Finances
Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.
Un budget insoutenable
Par Pascal Savoldelli / 30 novembre 2023La majorité sénatoriale votera la première partie de ce budget pour 2024, comme il l’a fait pour le budget de la sécurité sociale. C’est une forme de continuité. Ce-faisant, elle donnait son aval au rabot, « au nom de l’efficience » de 500 millions d’euros sur les hôpitaux. En décalage total avec les 2 milliards réclamé par la Fédération hospitalière de France.
Des déficits abyssaux revendiqués. La rigueur pour le monde hospitalier, plongeant nos concitoyennes et nos concitoyens dans une insécurité sanitaire.
Le déficit provient du refus, en bloc, de prélever sur le capital le financement des besoins de santé publique. Ce projet de loi de finances s’inscrit dans la même logique.
L’examen au Sénat ménage les plus riches, les patrimoines mirobolants, et les revenus financiers. Exception faite d’une contribution sur les rachats d’actions des grandes entreprises. Cette mesure pour laquelle notre groupe s’est particulièrement battue rapporterait 3,3 milliards d’euros au profit des finances publiques, contre l’avis du rapporteur, contre l’avis du Gouvernement.
Les propositions du groupe centriste ciblent les ménages, et corrigent à la marge certaines injustices. Mais jamais les profits exponentiels du CAC 40 ne sont mis à contribution : je le rappelle, 80 milliards d’euros pour le premier semestre 2023. Le capital s’en sort bien, les inégalités sociales et fiscales subsistent.
La droite sénatoriale a contribué à accroitre comme jamais auparavant, les déficits publics. Elle a prolongé et renforcé dans ce projet de loi des niches fiscales non évaluées et coûteuses.
La partie recette est dévoyée. Elle porte mal son nom, quand n’y sont votées que des dépenses en faveur des plus aisés.
Au prétexte de résoudre la crise du logement, le Président Retailleau et ses collègues ont fait voter un relèvement de l’abattement pour les donations pour l’acquisition d’une résidence principale à 150 000€. Il nous faut tenir un discours de vérité : 87% des Français perçoivent un héritage total, dans toute leur vie, de moins de 100 000 euros. Ils ne payent déjà aucun droit. Ce rehaussement c’est une mesure à 2 milliards au moins, pour les plus riches. Le logement est un prétexte, l’Etat partenaire, associé aux plus riches, aux banques et aux organisations privées des marchés financiers, est le choix stratégique de la droite.
Les plus modestes, le logement social, lui est le grand absent de nos débats : 80 % des demandes dans le parc social sont éconduites. 2,14 millions de demandes en attente, qui nécessiteraient de construire 198 000 logements sociaux par an entre 2024 et 2040. En 2023, seuls 90 000 sont sortis de terre. Nous touchons le fond. Le Gouvernement et la droite sénatoriale refusent de désamorcer cette « bombe à retardement ».
Pour les collectivités, la perte de marges financières est toujours d’actualité :
– Certes, des amendements défendus notamment par notre groupe renforcent la Taxe sur les logements vacants.
– Mais Pas d’indexation de la DGF sur l’inflation, marquant une baisse de 5,6 milliards d’euros tous transferts confondus en euros courants ;
– Poursuite de la suppression de 19,6 milliards d’euros de CVAE, et perte potentielle de la dynamique pour les communes.
– Pas de déplafonnement ni de décorrélation réelle entre la taxe foncière et la taxes sur les résidences secondaires.
La centralisation des ressources des collectivités est un fait avéré. Des dotations à l’investissement, encadrées par les Préfets, c’est une conception de l’autonomie financière étroite.
Parallèlement, les collectivités sont traitées comme des sous-traitant des politiques nationales. C’est vrai pour le service public de la petite enfance, de la transition écologique …
Aussi, le vote d’une dotation de 100 millions d’euros, soit 1 million d’euros supplémentaires par département, contre l’avis du Gouvernement, s’avère notoirement insuffisant.
Dans mon département le Val-de-Marne, c’est moins 90 millions d’euros. Les départements menacent de déposer le bilan !
Les entreprises et les ménages aussi ! La dette privée, un tabou, frôle les 162% du PIB. La dette publique à côté fait pâle figure. Nous vous conseillons la lecture du livre de mon collègue Eric Bocquet, « La dette à perpette ».
Le tout, malgré le florilège de crédit d’impôt et autres aides en tout genre : ce n’est pas la fiscalité et les cotisations sociales qui endettent les entreprises. C’est le coût du capital et la pression des donneurs d’ordres qui s’engraissent. Les profits ne ruissellent pas, ni sur les entreprises ni sur les finances publiques.
Avec les membres de notre groupe, nous étions prêts au débat. Mobilisés mais conscients que malgré des heures de discussion, le Gouvernement règlera seul ce budget dans un 49.3. Le Parlement, comme les finances publiques en sortiront affaiblies.
Nous voterons contre les mal-nommés « recettes », elles creuseront le déficit. Sans mettre un coup d’arrêt à la tutelle égoïste de la finance capitaliste, nul budget n’est soutenable.