Affaires culturelles
Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.
Cette société commerciale n’est pas une bonne solution pour le football français
Démocratisation du sport : article 10 bis A -
Par Jérémy Bacchi / 19 janvier 2022Cet amendement vise à supprimer l’article 10 bis A, au moment même où La Ligue de football professionnel recueille et évalue les propositions des fonds d’investissement susceptibles d’investir dans le football français.
Je me fais peu d’illusions sur la probabilité que cet amendement soit adopté. Cela dit, je voudrais vous alerter sur plusieurs sujets, afin que nous ne disions pas dans quelques mois ou quelques années que nous n’avons pas vu venir les coups…
La société commerciale qu’il est envisagé de créer a en réalité pour objet d’injecter rapidement du cash dans les clubs de foot, notamment professionnels, à la suite de la défaillance de Mediapro. La vraie question est de savoir à combien sera valorisée cette société commerciale. Les bruits qui courent évoquent un milliard d’euros sur huit saisons, soit 125 millions d’euros par saison, ce qui représente à peu près les droits de télévision actuels, évalués à 624 millions d’euros.
Quelle sera la clé de répartition entre les clubs professionnels et amateurs dans l’attribution de ces montants ? Et entre les clubs de Ligue 1 de football ? Je ne dis pas que ce sera le cas, mais imaginons qu’un seul club de Ligue 1 capte un tiers de cette manne financière, qu’un deuxième lot de cinq ou six clubs capte un autre tiers et les dix ou onze derniers clubs le dernier tiers. Est-ce réellement ce que nous souhaitons ?
Aujourd’hui, on nous propose de voter pour la création d’une société commerciale en ne connaissant ni sa valorisation, ni la clé de répartition qui sera appliquée demain, ni ses conséquences sur le football français.
Mes chers collègues, je vous alerte donc sur ce sujet qui mérite débat, afin que nous obtenions a minima des réponses à toutes ces questions, si tant est que quelqu’un en ait dans cet hémicycle.
Nous reconnaissons tous la faiblesse de la Ligue de football professionnel quant à la valorisation des droits d’exploitation du football professionnel.
Aussi, je regrette que la LFP n’ait pas réfléchi à un certain nombre d’artifices qui auraient permis de mieux valoriser ces droits, comme les horaires de diffusion. Il suffit de regarder ce qui se fait dans les autres pays européens ! Les Anglais ont créé le Boxing Day et retenu des horaires attractifs, qui permettent de mieux valoriser le football. Les multiplex aussi observent une augmentation des taux de fréquentation et des audiences.
Concernant la société commerciale, observons l’exemple de l’Espagne, où une partie des droits a été vendue à une telle société. Sur la durée du contrat, le montant échappant aux clubs au profit de la société commerciale s’élève à 5 milliards d’euros !
Je comprends que l’on favorise des rentrées d’argent dans les caisses des clubs, car, en ce moment, ils en ont besoin. En revanche, sur la durée, au bout de cinq ans, de six ans, de huit ans ou de dix ans, ce seront des dizaines, voire des centaines de millions d’euros qui échapperont aux clubs de Ligue 1 ! Cela, c’est profondément dramatique.
En tant que supporter de l’Olympique de Marseille, pour répondre à mon collègue, les clubs doivent avoir des budgets inscrits dans la durée pour participer à la Ligue des champions. Je le regrette, mais il ne suffit pas d’augmenter ces budgets une seule fois, comme nous le prévoyons aujourd’hui.