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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Débat d’orientation budgétaire

Par / 6 juin 2000

par Marie-Claude Beaudeau

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’Etat, mes chers collègues, ce débat sur les orientations budgétaires doit être serein et objectif, afin de pouvoir offrir les meilleures perspectives possibles et les choix les plus judicieux pour le budget de 2001.

Etre serein, n’est-ce pas avoir un jugement équilibré et non politicien ? Pour préparer cette intervention, j’ai relu certaines des interventions de M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Elles sont toujours de qualité, j’en conviens, mais je voudrais attirer l’attention du Sénat sur celle qu’il a faite le 26 avril dernier devant la commission des finances, de l’économie et du Plan de l’Assemblée nationale.

M. Fabius déclarait alors ceci : " La situation macro-économique est bonne : la prévision de la croissance de 3,6 % du PIB en 2000 vient d’être confirmée par le FMI, l’inflation est maîtrisée, le chômage recule au point d’observer quelques goulets d’étranglement dans certains secteurs comme le bâtiment et l’informatique, la balance extérieure est toujours favorable, la production industrielle est bonne et les résultats en termes de créations d’emplois s’améliorent très nettement. "

Que voilà de belles choses et de bonnes nouvelles !

Je ne conteste pas le ton général se voulant optimiste, mais je pense qu’il serait sage d’adjoindre à cette analyse d’ensemble l’énoncé des incertitudes et des tensions qui se font jour et que nous ne pouvons pas nier.

Je souhaiterais également qu’au niveau de la méthode nous soyons encore plus perfectibles.

M. Joxe a fait observer, devant la commission des finances de l’Assemblée nationale, que le projet de loi de règlement de 1998 avait été enregistré à l’Assemblée nationale en septembre 1999. Il n’est inscrit à l’ordre du jour qu’en mai 2000, alors qu’il aurait pu l’être dès octobre dernier, a-t-il déclaré. Le projet de loi de règlement du budget de 1999 devrait, quant à lui, pouvoir être déposé cette année, en juin ou juillet. C’est pourquoi il pourrait être examiné avant le projet de loi de finances pour 2001, conformément au voeu de certains. Ceci, au passage, permettrait de valoriser le travail des trente à quarante personnes qui, à la Cour, préparent les rapports sur l’exécution des lois de finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Ensuite, je souhaiterais que, parmi les tensions, on soit plus équilibré, plus réaliste sur celles qui, peut-être, minent la prospérité américaine apparente et son attractivité.

A ce sujet, il est vrai que le dynamisme de l’économie américaine ne se dément pas pour l’instant. Le rythme de plus 6 % de croissance au deuxième trimestre 1999 se poursuit. Il ne faut pas nier, cependant, l’existence de nombreux dangers signalés par les observateurs.

Tout d’abord, c’est la progression des marchés boursiers et immobiliers qui a alimenté le dynamisme de la consommation.

La remontée du cours du pétrole vient d’entraîner une progression de l’inflation, avec une conséquence immédiate de ralentissement du pouvoir d’achat.

Depuis mai 1999, l’envolée des valeurs de haute technologie a compensé la stagnation, voire le recul des valeurs traditionnelles. Les évolution boursières ne devraient plus soutenir comme elles le faisaient la consommation des ménages.

Enfin, dans cette embellie économique et financière, on ne note plus de nouvelles progressions de capacité de production.

Tous les observateurs notent la poursuite d’un dynamisme au cours du premier semestre 2000, mais nourrissent des craintes pour la fin 2000, et ce pour une raison fort simple : les anticipations de profit des valeurs de l’indice NASDAQ associées aux nouvelles technologies peuvent apparaître exagérément gonflées, avec un réveil brutal possible en 2001.

Ce double constat ne peut donc nous conduire qu’à une analyse équilibrée de ses conséquences sur notre économie.

La vigueur de l’activité mondiale, notamment américaine, entraîne aussi une hausse du coût des matières premières industrielles et des taux d’intérêt.

