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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Loi de finances pour 2006 : écologie et développement durable

Par / 3 décembre 2005

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la canicule de l’été 2003, les tempêtes de 1999 et les nombreuses inondations qui se sont succédé ensuite, les pics de pollution atmosphérique de plus en plus fréquents, pour ne prendre que l’exemple de la France, sont autant de témoignages du dérèglement du climat, de l’augmentation du nombre de phénomènes extrêmes - donc des conséquences de l’effet de serre -, sur lesquels maintenant à peu près tout le monde s’accorde.

Face à de tels phénomènes, il ne paraît pas exagéré d’affirmer que les décisions d’aujourd’hui engagent l’avenir de la planète et de ses habitants. En conséquence, la mise en oeuvre d’une politique de prévention et d’adaptation appelle une mobilisation financière à la hauteur de tels enjeux.

Le traitement de ces questions à l’échelon mondial, à travers le protocole de Kyoto et la conférence des parties à la convention Climat qui se tient en ce moment même à Montréal, illustre bien les difficultés pour concilier activité économique et respect de l’environnement. Cependant, nous devons dépasser ces difficultés, car l’attentisme aurait un coût bien plus important sur les plans tant humain qu’écologique.

Or, nous constatons avec regret que le budget du ministère de l’écologie et du développement durable - et je suis sûre, madame, que vous êtes la première à le regretter - va subir en 2006 une nouvelle réduction.

L’enveloppe budgétaire allouée à la mise en oeuvre des politiques environnementales s’élève à 632,97 millions d’euros en autorisations d’engagement, contre 791,20 millions en 2005, et à 615,6 millions d’euros en crédits de paiement, contre 576,72 millions pour 2005.

Ainsi, les autorisations d’engagement de la mission « Écologie et développement durable » baissent de 20 % en 2006 par rapport à 2005. Notons que la mission comprend trois programmes d’importance majeure : « Prévention des risques et lutte contre les pollutions », « Gestion des milieux et biodiversité », enfin, « Conduite et pilotage des politiques environnementales et développement durable ». Force est de constater que les crédits ne sont pas à la hauteur des missions définies.

À ce titre, Mme Keller, rapporteur spécial, rappelle très justement à propos du premier programme « les difficultés rencontrées par le ministère de l’écologie et du développement durable à honorer les engagements pris antérieurement ». Au demeurant, les efforts consentis pour la mise en oeuvre du réseau Natura 2000 sont d’abord motivés par la volonté d’échapper à la sanction communautaire, qui, nous le savons, peut coûter très cher.

D’une manière générale, toujours selon le rapporteur spécial, le montant des crédits alloués à l’environnement ne permettra pas au ministère d’assurer « la réalisation concrète de certaines [de ses] actions ».

À la situation budgétaire difficile du ministère s’ajoute cette année le manque de lisibilité des documents budgétaires : le fait de raisonner par mission, le fait aussi que certains programmes proviennent d’autres ministères conduisent à ce qu’il soit très difficile de s’y retrouver. Tout cela n’est pas fait pour faciliter le travail parlementaire.

L’examen du projet de loi de finances qui nous est soumis traduit la diminution du soutien des politiques publiques. Ainsi, l’État se désengage d’un grand nombre de domaines. Est-ce à dire qu’à la fin des fins la décentralisation ira jusqu’à confier aux collectivités territoriales le soin de financer les politiques publiques en matière d’environnement ? C’est une question que je pose.

À titre d’exemple, il nous paraît difficile de voter un budget de l’environnement dans lequel aucune mission n’est consacrée à l’eau. On sait combien la direction générale de l’eau et le ministère de l’écologie n’ont plus les moyens de l’expertise. L’an dernier, déjà, nous déplorions le manque de moyens engagés pour la politique de l’eau. Nous ne connaissons que trop bien le discours selon lequel la baisse des crédits en ce domaine se justifie par la délégation d’un certain nombre de missions aux agences de l’eau : à l’évidence, ces agences ne pourront pas tout supporter.

Parlons clair : l’État est de moins en moins présent et actif. Il n’a que trop rarement mis l’accent sur une politique de prévention de toutes les pollutions, même diffuses, et de préservation des écosystèmes. Il ne s’est que peu engagé en faveur de politiques d’information, de formations et d’expertises pour aider les collectivités.

Ces dernières, pour leur part, ont été obligées de se lancer dans des investissements coûteux sans véritables aides techniques et financières à la hauteur des besoins. Aussi, il est grand temps que l’État réinvestisse sa mission de service public. En effet, nous avons besoin d’un pilotage fort au niveau central pour mettre en oeuvre une politique intégrée de l’eau afin de répondre aux exigences, notamment, de la directive-cadre européenne mais, plus largement, à celles qu’impose la situation.

