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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Collectif budgétaire 2002

Par / 16 décembre 2002

par Thierry Foucaud

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

Ma première observation portera bien entendu sur les conditions mêmes d’organisation de ce débat budgétaire de fin d’année.

Adopté la semaine dernière après un premier report, le présent projet de loi de finances rectificative nous est soumis à peine deux jours francs après que la Commission des Finances ait eu la possibilité de découvrir son contenu et ses évolutions.

En effet, la discussion menée à l’Assemblée Nationale a quelque peu enflé le gâteau, passant de quarante à soixante dix articles, dont une bonne part d’ailleurs motivés par le Gouvernement, accentuant le caractère disparate du projet de loi de finances rectificative, au plus grand mépris de la représentation nationale.

Nous sommes même en train de nous demander si nous ne sommes pas en présence de l’un des modèles les plus achevés en cette matière.

Quelle image en effet de la vie politique donne aujourd’hui le Gouvernement !

Il impose à sa majorité sénatoriale, à peine regroupée pour l’essentiel sous la bannière de l’UMP, d’adopter sans discussion, conforme le texte de la loi constitutionnelle sur l’organisation décentralisée de la République, et voici désormais qu’il lui demande de voter à toutes forces un collectif dont les dispositions les plus calamiteuses sont, dans une répartition des rôles pour le moins évidente, confiés à quelques parlementaires novices judicieusement choisis dans le bataillon élu au printemps dernier.

Nous en reparlerons à l’occasion par exemple de la discussion de cet article relatif à l’aide médicale qui a été ajouté par voie prétendument parlementaire.

Et, et je ne peux manquer de le souligner ici, l’encre de la loi de finances n’est même pas sèche ( le texte n’étant pas encore promulgué ) que la presse, toujours bien informée, nous indique que 3 à 5 milliards d’euros des crédits votés sont appelés, dès le mois de janvier, à être gelés.

Encore une fois, cela montre le peu de crédit ( si l’on peut oser cette formule ) que le Gouvernement en place laisse à la discussion parlementaire et à ceux que peut porter la représentation nationale.

Parce que, c’est bien de cela dont il s’agit quand on regarde d’un peu plus près encore le contenu de cette loi de finances rectificative.

En effet, la dégradation de la situation économique s’accentue et cela ne peut être imputé de manière exclusive au précédent Gouvernement.

Que constatons - nous ?

Une nouvelle dégradation du niveau des recettes fiscales, dépassant le milliard et demi d’euros, et touchant tous les grands impôts mais singulièrement la TVA, signe évident d’une dévitalisation économique majeure.

Posons encore la question : à quoi a donc pu servir la baisse de l’impôt sur le revenu que vous avez voté dans le collectif de cet été, si la consommation n’a pas été relancée ?

A gonfler encore les bas de laine ?

A se perdre dans une ’ épargne ’ dont chacun sait fort bien qu’elle est synonyme de spéculation financière pour ceux qui ont le plus profité de la baisse ?

Décidément, voilà bien plus de deux milliards et demi d’euros utilisés à mauvais escient.

En tout cas, manifestement pas à relancer l’activité économique, puisque l’un des autres paramètres en œuvre est l’accroissement sensible du chômage.

Quelles réponses d’ailleurs à cette situation ?

Les plans sociaux se multiplient et vous ajoutez à la liste la suppression des emplois jeunes, qui constituaient pourtant une réponse adaptée aux besoins collectifs et permettaient à de nombreux jeunes de commencer de se construire un projet personnel, gâchant d’ailleurs pour cela quelques milliards d’euros supplémentaires à les indemniser au titre de l’allocation chômage.

N’ayons pas peur de le dire : si vous en etes à trouver de quoi les indemniser une fois les contrats dénoncés, alors vous pouviez fort bien payer le maintien du dispositif !

Autre réponse au développement du chômage que nous allons apprécier dès cette semaine : la refonte de la loi sur la modernisation sociale, demandée ( que dis - je, exigée ) par le MEDEF et que vous vous apprêtez à voter des deux mains ( là encore sans discussion et par le biais d’un vote conforme ) pour pouvoir la mettre en œuvre au plus tôt.

Ne soyez donc plus réceptifs qu’aux vœux d’une organisation patronale qui, pourtant, ne représente même pas fidèlement ses mandants, et qui vient, dans le cadre des élections prud’homales, de subir un recul majeur de son influence de plus de sept points ?

Non, la seule réponse que ce Gouvernement trouve au problème qui se font jour aujourd’hui est celle que nous voyons inscrite dans ce projet de loi de finances rectificative.

Baisse de la dépense publique, annulation massive de crédits et singulièrement restriction des dépenses d’équipement civil.

Certaines dépenses nouvelles interviennent, pour l’essentiel d’ailleurs centrées sur les conséquences un peu mécaniques des variations de recettes observées et la persistance des difficultés sociales et économiques d’une part importante de la population.