La guerre économique n’est-elle pas relancée par une attitude se voulant hégémonique de la part des USA ?

Agressifs dans le champ des négociations commerciales internationales, les Etats-Unis semblent avoir clairement opté également pour la lutte contre l’euro sur les marchés de change internationaux.

Le mouvement de hausse des taux d’intérêt qu’en toute indépendance la Banque centrale européenne a d’ailleurs décidé de relayer tend à créer les conditions de nouveaux gâchis de ressources financières et de bridage de la croissance réelle.

Le projet de collectif budgétaire, dont nous débattrons ultérieurement, n’intègre-t-il pas, d’ailleurs, une forme de provision pour risques de change à hauteur de 15 milliards de francs au titre du service de la dette publique ?

Nous voyons combien cette guerre épuisante et coûteuse sur les marchés financiers fait peser des charges sur notre croissance, qui est somme toute assez fragile. Nous aimerions connaître votre avis, madame la secrétaire d’Etat, sur cette question.

Au lieu de consacrer tant d’énergie et d’argent à soutenir coûte que coûte la parité de l’euro, ne convient-il pas plutôt d’augmenter les salaires, les minima sociaux et le RMI, pour relancer la consommation populaire ? Nous vous le proposons.

Le Gouvernement estime que tous les indicateurs sont au beau fixe pour notre
pays : un taux de croissance prévu de 3 % après 3,6 % en 2000, soit la plus forte séquence positive depuis vingt-cinq ans ; une hausse de la consommation intérieure de 3 % à 3,5 % par an pour 2000 et 2001, avec des excédents commerciaux supérieurs à 100 milliards de francs par an ; une absence de risque inflationniste : 0,9 % prévu pour 2000, mais un " pic " de 1,6 % en janvier, et 1,2 % en 2001 ; une amélioration nette de la situation de l’emploi, avec une baisse continue du chômage et la perspective de
2 millions de chômeurs pour 2002.

Avec de tels constats et de telles perspectives, peut-on admettre que l’écart entre les 10 % les plus riches de nos concitoyens et les 10 % les plus pauvres continue à se creuser et que le nombre de RMIstes ne fasse que croître ? Peut-on admettre que les salaires n’aient progressé que de 2 % en 1997, de 1,8 % en 1998 et de 1,9 % en 1999, alors que les réserves financières ont fait un bond de 8,32 % et la Bourse de plus de 52 % ?

Ne convient-il pas, au contraire, de profiter de cette croissance, mais avec la volonté d’en faire bénéficier ceux qui l’ont produite, et de la faire progresser encore au-delà des
3 % prévus et d’augmenter tous les salaires ?

Des possibilités d’augmentation généralisée des salaires existent avec une majoration du SMIC de plus de 6 % sans attendre,
c’est-à-dire au 1er juillet.

Des financements peuvent être trouvés pour la revalorisation des minima sociaux, notamment par l’augmentation de l’ISF, avec intégration des biens professionnels dans l’assiette de cet impôt, l’instauration d’une taxe sur les mouvements des capitaux, la taxation de tous les revenus financiers.

Il s’agirait là, au-delà de la confortation de la croissance, d’une mesure de justice sociale.

En 1999, les dépenses de consommation des ménages ont progressé de 2,1 %. Mais, en regardant d’un peu plus près le détail de cette progression, on peut faire certaines observations.

Les dépenses de consommation des ménages ont diminué pour le pain de 0,4 %, pour la viande de 0,9 %, pour les fruits et légumes de 0,9 %, pour les boissons non alcoolisées, le chauffage et l’éclairage de 2,7 %, pour les appareils ménagers de 1,6 %, pour les loisirs et la culture de 1,3 %, pour les appareils électriques et informatiques de 8,1 %, pour les assurances de 0,5 %.

Cette évolution démontre l’existence d’inégalités fortes, voire aggravées. Ce sont les plus pauvres qui ont besoin de faire remonter les pourcentages des dépenses de vie courante, démontrant bien par là, pour les prochains budgets, une nécessaire augmentation des ressources et du pouvoir d’achat.

