L’indispensable effort de maintenance préventive suppose des investissements massifs
Sûreté des installations nucléaires -
Par Fabien Gay / 6 janvier 2022En décembre dernier, EDF arrêtait les deux réacteurs de la centrale nucléaire de Chooz, dans les Ardennes, pour une vérification de potentiels défauts sur le circuit de refroidissement de sauvegarde, ainsi que les réacteurs de Civaux, dans la Vienne. Ces arrêts ont entraîné un défaut de production de l’ordre de 1 térawattheure, mais ils étaient nécessaires pour assurer le refroidissement du cœur du réacteur en cas d’accident. Nous saluons donc ces décisions.
L’énergie nucléaire est nécessaire dans la lutte contre le réchauffement climatique, dans le cadre d’un mix énergétique, mais cela soulève des questions à résoudre dans le cadre d’un débat citoyen, notamment sur l’utilisation de l’atome dans l’armement, sur les catastrophes de Tchernobyl et Fukushima ou sur la gestion des déchets nucléaires.
En effet, le nucléaire exige des installations sécurisées et sûres pour éviter ce type d’incidents ou d’accidents et il faut fournir à la population une information claire et transparente.
Surtout, il exige des installations entretenues au fil du temps et un effort de maintenance préventive et non uniquement curative, c’est-à-dire des investissements massifs. Ce grand carénage nécessite des compétences et des savoir-faire que les gouvernements successifs ont laissé disparaître, en mettant à mal le modèle d’entreprise intégrée qu’était EDF, par la privatisation progressive de ce groupe et par le recours à la sous-traitance. Cela entraîne une dilution des compétences ainsi qu’un éparpillement de la responsabilité.
J’aurai donc deux questions précises, madame la secrétaire d’État.
D’une part, nous devons être à la hauteur du besoin de sécurité de nos concitoyens et des défis auxquels doit faire face la production d’énergie. Quels sont donc les investissements prévus pour la maintenance de nos centrales et comment envisagez-vous l’avenir d’EDF, que vous souhaitez démanteler ?
D’autre part, quel retour d’expérience tirez-vous du recours à la sous-traitance dans le parc nucléaire en exploitation, au moment où vous relancez la construction de nouveaux réacteurs ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Pour ce qui concerne l’évolution d’EDF et le cadre régulatoire du nucléaire et de l’hydroélectricité, qui demeure nécessaire – nous sommes d’accord là-dessus –, le Gouvernement a demandé au président-directeur général d’EDF de formuler des propositions relatives à l’organisation du groupe afin de dégager les ressources nécessaires pour répondre aux défis qui s’annoncent, dans le cadre d’une entreprise intégrée et publique et de l’engagement de travailler sur une nouvelle régulation du parc nucléaire existant, tant pour protéger le consommateur des hausses de prix du marché – malheureusement, l’actualité nous y invite – que pour garantir le financement du parc nucléaire existant.
Sans régulation adéquate, le consommateur français et le producteur nucléaire seront exposés directement aux prix de marché européen, essentiellement déterminés par le prix des matières premières fossiles et du carbone, ce qui ne reflète pas la spécificité de l’approvisionnement électrique français. Or le consommateur doit pouvoir compter sur des prix stables et maîtrisés, que le parc nucléaire permet de garantir, et EDF doit avoir les moyens d’exploiter son parc de manière performante et lisible, et en toute sûreté.
Les responsabilités relatives à la sûreté et au contrôle sont assurées par l’ASN, autorité indépendante. En tout état de cause, le projet de réorganisation, qui prévoit une exploitation des centrales nucléaires par une entité publique, donne lieu à des échanges avec la Commission européenne en vue d’un accord global. Des progrès substantiels ont été réalisés, mais les discussions se poursuivent.
Dans le cadre de cette réforme de la régulation du parc nucléaire et du parc hydroélectrique, nous devons garder à l’esprit les deux piliers essentiels que sont la protection des consommateurs et le respect du maintien de notre outil industriel.