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Affaires étrangères et défense

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Le captage-stockage du CO2 n’est pas une solution prometteuse

Convention OSPAR pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est -

Par / 2 juillet 2013

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne sais pas si je suis une experte, mais je fais partie de la commission du développement durable…

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Merci d’être là !

Mme Évelyne Didier. La convention OSPAR, signée par la France en 2004, a pour objet la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est. Elle a été ratifiée par tous les pays riverains et, plus généralement, l’ensemble de la Communauté européenne.

Cette convention a ainsi permis utilement de fédérer les moyens de connaissance et les actions de ces pays, afin d’assurer la meilleure conservation possible de cet espace marin unique et précieux, dans une perspective de développement durable. Les sénateurs du groupe CRC soutiennent pleinement cet objectif.

Cependant, il est question aujourd’hui d’amender cette convention afin de garantir la possibilité de mise en œuvre de procédés de captage-stockage de CO2, qui n’était pas autorisée initialement lors de la signature de cette convention.

Pour tout dire, nous sommes extrêmement réservés sur une telle possibilité. Nous sommes tout d’abord dubitatifs sur la forme, parce que ce projet, qui émane du précédent gouvernement, n’a pas, depuis, fait l’objet d’une nouvelle expertise approfondie, au regard, notamment, de l’évolution des savoirs dans ce domaine.

De plus, l’adoption d’un tel texte intervient dans une actualité particulière, voire sensible, en ce qui concerne la gestion des ressources du sous-sol. En effet, alors que la pression des lobbies autour de la reprise de l’exploitation des hydrocarbures de roche bat son plein, nous attendons la réforme annoncée du code minier, censée assurer une meilleure préservation de notre sous-sol.

Il semble donc, même si son objet est spécifique et relève de conventions internationales, que le présent projet de loi s’insère dans une problématique plus large, extrêmement sensible. Nous aurions ainsi souhaité que l’ensemble de ces questions fassent l’objet d’un examen concomitant permettant d’avoir une vision globale et cohérente.

Enfin, sur le contenu même de ces amendements à la convention OSPAR, nous ne pouvons qu’exprimer une grande réserve.

La méthode suscite, en effet, un certain nombre de questions, comme en témoignent les prises de positions diverses des experts, des écologues ainsi que des ONG. Notons également que l’ADEME a rendu, le 19 mars dernier, un avis particulièrement réservé, dans lequel elle fait part des incertitudes concernant les risques et les impacts environnementaux et sanitaires à maîtriser, et s’interroge sur les capacités réelles de stockage géologique.

Nos interrogations sont de trois ordres.

Tout d’abord, cette technique est récente.

M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. C’est vrai !

Mme Évelyne Didier. Il est donc difficile d’avoir le recul nécessaire quant à son apport réel aux objectifs définis par les conventions environnementales. Vous avez d’ailleurs fait état, monsieur le président Carrère, des doutes existant dans ce domaine. (M. le président de la commission des affaires étrangères acquiesce.)

De fait, cette technologie de captage-stockage ne sera disponible à grande échelle qu’en 2030, au plus tôt.

En attendant, que se passe-t-il ? Pour nous, cet horizon est bien trop lointain, au regard de l’urgence climatique. Nos émissions de gaz à effet de serre doivent en effet baisser à partir de 2015. Si nous voulons limiter à deux degrés le réchauffement du climat, cela implique, selon les experts du GIEC, une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre à partir de 2015, suivie d’une réduction de 50 % d’ici à 2050. Dans ce cadre, le stockage n’apparaît pas comme une véritable solution prometteuse.

D’abord, cette technologie est trop énergivore. Le captage et le stockage du carbone consomment en effet une quantité importante d’énergie. Pour compenser ces pertes, il faudrait, par exemple, construire de nouvelles centrales thermiques. (M. André Gattolin opine.) Nous nous trouvons donc dans une spirale qui, sous couvert d’objectifs louables, contribue en réalité à produire des émissions de gaz carbonique.

Ensuite, le captage et le stockage sont trop coûteux. Force est de constater que les sommes colossales investies dans la recherche sur le développement de ces nouvelles technologies seraient en réalité plus utiles si elles étaient consacrées au développement des énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique.

Il est particulièrement révélateur, à ce titre, que les pétroliers préfèrent investir dans les projets de recherche concernant ces techniques, plutôt que dans le développement de nouvelles énergies propres. Il ne faudrait pas que le captage-stockage de CO2 contribue, en réalité, à rendre plus acceptable sur le plan environnemental des activités industrielles polluantes.

M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. Nous sommes d’accord !

Mme Évelyne Didier. Enfin, cette technologie est trop risquée. Ce n’est pas un point mineur, il est impossible de garantir un stockage sûr et permanent du CO2. Les risques de fuites existent, même si personne ne peut les quantifier avec précision aujourd’hui.

Il est certain que toute fuite, y compris en milieu marin, aura des conséquences sur l’environnement, le climat et la santé humaine. Certains évoquent des destructions d’écosystèmes, d’autres une accélération de l’acidification des océans... (M. le président de la commission des affaires étrangères hoche la tête en signe de dénégation.) En tout cas, cette technique est simplement contraire à l’idée même de la convention OSPAR, dont l’objectif est la protection des milieux marins.

Plusieurs rapports ont estimé que le développement d’une filière de captage et stockage du carbone ralentissait la transition énergétique dans la mesure où cette méthode « conforte aussi l’utilisation des énergies carbonées dans les pays qui les importent ».

Une fois de plus, nous laissons faire et ensuite nous tenterons de réparer. Prévenir plutôt que réparer, telle devrait être notre conduite en toute circonstance, singulièrement dans une démarche de développement durable.

Pour toutes ces raisons, les sénateurs du groupe CRC s’abstiendront sur ce projet de loi.

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