Je devance certaines remarques, qui me seront certainement faites, visant à affirmer que ces mesures ne sont pas possibles parce que les entreprises ne les supporteraient pas.

N’oubliez pas, madame la secrétaire d’Etat, mes chers collègues, que la part des salaires dans la valeur ajoutée produite n’a pas connu d’augmentation significative, continuant de se situer, dans les entreprises, sous la barre des 60 %, niveau que notre pays connaissait, soit dit en passant, au début des années soixante-dix.

N’oubliez pas que le taux de marge des entreprises ne s’est pas affaissé, puisqu’il se situe aujourd’hui aux alentours de 32 points, c’est-à-dire, là encore, au niveau que l’on atteignait dans les années soixante-dix.

Dans la réalité vécue par les salariés de notre pays, qu’observe-t-on ?

Tout simplement que les gains de productivité, bien antérieurs à l’adoption des deux textes relatifs à la réduction du temps de travail, n’ont pas été recyclés, loin de là, dans l’emploi et dans les salaires, mais dans la progression des taux de marge et de rentabilité.

Et qu’a-t-on fait de ces marges ?

Les entreprises s’en sont largement servies, dans un premier temps, pour alléger leurs charges financières, en se désendettant largement et en déprimant, soit dit en passant, leurs dépenses effectives d’investissement productif réel.

On a, ensuite, massivement augmenté le montant des dividendes distribués, celui-ci dépassant, en 1998, 500 milliards de francs.

Sur ce chapitre, on soulignera que la presse économique s’est fait l’écho, ces dernières années, de perspectives de distribution de dividendes encore plus importantes pour les sociétés cotées, attestant donc de l’existence de véritables pactoles financiers.

De façon marginale, puisque ce dispositif ne concerne que moins de 26 000 hauts cadres dirigeants des entreprises de notre pays, soit au plus un millième des contribuables de l’impôt sur le revenu, l’amélioration sensible de la rentabilité des entreprises en valeur absolue et en valeur relative a bonifié un peu plus les dispositifs de stock-options existants.

Vous me permettrez donc de m’interroger sur le bien-fondé de toutes les dispositions tendant, dans les faits, à alléger de manière quelque peu aveugle les cotisations sociales des entreprises puisque, à l’examen, leur situation financière ne nécessite pas, sur un plan général, une telle sollicitude.

La meilleure preuve de cette excellente santé financière de nos entreprises ne nous est-elle pas fournie par le relèvement sensible, hors toute majoration exceptionnelle, du produit de l’impôt sur les sociétés - plus de
30 milliards de francs de plus-value en fin d’année 1999, ne l’oublions pas - qui fut l’élément essentiel des recettes officielles supplémentaires, lesquelles, dans les faits, ne sont qu’une partie de la véritable cagnotte, celle des profits ?

Tout est d’ailleurs à relativiser au moment où France Télécom, sans doute fidèle à ses principes de service public " méthode Carrefour ", s’apprête à engager
328 milliards de francs - c’est une fois et demie le déficit que nous propose de constater le projet de loi de finances rectificative - dans le rachat de l’opérateur britannique de télécommunications Orange ?

Car c’est bien là une autre donnée essentielle de la situation économique d’aujourd’hui : le trésor de guerre des entreprises a aussi été massivement utilisé pour mener des raids, des offres publiques d’achat et d’échange, OPA et OPE, des opérations de mégafusions et acquisitions, bien souvent au détriment de l’emploi.

L’exemple le plus évident de cette dérive ne nous est-il pas donné par Michelin qui, non content de contraindre ses salariés à consentir des sacrifices sur l’évolution de leurs salaires, de leur faire accepter une accentuation de la productivité apparente du travail, utilise ensuite les marges financières ainsi créées pour les licencier en masse et rémunérer de manière plus importante ses commanditaires ? Et les Michelins sont nombreux dans le pays !

