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Finances

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Loi de finances pour 2006 : transport

Par / 9 décembre 2005

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers Collègues,

Comme chaque année, le Parlement se livre à cet exercice du vote du budget de la nation, budget sur lequel il n’a en réalité pas la main puisqu’il est conçu dans le secret des ministères.

La pratique qui veut que les parlementaires soient dépossédés chaque année de leur pouvoir législatif est à mon sens une pratique peu satisfaisante qui ne respecte pas le principe de séparation des pouvoirs et de la démocratie représentative.

En outre, est-ce logique que les parlementaires soient amenés à se prononcer sur un budget pour lequel l’administration a déjà programmé des gels qu’elle imposera dès le début de l’année suivante ?

De plus, depuis l’entrée en vigueur de la LOLF, cet exercice est devenu encore plus formel. La lecture des bleus budgétaires ne donne aucune indication sur les actions précises qui seront menées par le gouvernement mais définit des grandes masses, laissant la possibilité au gouvernement de réorienter les crédits à sa guise. La seule chose qui semble assez évidente, parce que difficile de cacher, c’est la diminution progressive des crédits attribués à la mission transport.

En effet, l’annonce de la hausse du budget transport qui atteint 17 milliard d’euros est faite sur la base de ressources exceptionnelles liées à la privatisation des concessions d’autoroutes.
D’un point de vue technique, l’exercice qui tend à donner des subvention à l’AFIT qui se retrouve ensuite dans les fonds de concours est un procédé pour le moins très contestable.

Cette récente agence de financement des infrastructures de transports va, selon le gouvernement, enfin disposer de ressources exceptionnelles, à la hauteur des enjeux de rééquilibrage modal dans le secteur des transport.
En effet, elle disposera cette année de 2 milliards d’euros de ressources pour réaliser ces objectifs, dont la clef de répartition est fixée ultérieurement par le conseil d’administration de l’AFIT.

Si elle avait initialement en charge le financement des grands projets du CIADT, elle a depuis la CIACT du 14 octobre dernier également la charge la mise en oeuvre des contrats de plan état région.

Or, si on déduit du budget de l’AFIT les sommes consacrées à la réalisation des contrats de plan, l’agence ne diposera, en fait, que de 900 millions d’euros pour la mise en oeuvre des décisions d’infrastructures du CIADT alors qu’elle disposait l’année dernière de 1,1 milliard. Mettre à la charge de l’AFIT l’éxecution des contrats de plan permet donc d’augmenter artificiellement le budget de la mission transport ainsi que celui de l’AFIT.

Cette évolution modifie gravement la nature même de cette agence et il conviendrait, pour le moins, que soit modifiée la composition de son conseil d’administration afin que celui ci intègre des représentants des collectivités territoriales.

Concernant la subvention spéciale annoncée de 4 milliards d’euros suite à la privatisation des concessions d’autoroutes, dont 836 millions cette année, quelles certitudes peut-on avoir que le reste de la subvention sera créditée les années suivantes et non utilisée pour la réduction de la dette ?
La question de la pérenisation des ressources de l’agence reste posée.

Au surplus, suite aux décisions prises lors du CIACT du 14 octobre dernier, l’AFIT ne va pas honorer l’ensemble des contrats de plan et notamment le contrat de plan Ile de france. En effet, sur 47 projet 20 sont supprimés.
Dans le même sens, le projet de budget enlève encore des crédits pour le financement des contrats de plan. Prenons l’exemple des transports collectifs en Ile de France, financé par l’AFIT au titre du contrat de plan Etat Région, le CIACT proposait une enveloppe de 180 millions alors que le projet de budget n’en propose que 81. C’est inadmissible !

Concernant le transport ferroviaire, comment ne pas constater la direction hasardeuse prise par le gouvernement, avec une baisse de près d’un milliard d’euros de crédits pour 2006.

