Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Affaires sociales

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Le vrai partage de la valeur, ce sont les salaires

Par / 17 octobre 2023

Ce projet de loi pose dans son intitulé un débat intéressant autour du partage de la valeur crée au sein de l’entreprise.

Avant d’en venir à l’examen du texte, élue du Pas-de-Calais, je tiens à réaffirmer mon total soutien aux blessés, aux professeurs, à la communauté éducative, aux élèves durement touchés par l’attentat terroriste du lycée Gambella d’Arras, qui a coûté la vie à Dominique Bernard. L’heure est au recueillement, au respect de la famille de M. Bernard qui vit des moments dramatiques.

Entre 1950 et 2021, la part des salaires dans la valeur ajoutée a perdu 4 points tandis que le taux de marge des entreprises a progressé de 2 points.

Cette évolution contraire entre les salaires et le taux de marge démontre que, non seulement la valeur crée dans les entreprises n’est pas mieux répartie avec les travailleurs qui l’ont créée, mais surtout que ce sont les actionnaires et les patrons qui en tirent profits.

Ainsi en 10 ans, les 100 plus grandes entreprises ont augmenté les versements de dividendes aux actionnaires de 57%.

Pendant ce temps, les prix flambent et la situation devient insupportable pour les Français qui se voient contraint de débourser des sommes de plus en plus exorbitantes pour subvenir à leurs besoins vitaux tels que l’énergie, les carburants et surtout la nourriture.

L’inflation des prix a entrainé une perte de 720 euros de pouvoir d’achat en 2022 pour les salariés avec une facture encore plus salée pour les ménages ruraux et les plus modestes.
Désormais 18 % des ménages vivent continuellement à découvert et 31 % des Françaises et des Français sautent des repas parce qu’ils n’ont pas les moyens.
Il faut en finir avec le racket de la grande distribution qui pressurise nos agriculteurs d’un côté et fait les poches à la caisse des familles de l’autre.

Il y a donc une injustice qui se renforce dans notre pays entre le monde du travail et le monde des spéculateurs.
Ce projet de loi de partage de la valeur va aggraver ces injustices au lieu de les résorber et au passage scier la branche de notre pacte social.

Premièrement, les primes, la participation, l’intéressement, l’épargne retraite, l’actionnariat salarié, et tous les autres dispositifs dits de partage de la valeur reposent sur des déductions fiscales et des exonérations de cotisations sociales qui alourdissent les finances publiques.

En 2022, les dispositifs de participation et d’actionnariat salarié ont entrainé une perte de recettes de 1,8 milliards d’euros et les exemptions de cotisations sociales 3,5 milliards d’euros.
La fiscalisation des primes imposée par le Conseil d’Etat ne compensera pas la perte de 5 milliards d’euros de recettes à la Sécurité sociale.

Ces dispositifs extrêmement couteux pour les finances publiques s’apparentent d’ailleurs à une subvention déguisée des entreprises sans aucunes contreparties.
Deuxièmement, ces dispositifs se substituent aux augmentations de salaire. Selon l’Insee, la prime PEPA est ainsi privilégiée par les employeurs au détriment de l’augmentation de salaires dans 30% des cas. L’institut national en conclue que « les effets d’aubaines semblent se traduire des revalorisations salariales plus faibles qu’attendues sur le salaire de base ».

Ce grand remplacement des salaires par des primes entraine une perte de droits associés pour les travailleurs. Alors que le gouvernement a volé 2 années de vie à la retraite à l’ensemble des salariés, la constitution de droits futurs devient une préoccupation pour nombre de nos concitoyens.
Troisièmement, la répartition des primes, de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salarial est particulièrement inégalitaire entre les salariés puisque ceux qui en profitent le plus sont ceux qui ont déjà les salaires les plus élevés.

Ces dispositifs valorisent les hauts salaires quand la priorité devrait être de relever les bas salaires et réduire les inégalités au sein des entreprises.
Enfin, ces mécanismes reposent sur les bénéfices des entreprises, or ces dernières usent de mécanismes d’évasion fiscale qui permet d’afficher un bénéfice fiscal net négatif en plaçant les bénéfices dans des succursales dans des paradis fiscaux.

Selon le Conseil d’Analyse Economique « la lutte contre le transfert de bénéfices semble être un instrument de premier ordre pour toute politique de partage de la valeur ».
Par conséquent ce texte est de la poudre aux yeux des salariés.
Quand le Président de la République défend la création d’un « dividende salarié » son projet consiste à nier le lien de subordination dans l’entreprise en donnant l’illusion que les travailleurs vont pouvoir bénéficier d’une partie du fruit de leur travail.

A l’Assemblée nationale, vous avez dit, Monsieur le Ministre du travail qu’ : « il s’agit d’œuvrer davantage pour le pouvoir d’achat des salariés afin de faire face à l’inflation mais aussi de répondre à une forte demande de participation des salariés dans la marche de leur entreprise, aspiration qui rejoint le désir de démocratie au travail », fin de citation.

Cette vision de l’entreprise lieu de démocratie sociale où les travailleurs auraient leur mot à dire dans les décisions stratégiques pourrait nous accorder si votre gouvernement n’avait pas supprimé les CHSCT, diminuer le nombre de représentants syndicaux dans les instances et criminaliser l’action syndicale lors de la mobilisation contre la réforme des retraites.
Il est intéressant de noter que la seule véritable obligation de ce projet de loi est l’instauration de la prime de partage de la valeur qui sera mise en place par décision unilatérale de l’employeur, au mépris des organisations syndicales.

En conclusion, l’urgence est de relever les minimas des 86 branches professionnels inférieurs au Smic.
L’urgence est de conditionner les aides publiques à l’absence de délocalisation des emplois, à l’augmentation des salaires, de garantir l’égalité salariale entre les femmes et les hommes et d’indexer les salaires sur l’inflation.
Pour notre part nous ne souhaitons pas voir les revenus du travail soumis aux aléas des performances et des contre-performances des entreprises.

Nous avions déposé des amendements en ce sens qui ont été jugés irrecevables par la Commission car trop éloignés avec le texte.

Vous avez raison, le seul véritable partage de la valeur ce sont les salaires, or ils ne figurent pas dans ce texte.
Vous avez écarté hier, une fois de plus, cette question lors de la conférence sociale.

Dès lors, ce projet de loi ne va pas améliorer le pouvoir d’achat des salariés par conséquent les sénatrices et les sénateurs du groupe Communiste Républicain Citoyen Ecologiste et Kanaky vous invitent à voter notre motion.
Je vous remercie.

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