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La Principauté ne perdra son caractère de « paradis fiscal » que de manière marginale

Convention fiscale avec Andorre (nouvelle lecture) -

Par / 19 février 2015

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans l’attente de la mise en œuvre du standard international que prône désormais l’OCDE, à savoir l’échange automatique d’informations, il nous faut encore gérer quelque temps certaines questions fiscales par les conventions bilatérales. Or l’actualité récente nous montre bien à quel point cet objectif de transmission automatique devient crucial et urgent.

Nous voici donc réunis ce matin pour examiner à nouveau la convention fiscale entre la République française et la Principauté d’Andorre. Le Président de la République, pour des raisons historiques, se trouve d’ailleurs en être le co-prince, avec Son Excellence, l’évêque d’Urgell depuis 2003. Cet héritage de la féodalité – le Président de la République est en effet considéré comme le successeur du comte de Foix, premier co-prince français de la Principauté – est peut-être bien le seul qui résiste encore et toujours à l’usure du temps !

La convention fiscale dont nous débattons marque précisément l’entrée du droit fiscal andorran dans une certaine forme de modernité, caractérisée, entre autres choses, par la mise en place d’un nouveau système de fiscalité indirecte comportant une TVA aux taux sensiblement plus faibles que ceux pratiqués sur le territoire de la zone euro, d’un véritable impôt sur les sociétés et, surtout, d’un impôt sur le revenu dont 2015 marque la première année de recouvrement.

Cet impôt sur le revenu ne semble pas vraiment excessif pour les contribuables andorrans, attendu qu’il est notamment assorti d’une franchise de 24 000 euros, et l’application de deux taux, l’un de 5 % et l’autre de 10 %, ce dernier n’intervenant qu’à concurrence de 40 000 euros de revenus déclarés.

Rappelons qu’en France un revenu de 24 000 euros est pour l’essentiel soumis à un taux de 14 % et qu’un taux de 30 % s’applique aux revenus compris entre 26 764 et 40 000 euros.

De fait, même avec cette « modernisation » du droit fiscal andorran, qui ne sera plus concentré de manière quasi exclusive sur la seule perception de droits de douane, le fait de résider dans la Principauté restera relativement enviable sur le plan fiscal et celle-ci ne perdra son caractère de « paradis fiscal » que de manière somme toute marginale.

Disons qu’Andorre fait un premier pas, timide, dans la bonne direction.

La Principauté a connu un vigoureux développement économique, qui l’a fait passer d’environ 20 000 habitants en 1970 à plus de 85 000 au début des années 2010, avant que la détérioration de la situation économique ne conduise à une réduction de la population résidente, qui comptait 70 000 personnes environ en 2014.

À l’instar de la Principauté de Monaco, toutes choses égales par ailleurs, Andorre compte un grand nombre de résidents de nationalité étrangère, avec notamment près d’un quart d’Espagnols, un septième de Portugais et, selon les estimations de l’équivalent andorran de l’INSEE, un peu plus de 2 600 résidents français.

L’Espagne se positionne largement en tête pour les investissements directs étrangers dans la Principauté, très loin – faut-il le souligner ? – devant la France, et ce alors même que les activités commerciales et touristiques constituent le fer de lance de l’économie locale et que nous disposons, en ces matières, de quelque expertise.

Le sens de cette convention fiscale, qui vise à éviter les processus de double imposition inhérents à l’absence d’accords de cette nature, est aussi de nous permettre de rivaliser véritablement avec l’Espagne sur des projets économiques porteurs dans la Principauté.

Bien entendu, il y a la question du contenu de la convention, et notamment de son fameux article 25, dans lequel certains de nos collègues ont cru voir planer l’ombre d’une sorte de FATCA, ForeignAccount Tax Compliance Act, à la française. Je me permets à ce stade de souligner la pertinence du débat sur le principe de nationalité en matière fiscale, que l’administration américaine a d’ailleurs choisi. Une discussion de fond s’imposera au Parlement dans les meilleurs délais – c’est du moins le souhait que je formule ici.

Je rappelle que, dans un premier temps, nous avions lancé une discussion avec un État jusque-là dépourvu d’impôt sur le revenu. Or nous devons ratifier cette convention avec un État dont la fiscalité a été « mise à jour » peu de temps avant l’organisation d’une consultation électorale. En effet, le 1er mars prochain, quatre listes proposeront aux électeurs andorrans, et à eux seuls, de prolonger la vie politique de la Principauté, pour l’heure dominée par le parti des Demòcrates per Andorra.

Nous n’avons pas connaissance des rapports de forces politiques prévus lors de ce scrutin, même si le parti des démocrates semble en situation d’être reconduit aux affaires de la Principauté, selon une enquête publiée dans la presse locale.

Ce qui est en revanche certain, c’est que la Principauté, qui présente la particularité de ne pas être membre de l’Union européenne mais qui a fait de l’euro sa monnaie quotidienne – il y a en effet des euros andorrans –, entend clairement se rapprocher de la zone euro pour reprendre le fil de son développement économique.

Au-delà de l’adoption d’une convention fiscale pourvue des garde-fous nécessaires à sa mise en œuvre – le d) de l’alinéa 1 de l’article 25 de la convention n’a pas vocation à être appliqué sans un vote du Parlement français –, la France doit être attentive aux évolutions de la vie économique et sociale de cet État pyrénéen, où les enjeux de développement durable sont loin d’être absents et où la transparence financière et fiscale est plus que jamais nécessaire.

Cette transparence est souhaitée, nécessaire et indispensable sur ce sujet sensible, comme sur tous les autres sujets sensibles : je pense notamment au choix du gouvernement andorran de réaliser avant peu l’ouverture d’un casino et de développer une offre de jeux en ligne, activité dont nous connaissons pertinemment les difficultés d’encadrement.

On mesure ainsi la nécessité de ratifier au plus tôt cette convention, ce que nous ne pouvons que recommander ici.

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