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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Abrogation du bouclier fiscal (2)

Par / 26 mars 2009

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen de la proposition de loi de mon groupe est l’occasion, pour la majorité, de confronter ses propos à ses actes, et c’est aussi l’occasion pour elle de faire face à la réalité.

Outre le fait qu’il soit cocasse que le rapporteur de notre proposition de loi soit issu de la majorité, il faut bien reconnaître que, à peine imprimé, le rapport est déjà dépassé par les faits ! L’encre n’est pas encore sèche que, déjà, les heures et les jours charrient leurs flots de scandales. Il ne se passe pas une demi-journée sans que nous apprenions, sur le plan tant national qu’international, qu’un dirigeant d’entreprise a bénéficié d’un parachute doré, du versement d’une prime en actions gratuites ou encore de l’attribution d’un bonus, sous forme monétaire ou sous forme de stock-options, alors que son entreprise a soit bénéficié d’aide publique, soit organisé des plans de licenciements.

Notre collègue Philippe Marini, voulant accréditer dans son rapport la thèse de l’inutilité de l’intervention de la loi, nous a détaillé l’ensemble des mesures législatives existantes, toutes censées encadrer la question de la rémunération des dirigeants d’entreprise.

Et pourtant, monsieur le rapporteur, malgré les mesures auxquelles votre majorité tente de se raccrocher, les affaires se succèdent. Involontairement, vous avez fait la démonstration du caractère de pâles cache-misère des dispositions que vous nous présentiez en leur temps comme de réelles garanties. Pourtant, lorsque le Gouvernement a débloqué des milliards d’euros en direction des banques, nous vous avions alertés sur l’absence de contrepartie et de garde-fous. Mais, déjà, vous nous répondiez : responsabilité des dirigeants !

On voit bien ce qu’il en est de la responsabilité des dirigeants, avec le scandale de la Société générale. L’aide de l’État était pour le moins importante : 1,7 milliard d’euros. Ce recours aux aides publiques n’a visiblement pas réduit l’appât du gain des dirigeants de cette entreprise bancaire, puisque le conseil d’administration de la Société générale a décidé d’accorder 270 000 stock-options aux trois principaux dirigeants de l’entreprise. Si l’on ajoute les directeurs généraux, ce sont 320 000 stock-options qui ont été distribuées, pour une valeur estimée à ce jour à 7,7 millions d’euros.

C’est au prix d’une mobilisation, pour ne pas dire d’une pression médiatique et politique de soixante-douze heures, que les dirigeants de la Société générale ont annoncé vouloir renoncer à cette attribution et en informer le conseil d’administration.

Il n’en demeure pas moins que leurs premières réponses sur le sujet étaient consternantes. Là où l’immense majorité de nos concitoyens voient dans cette affaire un scandale, les premiers intéressés considèrent, eux - c’est révélateur -, qu’il s’agit d’un problème de communication.

Voici, par l’exemple, la démonstration de l’inefficacité de ce que vous nous proposez, monsieur Marini, à savoir laisser les patrons et les dirigeants s’organiser eux-mêmes !

Cet épisode, qui succède à l’affaire Total, entreprise qui engrange des milliards d’euros de bénéfices et n’hésite pas à casser l’emploi dans une région, avec 555 suppressions de poste, est la preuve d’une crise réelle. Et cette crise révèle au grand jour le décalage existant entre la rémunération des salariés, véritables créateurs de richesses et de savoirs, et celle des dirigeants d’entreprise, assise non plus sur la prise de risques ou les capitaux mais bien sur la spéculation !

Les rémunérations faramineuses deviennent de plus en plus insoutenables et posent, de surcroît, le problème primordial de la reconnaissance du travail face au capital. L’urgence est non pas au laisser-faire, monsieur le secrétaire d’État, mais à la garantie de l’emploi et de salaires permettant de vivre dignement.

