Affaires économiques
Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.
L’apprentissage sous perfusion d’aides publiques
Crédits travail et emploi 2024 -
Par Cathy Apourceau-Poly / 6 décembre 2023Les comparaisons entre la France et l’Allemagne sont le prétexte de nombreux ballons d’essai lâchés ces derniers jours par Bruno Le Maire, nouveau ministre du travail...
L’augmentation de 11 % des crédits de la mission « Travail et Emploi » s’explique principalement par l’augmentation des dépenses en faveur de l’apprentissage, de France Compétences et des dispositifs d’insertion.
Après la réduction de l’indemnisation chômage, la réforme des lycées professionnels, celle du RSA et la création de France Travail sur les fonds de l’Unédic, la hausse du taux de chômage semble devoir justifier de nouveaux reculs sociaux dans les prochains mois. Suppression des ruptures conventionnelles, réduction de la durée d’indemnisation chômage des seniors, réduction des délais de recours contre les licenciements : telles sont les orientations du ministre Le Maire.
Pour notre part, nous pensons que la lutte pour l’emploi passe par une politique d’investissement et de recrutement dans la fonction publique, une réduction du temps de travail et une réduction de l’âge légal de la retraite. Selon l’OFCE, votre réforme des retraites maintiendra 177 000 actifs sur le marché du travail pendant les deux premières années suivant son entrée en vigueur.
Les crédits du programme « Accès et retour à l’emploi » baissent, mais votre réforme de l’assurance chômage augmentera le nombre de chômeurs en fin de droits dans les mois à venir.
En réduisant la subvention à Pôle emploi de 200 millions d’euros cette année et de 80 millions d’euros l’année prochaine, vous organisez le transfert du financement de France Travail à l’Unédic. Et comment justifier la baisse du plafond d’emplois de France Travail, alors qu’il faudra encadrer les bénéficiaires du RSA, désormais soumis à une obligation de 15 heures hebdomadaires ? Cet encadrement sera-t-il assuré par des boîtes privées qui se gaveront de fonds publics ?
En ce qui concerne TZCLD (Territoire zéro chômeur de longue durée), les crédits progressent de plus de 50 %, à 69 millions d’euros. Mais cette hausse s’explique par l’augmentation du nombre de territoires participant à l’expérimentation. La contribution au développement de l’emploi versée par l’État passe de 102 à 95 % du Smic. Le plancher d’intervention est à 53 % du Smic, mais vous n’avez rien dit du plafond ! Nous voterons les amendements tendant à financer TZCLD à hauteur de 89 millions d’euros.
Le Gouvernement n’a jamais eu le courage d’assumer la mise en place d’un reste à charge sur les droits à la formation des salariés - une fois n’est pas coutume, nous le félicitons. Nous sommes fermement opposés à l’instauration d’un forfait, même de quelques euros.
S’agissant de l’apprentissage, nous sommes choqués de constater que les entreprises bénéficieront de 1,7 milliard d’euros d’exonérations de cotisations, en plus des 6 000 euros par apprenti. Le financement de l’apprentissage ne peut reposer exclusivement sur des aides publiques ! Il faut un engagement des entreprises.
Enfin, nous regrettons l’augmentation de seulement 2 % des crédits de l’inspection du travail. Nous avons besoin d’une inspection du travail forte pour faire respecter le travail, ainsi que celles et ceux qui travaillent.
Selon notre collègue député Pierre Dharréville, entre 2017 et 2022, le nombre d’agents chargés du contrôle des entreprises a diminué de 250 ETP. Sur le terrain, le taux de vacance de postes atteint 15 %. Par endroits, l’inspection du travail est hors d’état de remplir ses missions, ce qui entraîne des ruptures d’égalité.
Le Gouvernement prévoit toujours plus de cadeaux pour les patrons et toujours moins de protection pour les travailleurs. Les sénatrices et sénateurs du groupe CRCE-K voteront contre les crédits de la mission.