Abordons maintenant la question des moyens donnés aux différents organismes chargés de missions environnementales.

Les crédits alloués à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, restent insuffisants. L’ADEME, qui constitue le principal opérateur du « plan climat », doit réfléchir aux équipements en matériels écologiques, à la gestion des déchets, aux biocarburants... Aussi, eu égard à l’importance de telles missions et au déficit de crédits de paiement de l’agence, sa situation continue de nous paraître préoccupante. Depuis 2000, son budget a perdu 25 %, alors que les questions environnementales soulèvent de plus en plus d’inquiétudes.

En ce qui concerne l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET, qui succède à l’Agence française de sécurité sanitaire environnementale l’AFSSE, et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques, l’INERIS, l’austérité budgétaire en matière d’environnement, là encore, est regrettable.

L’AFSSET intervient dans la mise en oeuvre du plan national de santé environnementale lancé le 21 juin 2004 pour la période 2004-2008. Ce plan a trois objectifs prioritaires de grande envergure : garantir un air et une eau de bonne qualité ; prévenir les pathologies d’origine environnementale, notamment les cancers ; mieux informer le public et protéger les populations sensibles. Il est piloté par les ministères de l’environnement, de la santé, du travail et de la recherche. Là encore, la lisibilité du budget fait défaut.

De plus, la Cour des comptes a considéré en mars 2005 que l’AFSSE n’était pas en situation de remplir sa mission de coordination en matière de santé environnementale : on est donc en droit de s’interroger sur l’amélioration de ce point dans le cadre de l’AFSSET.

Enfin, l’INERIS connaît également des difficultés. À titre d’exemple, rappelons ici que, dans la gestion de l’après-mines - sujet qui m’intéresse particulièrement, en tant que Lorraine -, la publication des plans de prévention tarde, ce qui bloque la situation urbanistique des communes concernées.

Par ailleurs, en matière environnementale, on a pu constater l’importance du rôle des associations. Or Bernard Rousseau, président du réseau « eau » de France-Nature-Environnement, affirmait, dans un entretien au journal Le Monde : « Nous sommes de plus en plus sollicités par l’État pour assurer des missions de service public, mais nous n’aurons bientôt plus les moyens de fonctionner. »

En effet, le Gouvernement a encore réduit les crédits alloués au financement des actions associatives. Ainsi, l’action « Développement durable » prévoit l’attribution de 4,4 millions d’euros au titre des partenariats associatifs, contre 5,3 millions d’euros en 2005. Les aides de l’État aux associations ont chuté de 33 % entre 2002 et 2005. On sait pourtant que, dans un secteur comme l’environnement, beaucoup dépend de leur activité. Cette politique nous paraît quelque peu contradictoire avec le discours du président de l’UMP, qui envisageait récemment de « résoudre tous les problèmes d’environnement en France d’ici une génération ». Nous demandons vraiment à voir !

Le financement des parcs naturels suscite aussi nos inquiétudes. En effet, les restrictions budgétaires des crédits de fonctionnement des parcs naturels régionaux auront de lourdes conséquences sur le bon fonctionnement de ces parcs. Je pense en particulier aux parcs naturels régionaux, dont la situation est catastrophique : en 2005, leurs subventions de fonctionnement ont baissé de 20 % par rapport aux montants inscrits dans les contrats de plan.

S’agissant des changements climatiques, l’Assemblée nationale, en totale contradiction avec la charte de l’environnement que nous avons ratifiée, a adopté un amendement visant à supprimer 1 million d’euros de crédits affectés à cet enjeu majeur. Plus exactement, comme le notait le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, notre collègue Jean Bizet, c’est l’ensemble des moyens prévus pour la prévention comme pour l’adaptation qui se trouvera affecté par cette restriction budgétaire si, malheureusement, elle devait être confirmée.

Pour que la campagne menée par la France en faveur du traitement du réchauffement climatique ne soit pas un simple affichage, il nous paraît nécessaire de donner les moyens de leurs missions à la MIES, la mission interministérielle de l’effet de serre, et à l’ONERC, l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique.

Les crédits alloués à la mission « Écologie et développement durable » ne nous paraissent pas suffisants au regard des enjeux tant environnementaux que de santé publique que la France se doit de relever.

C’est volontairement, madame la ministre, que nous n’avons pas déposé d’amendement : déshabiller Pierre pour habiller Paul n’est pas un exercice auquel nous souhaitions nous livrer.

Cependant, pour les raisons que j’ai indiquées, nous soutiendrons l’amendement du rapporteur visant à rétablir les crédits nécessaires au fonctionnement de la MIES ; je m’en expliquerai plus longuement le moment venu.

En tout état de cause, vous comprendrez que les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen soient défavorables au projet de budget tel qu’il est présenté dans la mission « Écologie et développement durable ».

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