Vous me permettrez, madame la secrétaire d’Etat, de regretter ici que le projet de loi portant sur les nouvelles régulations économiques n’ait pas pu encore être inscrit à l’ordre du jour de la Haute Assemblée...

M. Philippe Marini, rapporteur général. Regret partagé !

Mme Marie-Claude Beaudeau ... après son passage à l’Assemblée nationale. Pourquoi ?

Le débat sur ces sujets est en effet pour nous crucial, quand bien même, au demeurant, le texte qui nous était proposé manquait un peu de souffle, pour ne pas dire plus.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous aurions pu le muscler !

Mme Marie-Claude Beaudeau. Ces éléments sont des éléments incontournables du contexte de définition des orientations budgétaires pour 2001 et il importe, à notre avis, d’en tenir compte dès lors qu’il s’agit notamment de définir les caractères de l’intervention publique en direction des entreprises et de l’emploi, ou de revisiter le champ de la dépense fiscale de soutien à l’activité, à l’emploi et à l’investissement.

D’autres parmi vous ne vont-ils pas s’abriter aussi, pour justifier cette impossibilité, sur la nécessité d’une coordination des politiques fiscales des Etats membres de l’Union ?

Sur ce chapitre fondamental, vous me permettrez de formuler quelques observations et de poser quelques questions.

Il importe d’abord de se demander où nous en sommes.

Tout d’abord, il existe assez peu de domaines où le travail des commissaires européens en charge du dossier fiscal ait produit un résultat patent.

Ainsi, il n’existe pas de coordination en matière de droits d’accises, sinon pour valoriser une majoration de la taxe pesant sur la consommation de gazole.

De même, en matière de TVA, l’eurocompatibilité se limite, pour l’heure, à fixer des planchers d’imposition pour la définition du taux réduit et du taux normal de la taxe, sans que les assiettes soient aujourd’hui unifiées et alors que persistent
- pour certains aspects, heureusement - de grandes divergences dans l’application de la taxe comme dans les conditions de son recouvrement.

C’est d’ailleurs d’autant plus regrettable que l’initiative parlementaire est généralement à la fois victime de cette eurocompatibilité limitée et du fait qu’une part importante de la contribution de chacun des Etats membres est encore fondée sur un prélèvement sur les recettes de TVA.

Pour notre part, nous estimons que la France doit être à l’initiative d’une redéfinition de la directive sur la TVA laissant plus de marge de liberté aux Etats membres, tandis que nous devons clairement envisager la perspective de la réduction du taux normal pratiqué dans notre propre pays.

S’agissant, en ce domaine, de la sortie du régime transitoire, nous ne pouvons encore manquer de souligner que celle-ci ne peut s’effectuer tant que certains de nos partenaires continueront à vouloir imposer l’abandon des règles qui président, dans notre pays, à la détermination de l’exigibilité de la taxe.

Dans un autre domaine, soulignons que la Commission européenne ne semble pas avoir encore réussi à préciser sa position sur la question cruciale de l’imposition des
plus-values et des placements et revenus de capitaux mobiliers, comme de valeurs monétaires.

Le Parlement européen a ainsi débattu de la mise en place d’une taxation des transactions menées sur les marchés monétaires, taxation inspirée des travaux du prix Nobel américain d’économie James Tobin, mais il semble bien que la Commission fasse encore, là aussi, la sourde oreille.

Madame la secrétaire d’Etat, quelles suites entendez-vous donner aux exigences de
M. Pedro Solbes, qui vient de s’exprimer au nom de la Commission sur la monnaie unique ?

M. Solbes prétend interdire toute réduction d’impôt non compensée par une réduction des dépenses courantes.

M. Solbes veut nous contraindre à une hausse des impôts en cas de décélération de la conjoncture et, inversement, prendre en compte l’effet de la pression fiscale sur le niveau de la dette publique et la politique budgétaire à long terme.

Enfin, M. Pedro Solbes exige que la baisse d’impôt s’inscrive dans le cadre d’une réforme globale de la fiscalité.

