Une étape très importante dans le processus d’autodétermination

Une étape très importante dans le processus d'autodétermination - Accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi organique que nous examinons cet après-midi, en présence d’éminentes personnalités de Nouvelle-Calédonie, constitue, comme l’a souligné Mme la ministre, une étape très importante dans le processus d’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie. Ce n’est pas un texte technique ; il porte sur la délicate question de l’établissement d’une liste électorale spéciale pour le référendum de 2018, et notamment sur la définition des critères qui présideront à cette opération.

Le présent projet de loi organique est l’aboutissement d’un long, très long cheminement, cela a été rappelé. Pour en comprendre la signification, il faut remonter à son origine, c’est-à-dire aux accords de Matignon. En 1988, ces accords ont esquissé un cadre institutionnel et politique qui a permis de mettre fin à une situation quasi insurrectionnelle. Dix ans plus tard, l’accord de Nouméa, conclu par les partis politiques locaux, indépendantistes ou non, et l’État, a précisé ce cadre et établi les modalités et le calendrier du processus.

Par la suite, un comité des signataires de l’accord de Nouméa a été constitué. Il s’est réuni à maintes reprises pour suivre la mise en œuvre de cet accord. Lors de sa réunion d’octobre 2013, le douzième comité s’est prononcé pour une réforme des modalités de la consultation prévue. Comme l’a rappelé le rapporteur, cette réforme avait deux objectifs : faciliter les inscriptions sur la liste électorale spéciale en vue de la consultation et améliorer le fonctionnement des commissions administratives spéciales chargées d’établir les différentes listes électorales. C’est ce texte que nous examinons aujourd’hui sous la forme d’un projet de loi organique.

J’ai voulu évoquer, comme les intervenants précédents, ces différentes étapes qui s’étalent sur près d’une trentaine d’années, afin d’illustrer les difficultés et la complexité de la situation que vivent nos compatriotes de Nouvelle-Calédonie.

La rédaction du projet de loi organique adoptée par le conseil des ministres a rapidement suscité, pour des raisons opposées, le mécontentement, voire la colère des différents partis. Leur profond désaccord portait sur la question essentielle, et très sensible, de la composition du corps électoral qui sera amené à se prononcer sur l’avenir du territoire. J’oserai dire que c’était prévisible puisque le texte prévoyait l’inscription automatique sur la liste spéciale des seules personnes de statut civil coutumier. Ces personnes étant essentiellement représentées par des mouvements et partis indépendantistes, la réaction des partis adverses n’a pas tardé. Ils ont demandé que tous les natifs de Nouvelle-Calédonie, sous réserve d’une présence durable dans l’île, soient inscrits automatiquement.

Tous les ingrédients d’une nouvelle crise étaient donc réunis, d’autant que la situation politique du territoire était instable, tendue et confuse. Il faut en effet se rappeler que le gouvernement collégial calédonien venait de connaître trois mois de paralysie totale, et que, au terme de ces trois mois, l’exécutif n’avait pu être constitué qu’avec l’appui d’une partie des indépendantistes.

On le comprend aisément, derrière la question de la composition du corps électoral, il y a une question identitaire fondamentale à régler : celle d’une conception de la citoyenneté française qui n’est pas partagée par toute la population. Dans une telle situation, révélatrice des tensions et des oppositions difficilement conciliables de la société calédonienne, il était impératif de redéfinir un cadre : non que la solution aux problèmes identitaires du territoire soit juridique ; mais, au moins, dans le cadre d’un État de droit comme le nôtre, la fixation et le respect d’un certain nombre de règles garantissent la liberté des expressions diverses et la possibilité d’aboutir à un règlement politique des problèmes.

C’est pourquoi je voudrais saluer ici la méthode utilisée face à une situation de blocage qui aurait pu déboucher sur un retour aux violents affrontements du passé. Cette méthode, ce fut celle d’une large concertation sous l’égide de l’État, qui a pris la forme d’une réunion exceptionnelle du comité des signataires de l’accord de Nouméa. Le 5 juin dernier, grâce aux concessions des différentes parties, un consensus s’est dégagé pour, je n’hésite pas à le dire, préserver une paix civile gravement menacée.

L’accord prévoit d’abord l’élargissement à de nouvelles populations calédoniennes de l’inscription automatique sur la liste électorale du référendum. En outre, les commissions administratives chargées du contrôle des listes électorales seront modifiées pour accueillir une personnalité qualifiée supplémentaire, et le magistrat qui préside ces commissions sera doté de pouvoirs d’investigation.

Il faut bien mesurer que cet accord résulte de la volonté de chaque protagoniste de ce conflit latent de dialoguer à nouveau. Il constitue donc le bien commun de l’UC-FLNKS, du Palika, du Front pour l’unité, de Calédonie Ensemble et de tous leurs élus, qui représentent la population calédonienne dans sa diversité.

Nous discutons cet après-midi de la traduction de cet accord sous forme législative.

Il est évidemment nécessaire que sa mise en œuvre se fasse dans un climat de confiance et dans une situation politique apaisée. Même si l’on peut avoir, ici où là, quelques réserves, il faut donner aux Calédoniens, à tous les Calédoniens, cette chance de pouvoir se prononcer en toute connaissance de cause sur l’avenir de leur territoire.

C’est la raison essentielle pour laquelle le groupe communiste républicain et citoyen votera, sans hésitation, cette solution de compromis formalisée dans le texte adopté par notre commission.

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