Affaires sociales
Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.
Santé des femmes, les maux restent invisibles
Santé et bien-être des femmes au travail -
Par Silvana Silvani / 13 février 2024Le 27 juin 2023, la délégation aux droits des femmes du Sénat a adopté un rapport intitulé « Santé des femmes au travail, des maux invisibles ».
Ce rapport soulignait particulièrement le déficit persistant d’approches genrées en matière de santé au travail. Déficit qui entraîne une invisibilisation de la pénibilité du travail pour les femmes. Pourtant 60% des personnes atteintes de troubles musculo-squelétiques sont des femmes.
Le rapport soulignait également les difficultés spécifiques aux femmes concernant les pathologies menstruelles incapacitantes, la grossesse, l’infertilité, la ménopause et l’endométriose. La proposition de loi déposée par nos collègues socialistes se limite à la création d’un arrêt menstruel pour les femmes souffrant de dysménorrhées. Nous regrettons que ce texte n’embrasse pas l’ensemble du champ du rapport sénatorial qui mérite selon nous une plus grande attention.
Néanmoins, cette proposition de loi a le mérite de lever un tabou sur l’impact du cycle menstruel des femmes au travail. Mes collègues ont déjà cité des chiffres. Je rappellerai simplement que 65% des femmes ont rencontré des difficultés liées à leurs règles au travail. Il faut donc prendre en compte cette réalité dans les organisations de travail.
Ici, je souhaite lever immédiatement un malentendu. Ce texte ne crée pas un congé menstruel, mais crée un arrêt menstruel. Il ouvre la possibilité aux médecins de prescrire une nouvelle forme d’arrêt de travail sans délai de carence, pour deux jours par mois maximum, pour les femmes souffrant de dysménorrhées et pour une durée d’un an. Un congé menstruel relève de la décision unilatérale des employeurs et son financement est assuré par eux.
Certaines entreprises et certaines collectivités ont fait le choix d’instaurer un congé menstruel pour leur personnel. Pour notre part, nous n’y sommes pas favorables. Le congé menstruel est une fausse bonne idée qui pourrait entraîner des discriminations à l’embauche, à l’encontre des femmes et une remise en cause du secret médical. Les employeurs n’ont pas à connaître la raison qui pousse les salariés à être absents deux jours par mois. En revanche, et c’est la raison pour laquelle nous voterons en faveur de ce texte, nous sommes favorables à l’instauration d’un arrêt médical pour les menstruations incapacitantes. Contrairement à un congé, un arrêt médical entraîne une indemnisation par la Sécurité sociale et concernerait toutes les femmes souffrant de douleurs menstruelles et pas uniquement celles souffrant d’endométriose.
Il est probable, malheureusement, que le conservatisme moral qui prévaut en ce lieu rendra difficile le franchissement de cette étape dans le processus de prise en compte du corps des femmes. Ce texte constitue un petit pas, certes, mais un pas vers une meilleure prise en compte, une meilleure prise en considération de la santé des femmes au travail.
Pour ces raisons, notre groupe votera en faveur de ce texte.