Que pensez-vous de ces exigences ?
N’y a-t-il pas là une attitude comminatoire quelque peu déplacée ? Entendez-vous, madame la secrétaire d’Etat, répondre à ces oukases ? Puisque le temps vient d’assumer la présidence de l’Union européenne, quels seront vos choix, vos propositions, vos décisions ?

M. Védrine, lors de sa communication, la semaine dernière, au Sénat, s’est montré fort réservé, voire énigmatique. Comme s’il n’allait rien se passer ! Nous en doutons fortement, et les propos introductifs de
M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, tout à l’heure, m’ont paru un peu trop lapidaires. Donc, qu’allez-vous
proposer ?

Nous attendons l’expression de la volonté du Gouvernement, de ses projets : la présidence française s’achèvera alors que le budget pour 2001 sera voté.

Madame la secrétaire d’Etat, permettez-moi maintenant d’en venir à d’autres propositions.

Nous avons inscrit, comme proposition majeure pour notre pays, la majoration des ressources des Français. Nous ne pouvons pas admettre cette réalité de travailleurs pauvres, qui émerge actuellement pour devenir simple banalité. Le travail ne nourrirait plus l’homme !

Accompagnant une première mesure de revalorisation du pouvoir d’achat, nous proposons de rééquilibrer fiscalité directe et fiscalité sur la consommation, afin de favoriser cette dernière.

De nouvelles baisses ciblées de la TVA entraîneraient des achats supplémentaires pour les plus défavorisés de nos concitoyens, seraient une impulsion pour la production de biens pour les ménages, nous acheminant vers un retour au taux de
18,6 %. La directive européenne fixe d’ailleurs un plancher de taux de la TVA de 15 %.

Une réforme hardie de la fiscalité sur l’essence permettrait plus de justice sociale et des ressources nouvelles. " Faire le plein " devient une dépense trop lourde pour les milieux populaires, notamment pour tous les automobilistes que la spéculation foncière et immobilière a chassés des centres-villes urbains. Or 85 % du prix de l’essence est constitué de taxes.

La baisse de l’impôt que vous proposez peut être source de plus grandes inégalités et d’injustices, puisque vous prévoyez en même temps un abaissement des plus hautes tranches. Nous pensons au contraire que, s’il faut refondre le barème et maintenir les 20 %, il faut aussi créer de nouvelles tranches et revoir l’avoir fiscal. Il est quand même anormal que 100 000 foyers fiscaux ayant des revenus supérieurs à 150 000 francs soient non imposables !

L’imposition des revenus financiers des entreprises doit être revue à la hausse. La prise en compte d’une partie des actifs financiers des entreprises à un taux de 0,3 % dans l’assiette de la taxe professionnelle rapporterait 60 milliards de francs aux collectivités territoriales, ce qui permettrait la réforme tant attendue et sans cesse rapportée de la taxe d’habitation, avec une prise en compte nouvelle des ressources et un dégrèvement de la taxe sur le foncier bâti, qui devient trop lourde pour les nouveaux propriétaires les moins fortunés.

L’accroissement du nombre de dossiers de surendettement est là pour rappeler qu’un nouveau problème bien réel se pose. Dans mon département, le Val-d’Oise,
3547 dossiers ont été déposés en 1999, soit une augmentation de plus de 20 % en un an.

Complétant les mesures de revalorisation du pouvoir d’achat et d’une justice fiscale plus morale et plus efficace, nous proposons une nouvelle définition de la notion de dépenses publiques en fonction des besoins et non de postulats réducteurs de dépenses mais aussi de croissance, comme l’a dit tout à l’heure M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, d’ailleurs approuvé en cela par le président de notre commission des finances.

La situation des comptes sociaux, comme celle des comptes des collectivités locales, s’est améliorée. Nous ne pouvons d’ailleurs qu’en profiter pour indiquer que la création d’emplois et l’amélioration des recettes de la sécurité sociale sont incontestablement les outils les plus performants pour améliorer les comptes sociaux, et ce bien plus que toutes les mesures de restriction et d’économies qui ont été choisies ces dernières années.