Aujourd’hui, malgré l’affaire de la Société générale et l’affaire Valeo, où le patron responsable d’un large plan social se voit attribuer un parachute doré de 3,26 millions d’euros correspondant, nous dit-on, à deux ans de son salaire ou à 250 ans du salaire d’un salarié rémunéré au SMIC - les salariés de Valeo ont d’ailleurs bloqué aujourd’hui l’entrée du site pour demander la suppression de ce parachute doré -, le Gouvernement voudrait nous faire croire qu’une intervention législative n’est pas nécessaire, et il continue d’en appeler à la bonne volonté des dirigeants, alors même que ceux qui promettaient hier d’être exemplaires se comportent aujourd’hui comme si notre pays ne traversait pas une crise économique et sociale des plus importantes, comme si l’État n’avait pas participé financièrement au sauvetage des banques et de certaines entreprises.

Toutefois, on apprend aujourd’hui même qu’un décret devrait rapidement voir le jour. Pourquoi un décret et non une loi, monsieur le secrétaire d’État ?

D’ailleurs, pour se convaincre de la pertinence de notre proposition de loi - et, monsieur le secrétaire d’État, nous la mettons à votre disposition, si vous voulez agir dans l’urgence et dans l’intérêt des salariés -, il suffit, outre de lire les déclarations du 24 mars de Xavier Bertrand, secrétaire général de l’UMP - « Quand les comportements ne changent pas, il faut en passer par la loi » - et les propos tenus sur Europe 1 par Christine Lagarde, qui en appelle elle-même à la loi, il suffit, disais-je, de regarder de très près ce qui s’est passé à la Société générale.

En effet, les heureux bénéficiaires de stock-options profitent de ce « droit » par une décision du conseil d’administration dans lequel ne siège aucun salarié, contrairement à Jean-Marie Folz, membre à part entière de ce conseil d’administration et par ailleurs membre du « comité spécial » créé pour faire face à la crise. Ce même M. Folz, qui a autorisé le versement de ces stock-options, est aussi le président de l’Association française des entreprises privées, qui a coélaboré le code éthique avec le MEDEF de Mme Parisot, la patronne des patrons, laquelle précisait voilà peu qu’elle n’avait ni la compétence ni l’envie d’intervenir sur la rémunération des mandataires sociaux. Elle a même dit que ces bonus et autres primes font partie des rémunérations.

Le code éthique, qui était présenté hier par le Gouvernement comme la réponse adéquate, s’avère aujourd’hui dépassé, contrarié par celui-là même qui l’a rédigé.

C’est pourquoi il faut une loi. Certes, les dirigeants de la Société générale ont renoncé à leurs stock-options. Certes, l’État, détenteur du capital de Valeo, va s’opposer à l’attribution du parachute doré de son président. Mais l’État n’est pas présent dans tous les conseils d’administration. Il n’est pas actionnaire dans toutes les entreprises, et ce qu’il a pu faire pour Fortis, pour les mêmes raisons que Valeo, il doit pouvoir le faire dans toutes les entreprises bénéficiant d’aides publiques. Il doit pouvoir garantir qu’aucun fond public n’ira à la spéculation ou à l’enrichissement individuel, et il ne doit pas le faire seulement par décret. Il lui faut tout simplement légiférer. Si ce qui se passe à Valeo choque à juste raison le Gouvernement, ce dernier doit alors demander aux parlementaires qui le soutiennent de voter en faveur de notre proposition de loi.

Nous voulons sortir de cette logique du coup par coup, sortir de la réaction, pour être dans le droit. Nous voulons que ce qui apparaît aujourd’hui comme de la commisération soit en fait un principe légal, reposant non plus sur la bonne volonté des personnes concernées, mais sur notre droit positif. En effet, nous venons de le voir - et les exemples de cette semaine l’attestent -, il y va de la morale des dirigeants comme de leurs actions : elle est indexée sur le cours de la bourse !

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