Alors qu’un audit récent réclamait des hausses de subventions pour la régénération du réseau, le projet de budget propose la même somme que l’année passée soit 900 millions d’euros. Lors du passage devant l’assemblée nationale, la décision a été prise d’augmenter cette action de 70 millions d’euros, compensés par la cession d’actif de RFF.
Dans le contexte actuel de crise du foncier et de spéculation acharnée en ce domaine, il est pourtant évident que RFF va perdre de l’argent en étant contr aint d’agir dans la précipitation !

D’autre part, la contribution aux charges d’infrastructures est également en diminution de 75 millions d’euros et atteint 1 milliard 169 millions d’euros pour cette année. Cette baisse intervient parallèlement à une augmentation du tarif des péages de 60 millions soit une augmentation de 23% des tarifs des péages de RFF depuis 2003. Globalement, on assiste à une diminution inquiètante des subventions à RFF alors même qu’un effort particulier devrait être fourni pour l’amélioration des infrastructures ferroviaires.
Concernant la SNCF, la contribution à la reprise de la dette est diminuée de 50 millions d’euros en atteignant 627 millions d’euros.

La dette des deux entreprises nationales RFF et SNCF représente 41 milliards d’euros.Cette dette représente des frais financiers chaque années à hauteur de 2,5 milliards d’euros.
La contribution aux charges de retraites de la SNCF passera également de 2,515 à 2,459 milliards, soit une baisse de 56 millions d’euros.

La contribution aux tarifs sociaux de la SNCF pour une meilleure équité sociale passe de 109 à 89 millions.
Au total, votre proposition de budget, ce sont 136 millions d’euros en moins pour la SNCF.
Monsieur le Ministre, vous contribuez ainsi progressivement à placer la SNCF dans la même situation que la SNCM avec les conséquences que nous connaissons trop bien.
Concernant maintenant les transports collectifs, une fois encore, nous constatons que les crédits ne sont pas à la hauteur des besoins.

Ainsi, sur les années 2006/2007, ce sont 100 millions d’euros qui sont prévus pour les transports collectifs en province en plus des 45 millions de l’AFIT alors que les besoins sont estimés à plus de 650 Millions. En 2003, les crédits étaient de 138 millions d’euros puis avaient chuté en 2005 à 33 millions d’euros.
Le projet de budget entérine ainsi la pérennisation d’un nouveau modèle de financement axé sur le désengagement de l’Etat.

Les objectifs du programme infrastructures terrestres et maritimes sont clairement énoncés : seules les activités rentables doivent être poursuivies et celles qui seront trop déficitaires seront abandonnées. En conséquence, dans le bleu budgétaire, 4 objectifs sur 3 de l’action concerne le TGV. Une enveloppe de 11 milliards d’euros sera disponible pour financer 4 lignes TGV sur la période 2006-2011. Mais il n’est nullement fait mention de l’avenir des trains grandes lignes, dont la période récente a pourtant montré l’importance, serait-ce là aussi un signe de désengagement ?

L’Etat préfère laisser la place à l’intiative privée, notamment en inaugurant les fameux partenariats publics privés. Ce procédé a d’ailleurs permis, soit dit en passant, à l’assemblée nationale de ponctionner 30 millions d’euros sur le budget ferroviaire.
Mais évidement, les PPP ne sont envisageables que pour les infrastructures rentables commme les TGV ou les liaisons type Paris Roissy Charles de Gaulle. En quoi sont-ils pertinents pour l’aménagement du territoire et l’égal accès au service public ?

De plus, non content de confier la réalisation des infrastrucutres à des investisseurs privés, c’est également la maintenance qui peut être concédée. Or, même si l’on assure que la maintenance de sécurité restera dans le giron de la SNCF, tout relève de la sécurité dans l’entretien des voies.

