sénatoriale a approuvé en séance publique les conclusions de la commission mixte paritaire à propos du projet de loi relatif à l’énergie, qui privatise GDF avant sa fusion avec Suez. Au nom du groupe CRC, Yves Coquelle, sénateur du Nord, a souligné une nouvelle fois l’opposition totale des élus communistes à ce projet. "Nous sommes très inquiets des conséquences de la démission de l’Etat au regard de la politique énergétique. Alors que la garantie de l’indépendance énergétique de notre pays devrait être l’objectif, tout est fait pour saborder les opérateurs historiques GDF et EDF. Car ne nous y trompons pas, c’est bien de la préparation de la privatisation totale du secteur énergétique dont on parle. Au contraire, nous restons persuadés que la politique énergétique nécessite des outils de service public contrôlés par l’Etat, seuls à même d’assurer la continuité, la sécurité du service ainsi que la solidarité nationale."

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