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Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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La société du "bien vieillir" bute sur la société du "mal réparti"

Par / 6 février 2024

Depuis 2017, nous sommes dans l’attente impatiente d’une loi sur le grand âge.
Le 22 novembre 2023, la Première ministre Elisabeth Borne s’était engagée à présenter une loi de programmation d’ici à l’été 2024.

La ministre des solidarités Aurore Bergé avait annoncé un changement de méthode et d’engager une véritable coconstruction avec les parlementaires, les élus locaux et les responsables du secteur.
Le 5 janvier dernier, les fédérations du secteur ont été reçues par la ministre pour échanger sur la rédaction de ce projet de loi.

Coup de théâtre, lors de la discussion générale mardi dernier, vous avez annoncé Madame la Ministre que, je cite : « l’article 34 de notre Constitution ne retient pas la notion de loi de programmation pour le secteur médico-social. ». Avant d’ajouter que : « Je prends l’engagement devant vous de faire une loi pour le grand âge et qu’elle soit faite et votée d’ici la fin de cette année ».

Vous et vos prédécesseurs ont trop bafoué la parole publique, désormais seule l’adoption d’une loi de programmation pour bâtir cette fameuse société du bien vieillir nous importe.
Nous savons qu’une telle loi de programmation ne vous engage en rien, et qu’il vous faudra trouver au moins 10 milliards d’euros pour financer l’adaptation de la société au vieillissement.

Pour réaliser ces investissements, il suffit de mettre à contribution les plus hauts revenus, les revenus financiers, les groupes qui réalisent des profits sur nos ainés.
Ce n’est certainement pas avec ce texte qui ne prévoit que 200 millions d’euros, soit seulement 2% des dépenses à réaliser, que nous attendrons cet objectif.

Cette proposition de loi est un coup de com’ du gouvernement pour donner l’illusion d’avancer sur ce dossier alors qu’il n’en est rien.
Pire, la majorité sénatoriale a réussi à introduire des mesures régressives dans un texte vide.
Cette proposition de loi qui reprend des mesures déjà inscrites dans la convention d’objectif et de gestion 2022-2026 entre la branche autonomie de la Sécurité sociale, ne prévoit rien de novateur.
Concernant le personnel de l’aide à domicile, la création d’une carte professionnelle ne résoudra ni le manque d’attractivité de la filière, ni l’absence de revalorisation kilométrique, ni l’absence de revalorisation des salaires.
Nous vous avions proposé d’indexer les salaires sur le Smic pour tenir compte de l’inflation, mais vous avez refusé.

Concernant les Etablissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, vous ne tirez aucunes conclusions de l’enquête de Victor Castanet.
Vous avez refusé là encore de renforcer les contrôles et de veiller au bon usage des deniers publics.
En 2006, le plan Solidarité Grand âge avait prévu qu’en 2012, il y aurait 8 professionnels pour 10 résidents dans le budget de l’établissement.

Aujourd’hui, nous en sommes toujours à 6 professionnels pour 10 résidents.
Résultat, on demande aux salariés d’aller toujours plus vite, conduisant à l’épuisement des personnels et à la maltraitance des résidents.

S’il y avait plus de professionnels, on réduirait les accidents du travail et on améliorerait les conditions de séjour.
C’est pourquoi nous sommes convaincus de la nécessité d’augmenter les moyens pour l’aide à domicile.
Pour notre part, nous portons l’objectif de recruter 200 00 personnes en Ehpad et 100 000 pour le secteur de l’aide à domicile.
Le plan de mobilisation nationale en faveur des métiers du grand âge pour la période 2020-2024 rédigé par l’ancienne ministre de la casse du droit du travail, Myriam El Khomry proposait en 2019 de créer 92 300 postes en cinq ans et d’augmenter les salaires.

Vous proposez aujourd’hui d’en créer seulement 50 000 en 6 ans sans augmenter leurs salaires.
La majorité sénatoriale a supprimé la publication du taux d’encadrement dans les Ehpads au motif qu’ils rencontrent des difficultés de recrutement.

Mais pourquoi les Ehpads rencontrent des difficultés à recruter ?
Parce que la pénibilité du métier, le manque de reconnaissance et un salaire de 930 euros n’attirent pas les travailleurs.

En 2014, mon collègue Dominique Watrin et le sénateur Jean-Marie Vanlerenberghe avaient remis un rapport sur l’aide à domicile auprès des publics fragiles : un système à bout de souffle à réformer d’urgence.
Une des préconisations consistait à fixer un tarif national de l’aide à domicile à 24 euros de l’heure.
10 ans plus tard, le gouvernement se félicite d’avoir imposé aux Départements un tarif planché à 23 euros.
Mais en 10 ans, l’inflation a fait exploser les prix et il faudrait financer l’heure d’aide à domicile à 30 euros avec une compensation intégrale par l’Etat.

Dans mon département, lorsque je discute avec les gens, je ne connais personne qui me dit qu’elle souhaite finir ses jours en Ehpad. Mais en l’absence d’aide pour maintenir les personnes à domicile, les familles se retrouvent contraintes de chercher une place en Ehpad pour leurs proches.

Elles ont deux possibilités : soit elles attendent plusieurs mois dans l’espoir d’avoir une place dans un établissement public, soit elles acceptent de payer une place hors de prix dans un établissement privé.
L’affaire « Orpéa » a pourtant mis en lumière les dysfonctionnements de certains EHPAD, notamment du secteur privé lucratif, et plus largement de l’accueil des personnes âgées en situation de perte d’autonomie.
En autorisant les Ehpads habilités à l’aide sociale de fixer un tarif hébergement différencié pour les résidents non bénéficiaires de l’aide, la majorité sénatoriale a ouvert une boite de pandore extrêmement grave.
Désormais, les Ehpads habilités pourront moduler leurs tarifs selon les ressources des résidents et ainsi réduire davantage le nombre de places réservées aux bénéficiaires à l’aide sociale.

Vous remettez en cause pour les familles les plus précaires l’accès à un service pourtant indispensable.

En conclusion, à l’opposé du projet du gouvernement et de la droite sénatoriale, nous portons un véritable projet de justice sociale avec la création d’un service public de l’autonomie financé à 100% par la Sécurité sociale avec la suppression des exonérations de cotisations patronales.

Pour l’ensemble de ces raisons nous ne soutiendrons pas ce texte.
Je vous remercie.

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