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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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La France ne sortira pas de la crise sans politique audacieuse

Loi de finances pour 2013 -

Par / 22 novembre 2012

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la discussion du présent projet de loi de finances se situe bien évidemment dans le prolongement des débats fondamentaux que nous avons eus depuis le début de la session.

Ce texte porte les stigmates de la loi autorisant la ratification du traité budgétaire européen, de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques et enfin de la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques elle- même. Il ne serait donc que la première manifestation de ces trois éléments essentiels des politiques publiques des années à venir.

Une telle approche, parfaitement concevable, amène d’ailleurs à adopter a priori une position sur le présent texte.

Résumons-nous : si l’on est contre le traité budgétaire, ce qui est notre position, contre la règle d’or issue de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, ce qui est également notre position, et que l’on a rejeté la loi de programmation, comme c’est encore notre cas, on peut en déduire, aussi logiquement que mécaniquement, qu’il n’y a pas à débattre du présent projet de loi de finances et qu’il faut se préparer à le rejeter.

Mais nous croyons pour notre part aux vertus du débat public et à celles de l’analyse concrète d’une situation concrète. Nous pensons que les débats parlementaires que nous allons mener permettront peut-être de dégager d’autres solutions à la grave crise des finances publiques que nous connaissons, quitte à dévier quelque peu de la trajectoire apparemment tracée par les textes précédemment cités.

Nous partageons évidemment le constat de la gravité de la situation. Dix années d’exercice du pouvoir par la droite ont conduit au doublement de la dette publique et à une dégradation généralisée de la situation économique et sociale.

Cette dégradation prend des caractères extrêmement variables, allant de l’insécurité grandissante dans certains quartiers dits « sensibles » au développement du chômage et de la précarité, en passant par l’échec scolaire et certains reculs de la vie associative. Mon amie et collègue Marie-France Beaufils vient de donner des chiffres en la matière.

Le développement des inégalités sociales est donc allé de pair avec une dégradation du lien social. Dix ans de pouvoir de droite ont conduit les Françaises et les Français à un recul de la citoyenneté, un recul de ce qui fait sens dans la communauté des habitants de notre pays.

Remédier à cette situation commande-t-il, comme on le fait dans le présent projet de loi de finances, de mettre en œuvre une sorte de « choc fiscal » marqué par un accroissement sensible du rendement de nos impôts et taxes en vue d’une réduction, en théorie, du déficit public, tout en menant parallèlement une politique d’austérité qui, sous bien des aspects, n’a rien à envier à ce qui se fait un peu partout en Europe ?

Dans les faits, la plupart des instances internationales reconnues distinguent clairement les situations.

L’Asie va continuer de connaître, dans les années à venir, une croissance relativement soutenue, même si le modèle chinois de développement économique donne quelques signes d’essoufflement ; les Grecs ou les Portugais l’échangeraient aisément contre l’actuelle austérité qui prévaut chez eux. Une croissance, même ralentie, à 7,5 % du PIB, qui n’en voudrait pas ?

Les États-Unis, désormais libérés des contingences de l’élection présidentielle et des incertitudes relatives à son résultat, semblent devoir connaître une certaine forme d’embellie, ce qui fait désormais d’eux le premier client de la Chine. Pour autant, le FMI estime que la croissance américaine atteindra 2,75 % en 2013.

Les pays d’Europe non membres de l’Union européenne ne sont pas nécessairement en mauvaise forme, la Russie tournant autour des 4 % de croissance, tandis que les autres pays émergents – Brésil, Argentine, notamment – connaissent des croissances du même ordre, tout juste ralenties par les conséquences des politiques d’austérité mises en œuvre en Europe.

Tous les pays européens, singulièrement ceux de la zone euro, présentent aujourd’hui une tendance récessive. Les prétendus plans de sauvetage de la Grèce, de l’Irlande, du Portugal, de l’Espagne ou de l’Italie, que nous n’avons pas soutenus, conduisent ces pays à la récession, à l’abaissement, à la perte de leurs capacités, voire à la ruine de leur économie.

Tout se passe aujourd’hui comme si l’austérité imposée aux uns, contre toute logique et sans autre résultat que l’accroissement de leurs difficultés, était exportée chez les autres et engendrait d’elle-même de nouvelles politiques d’austérité aussi stupides que néfastes.

Tout cela, pour quoi faire ? À quoi sert le TSCG ? À maintenir la parité de l’euro par rapport aux autres devises ? C’est un échec de ce point de vue : le dollar s’est apprécié par rapport à l’euro, et il faut aujourd’hui 1,30 dollar pour 1 euro ! Quant au franc suisse, il vaut aujourd’hui 83 centimes d’euro, alors qu’il cotait 68 centimes d’euro il y a dix ans…

L’euro, monnaie unique, cet outil « formidable », s’est dévalué, victime de l’austérité, et cela ne sert même pas aux économies de la zone euro – si l’on excepte l’économie allemande – pour gagner en efficacité dans le commerce international.

Toujours est-il que même l’Allemagne semble en situation de récession : la croissance au troisième trimestre n’y est pas meilleure qu’en France ; le niveau de chômage tend à croître, malgré les emplois à cinq euros de l’heure, voire moins, et les comptes publics n’y sont plus aussi florissants qu’avant.