Mais on annule aussi plus d’un milliard d’euros de dépenses utiles en fonctionnement des services et en interventions publiques ( nous reviendrons sur ces chapitres lors de l’examen des articles ) et on supprime pour plus de cinq cents millions d’euros de dépenses en capital, notamment dans le domaine du logement où la dotation PLA - PALULOS est réduite de quelque chose comme 10 % de son montant initial, par exemple.

Le projet de collectif qui nous est soumis présente donc une caractéristique essentielle : il consacre un nouvel accroissement du déficit, que les orientations données depuis l’été n’ont pas pu contenir, mais dans un contexte où l’on crée les conditions de nouveaux déficits cumulés.

Moins de dotations PLA, par exemple, c’est moins d’emploi dans un secteur du bâtiment particulièrement inquiet, où les perspectives d’activité sont faibles et c’est donc encore plus de chômage, de récession, de ralentissement de la consommation.

Et c’est aussi toujours autant de mal logés, au moment même où le rapport du Haut Comité au Logement des Personnes Défavorisées établit que trois millions de nos compatriotes sont aujourd’hui dans une situation précaire en ce domaine.

Ce genre de décisions est donc à la fois anti social et anti économique.

Vous me permettrez, dans les dernières minutes de cette intervention, de procéder à une analyse encore un peu rapide du véritable inventaire à la Prévert qui figure en seconde partie de cette loi de finances rectificative.

Il y a quelques mesures qui vont, malgré tout, dans le bon sens, et je pense ici à celle correspondant à la ’ décristallisation ’ des pensions des anciens combattants de nationalité aujourd’hui étrangère de l’Armée Française.

Que cette situation soit enfin réparée, après des années et des années de silence, et suite à une prise de conscience un peu tardive de ce dossier est une bonne chose.

Pour le reste, je ne reviendrais pas sur les articles proposant de tenir compte de la disparition programmée des taxes parafiscales dans le cadre de la mise en œuvre de la loi organique, mais je ne peux manquer de proposer un retour sur les articles ultimes de cette loi de finances rectificative.

Ainsi en est il de l’article 44, relatif à la poursuite et l’extension du pacte de relance pour la ville, et en l’occurrence celle des zones franches urbaines.

On observera que le texte a été amené par amendement soutenu par le Ministre de la Ville lui-même, consacrant en cela un choix idéologique clair : celui de la sollicitation de la dépense fiscale et ici, en l’occurrence, de l’ensemble des exonérations de cotisations ou d’impots, plutot que celui de la dépense publique.

En effet, notre Ministre de la Ville figure aussi en bonne place dans le collectif avec une réduction de ses crédits de 58 millions d’euros…

Alors, il me semble que ce n’est pas ainsi, manifestement, que l’on rendra forcément plus opérante une politique de la Ville qui cherche encore sa voie.

Enfin, on ne peut passer sous silence l’article 45, censé matérialiser le soutien que l’Etat apporte au plan de redressement de France Télécom.

Ce plan de redressement a naturellement fait l’objet d’un long débat à l’Assemblée Nationale, et il en sera sans doute de même dans notre Haute Assemblée, compte tenu de l’importance du sujet à traiter.

Mais vous me permettrez cependant d’emblée de relever ici les conclusions pour le moins hâtives que tire le Rapporteur Général de cette situation en parlant de ’ faillite de l’Etat actionnaire ’.

Un tel concept est pour le moins audacieux, surtout quand l’on sait que certaines de nos entreprises privatisées ( je pense par exemple à Paribas ou à Suez ) ont été, quelques années après leur privatisation, à deux doigts de disparaître du paysage économique.

Et qu’une partie de la facture a d’ailleurs été supportée, au demeurant, par la collectivité, au travers des multiples mesures d’allégement fiscal mises en œuvre à l’occasion du dégonflage de la bulle spéculative de l’immobilier par exemple.

Non, ce qui est plutôt en faillite, mes chers collègues, c’est bien l’introduction de critères de stricte rentabilité financière dans les entreprises de réseau et d’infrastructures, de course effrénée à la taille critique, de prix exorbitants de croissance externe, etc.

Ce n’est pas, par exemple, la qualité du service public, qui a cependant souffert des choix imposés par la logique libérale et concurrentielle qui anime la gestion de ces entreprises.

Ce qui est en faillite, mes chers collègues de la majorité, c’est le modèle de développement futur de notre secteur des télécommunications que vous nous aviez invité à voter au printemps 1996, tout d’abord en décidant de transposer la directive européenne en matière de régulation du secteur des télécommunications et ensuite en modifiant le statut de France Télécom.

C’est cela qui est en faillite, rien d’autre.

Nous aurons l’occasion d’y revenir dans la discussion de l’article 45.

Mais il importait que cela soit dit dès maintenant.

Pour autant, compte tenu de l’ensemble des éléments que je viens de rappeler, je ne peux évidemment manquer de vous indiquer que les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen du Sénat ne voteront pas ce projet de collectif budgétaire 2002.

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