Pour autant, cette situation des comptes publics qui, sous de nombreux aspects, répond aux exigences de la construction européenne et aux objectifs de convergence des politiques économiques et budgétaires, présente cependant un certain nombre de faiblesses.

Second aspect de la situation : la question de l’origine de l’amélioration des comptes est indissociable de celle des choix qui sont opérés en matière de fiscalité et de dépenses publiques.

De manière plus significative, nous devons poser de nouveau la question de la dépense pour l’emploi et, notamment, poser le problème de sa réaffectation vers l’allégement de la contrainte financière des entreprises en lieu et place de l’allégement des cotisations sociales.

M. le ministre a déclaré vouloir mettre fin au gel de l’emploi public. Comme il a raison ! Mais cela implique une croissance des dépenses publiques supérieure à 0,3 %. Cela implique également l’intégration des emplois-jeunes, leur formation et leur titularisation.

Comment répondre aux besoins des services publics, vouloir augmenter la productivité de 1,5 %, répondre à la réduction du temps de travail à 35 heures dans la fonction publique, si l’on ne désigne pas 2001 " grande année pour les services publics " ?

Les chiffres avancés sont inquiétants, madame la secrétaire d’Etat, car ils envisageraient une progression des dépenses publiques dix fois inférieure à la progression du produit intérieur brut.

Faut-il vous rappeler également que l’existence de recettes fiscales supplémentaires a été une grande révélation pour les Français ? Ils veulent pour leurs écoles, leurs hôpitaux, leurs transports, leurs commissariats, bénéficier des 3 % supplémentaires de la richesse nationale qu’ils ont contribué à produire malgré l’austérité qu’ils ont subie.

Cette découverte, avec les conséquences qui en découlent, est saine. Elle anime aujourd’hui les luttes et le mouvement social. La notion de répartition pour des crédits à moyens globalement constants ne passe plus. Vouloir le nier, madame la secrétaire d’Etat, conduirait à de cruelles désillusions pour le Gouvernement.

Trop de citoyens vivent mal d’être à l’écart d’une richesse nouvelle du pays et, d’ailleurs, ils s’expriment par une non-participation aux élections. Les derniers résultats d’élections partielles aboutissent à des élections avec
15 % des inscrits. Pourquoi ? Après avoir dit à celles et à ceux dont le pouvoir d’achat est encore inférieur au SMIC : " On ne peut rien faire de plus pour votre salaire, il en est de même pour votre école, votre hôpital ", la crédibilité de la politique gouvernementale est en cause. Nous dépassons là, vous le voyez bien, une réflexion pouvant apparaître comme politicienne, mais en fait représentant un vrai choix de société.

La France manquerait de main-d’oeuvre qualifiée, mais elle ne donnerait pas les moyens nécessaires à l’évolution de notre système éducatif.

Les Français vivraient plus vieux. Des méthodes nouvelles de lutte contre la maladie se feraient jour et on ne pourrait pas faire face à l’achat de prothèses corrigeant la vue, la surdité. On ne pourrait pas faire face au paiement des frais de séjour dans les maisons de retraite. Les services publics devraient augmenter leur productivité de
1,5 %, accéder aux 35 heures, mais sans moyens nouveaux alors que la création d’emplois se fait pressante.

Madame la secrétaire d’Etat, mes chers collègues, là sont les choix de société, là s’expriment les choix budgétaires pour l’année prochaine. Je vous mets en garde. Les idées d’extrême droite progressent, lit-on dans certains sondages. Même si les partis d’extrême-droite reculent, la progression de leurs idées est grave. La logique, la justice, l’efficacité des choix budgétaires sont les meilleurs antidotes à l’inégalité et à l’injustice. Elles peuvent renforcer le dynamisme de celles et de ceux qui ont mis leur espoir dans le renouveau de 1997. Ne pas les décevoir est, à notre avis, le choix budgétaire premier.

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