À vouloir imposer une austérité sans borne à l’ensemble de l’Europe, voici donc Mme Merkel aux prises avec le carcan qu’elle a souhaité imposer aux autres, mettant en péril l’économie et la société de ce pays vieillissant et quelque peu inquiet de l’avenir qu’est devenue l’Allemagne fédérale.

Dès lors, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est grand temps que nous sortions de l’ornière dans laquelle la course exténuante au fameux 3 % de déficit risque d’entraîner notre pays, comme elle entraîne en ce moment l’Europe !

Vous avez raison, monsieur le ministre, de vouloir la justice fiscale, de traiter les revenus du capital comme ceux du travail – mais j’aurais des choses à dire sur ce point ! –, de considérer les plus-values comme des revenus « ordinaires » et de pourchasser l’optimisation fiscale des grands groupes, comme vous le faites, je dois le dire, dans une partie non négligeable du présent projet de loi de finances.

Mais, là où vous avez tort, nous semble-t-il, c’est de confronter l’aspiration à la justice fiscale, qui s’est largement traduite au printemps dernier dans le vote des Français, monsieur Rebsamen, et les fortes attentes de justice sociale à la réduction de la dépense publique, au gel de la rémunération des fonctionnaires, à la saignée pratiquée dans les crédits de la culture, aux artifices comptables des prélèvements autoritaires destinés à « boucher les trous », au retard apporté à certains projets et, en partie, à la soumission acceptée aux marchés financiers.

Tout à l’heure, monsieur Rebsamen, vous établissiez une distinction entre le groupe CRC et la droite. Je vous rejoins bien évidemment. En revanche, mon point de vue diverge du vôtre sur ce que souhaitent les Françaises et les Français. Quitte à caricaturer quelque peu votre propos, je ne crois pas que nos concitoyens accueillent presque avec joie la politique menée actuellement.

Mes chers collègues, rappelons-nous : l’ennemi, c’était la finance, disait-on du côté du Bourget au printemps. L’ennemi, ma foi, on semble s’en être accommodé, puisque la justice fiscale proclamée va surtout servir à payer la rente de 50 milliards d’euros – ou peu s’en faut – que les marchés exigent de la France au titre des intérêts de la dette publique !

M. Jean-Pierre Caffet. Il faut bien les payer !

M. Thierry Foucaud. Il faudra bien, mes chers collègues, que nous nous penchions sérieusement sur le rôle joué par les marchés financiers dans l’absence d’investissements industriels répondant aux nécessités de développement de la production et de l’emploi, de la croissance.

M. Serge Dassault. Vous avez raison !

M. Thierry Foucaud. Les pressions que le lobby bancaire fait peser sur le projet de loi relatif à la création de la banque publique d’investissement et sur le projet de loi de réforme bancaire ne peuvent manquer de nous inquiéter de ce point de vue.

Mais quand donc aura-t-on le courage politique de mettre en question le rôle d’une Banque centrale européenne qui protège si bien la parité de l’euro au point que celle-ci s’est affaissée au regard des grandes devises de la planète ?

Dans le cadre de cette discussion, nous, parlementaires du groupe CRC, avons déposé un certain nombre d’amendements dont la finalité générale est d’aller plus loin que ne le fait le projet de loi de finances voté par l’Assemblée nationale. Bien sûr, mes chers collègues, nous ne partons pas de rien : pour une part essentielle, ces amendements sont identiques à ceux que la majorité de gauche du Sénat, dans une belle unanimité, comme pour affirmer un manifeste, a votés l’an dernier, lors de la discussion de la loi de finances pour 2012.

Nous ne pouvons donc que reprendre le travail là où il a été laissé et là il nous avait menés.

Notre objectif est clair : créer les conditions de la croissance, faciliter l’investissement productif, rendre aux plus modestes et aux salariés du pouvoir d’achat, aller plus loin sur la voie de la justice sociale.

Sur le plan budgétaire, cela se traduirait par un accroissement des ressources de l’État sans doute plus élevé que celui qui est prévu par le texte initial. Cela signifie, bien évidemment, que nous sommes clairement partisans de briser le tabou du gel de la dépense publique et de définir, en fonction des priorités et de l’utilité sociale, une dépense publique nouvelle, utilisant ce surplus de recettes, donnant une impulsion spécifique à l’activité économique.

Le New deal, monsieur le ministre, ensemble d’outils de sortie de crise définis par Roosevelt et ses conseillers, n’a jamais été un plan d’austérité !

Nul doute que la France ne puisse sortir de la crise sans que soient menées des politiques publiques audacieuses et déterminées, sortant des schémas qui nous ont conduits à la croissance zéro d’aujourd’hui, du fait de la politique menée par la droite.

Et les 120 milliards d’euros du pacte de croissance européen ne suffiront pas à faire le compte, croyez-moi, pas plus que les 20 milliards d’euros du « pacte de compétitivité » ne seront plus efficaces que les 170 milliards d’euros de cadeaux fiscaux et sociaux déjà accordés aux entreprises pour relancer, prétendument, l’activité industrielle.

En conclusion, c’est en fonction de l’évolution du contenu de la première partie du projet de loi de finances que nous serons amenés à nous déterminer.

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