En réalité c’est votre stratégie de rentabilité économique qui guide une nouvelle fois ce budget, rentabilité économique mais déclin du mode ferroviaire, ouverture à la concurrence mise en oeuvre dans le domaine du fret, mais aussi ouverture à la concurrence du transport urbain et du transport passagers en 2010 selon le conseil des ministres mais en 2008 selon le parlement européen.

Pourtant, les résultats du plan fret ferroviaire pour le premier semestre 2005 avec plus de 10% de retard sur les produits escomptés devrait vous inciter à plus de prudence, notamment par la mise en oeuvre d’un bilan économique et social de la déréglementation dans le secteur des transports. Mais non, vous persistez dans la voie de l’ultralibéralisme qui porte en elle le recul des droits, le recul de la société toute entière en détruisant le principe de solidarité humaine et territoriale.
La rationalisation des coûts et la pertinence économique sont les maîtres mots de ce budget mais n’avons nous pas des exemples des dérives de ces politiques libérales en termes de sécurité.

Cette dérive est particulièrement marquée dans le secteur aérien. On a beaucoup parlé cet été de loi des séries en parlant de la succession d’accidents d’avions, mais il n’existe aucune fatalité, ce n’est pas la loi des séries, ni un mauvais coup du sort, c’est la loi du marché mise en oeuvre au niveau international et notamment européen.

En effet, le règlement ciel unique européen entérine la déréglementation du secteur aérien et organise la séparation fonctionnelle entre les activités de sécurité et les activités régaliennes. Les activités de sécurité sont ainsi confiées au niveau européen à l’Agence européenne de sécurité aérienne.

Par conséquent, le budget aérien pour 2006, ainsi que la réorganisation de la DGAC, sont à l’image de cette séparation entre les activités régaliennes qui relèvent du budget général et celles de la sécurité et des prestations qui relèvent du budget annexe « contrôle et exploitation aérien ».

Ainsi, on ouvre la voie à l’externalisation des missions de sécurité en ne les considérant plus comme des missions régaliennes de l’Etat.
Cela s’explique par le fait que les politiques ultralibérales consacrent les notions de rentabilité et de libre concurrence comme seuls mode de régulation.

La recherche de réduction des coûts peut alors très naturellement se faire sur la sécurité, par l’externalisation et la sous traitance de la maintenance des appareils. La nouvelle notion de « risque acceptable » illustre parfaitement cette dérive libérale dans le secteur des transports.

De plus, il serait également opportun de consacrer des moyens supplémentaires à la DGAC et au BEA. Pour le Bureau d’Enquête et d’Analyse, dont tout le monde reconnaît qu’il s’agit d’un excellent outil, les besoins sont estimés à 20% de personnels supplémentaires et vous n’octroyez les moyens que pour une augmentation de 8% avec un objectif limité à 75% des enquêtes cloturées en 2009.
Si le budget aérien est présenté à la hausse, c’est parce qu’il intègre le transferts des immobilisations effectuées par ADP pour la navigation aérienne.

Les crédits de l’ex FIATA, qui financent les subventions pour les dessertes d’aménagement du territoire, reculent une nouvelle fois en atteignant 19,6 millions d’euros contre 28,1 en 2004. De plus, aucun engagement supplémentaire n’est prévu. C’est une nouvelle fois, la conséquence du retrait massif de l’Etat de ses missions d’aménagement du territoire.

Au final, en réduisant une nouvelle fois les ressources des entreprises publiques, en livrant à la concurrence les secteurs rentables, en assurant au patronat routier sa domination sur les autres modes de transports, en dépossédant le parlement de son rôle par la création de l’AFIT et l’absence de maîtrise publique des financement, vous ouvrez la voie à la marchandisation des transports.
Nous estimons au contraire que les transports sont un élement essentiel du développement partagé et du progrès social par la reconnaissance d’un droit fondamental, celui de la mobilité pour tous sur l’ensemble du territoire et c’est pour cette raison que nous voterons contre ce projet de loi de finances concernant la mission transport.

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