L’impact de cette mesure est insuffisament pris en compte

Lettre au Ministre de l’Action et des Comptes Publics

Monsieur le Ministre,

Je souhaite attirer votre attention sur la réinstauration du jour de carence pour les agents du service public. Prévu à l’article 48 du projet de loi de finances pour 2018, cette mesure inquiète légitimement les différents organismes de représentants des agents de la fonction publique.

Une étude de l’INSEE parue le 10 novembre dernier permet de mettre en lumière l’évolution des comportements des agents, lors du test de ce dispositif entre 2012 et 2014. Certes, les absences de 2 jours sur cette période ont été divisées par 2. Les résultats montrent également que l’absentéisme ne diminue pas sur une semaine, et notent que les absences longues (de plus d’une semaine) ont elles, augmentées de 25%. Le taux d’absentéisme est toujours nettement plus élevé dans le privé que dans la fonction publique : il était de 2,91 % des fonctionnaires en 2014, contre 3,68 % des salariés du privé. Cette étude de l’INSEE fait la démonstration de l’inefficacité de l’instauration d’un jour de carence.

Par ailleurs, l’impact de cette mesure sur la charge de travail des services est insuffisamment pris en compte. L’édition pour chaque cas d’une « attestation pour perte de traitement » représentera une augmentation significative des tâches. De plus, aucun calendrier ou aucune mesure d’accompagnement des services ne sont envisagés laissant un doute sur la volonté de les mettre en œuvre.

Afin de neutraliser l’impact financier du délai de carence, certaines administrations pourraient demander à la protection sociale complémentaire de supporter les frais que l’Etat ne veut plus engager. L’organisme de prévoyance serait, ainsi, contraint d’augmenter le montant de la cotisation et donc indirectement de faire porter aux agents l’économie envisagée.

La couverture des arrêts maladies qui évite aux employés malades d’être pénalisés financièrement, est un facteur fondamental d’accès aux soins et de réduction des inégalités de santé et de revenus liés à la maladie. Une étude de l’IRDES d’avril 2015 note que le délai de carence pourrait engendrer un coût important à long terme, pour la Sécurité Sociale. Cela augmenterait l’usure au travail, le mal-être et la pénibilité qui pourrait être aussi les causes du micro-absentéisme. De plus, une autre étude de 2016 de la DARES, montre que la moitié des services ne dispose pas de plan d’action de prévention des risques au travail sur la dernière année. Il serait donc préférable d’améliorer les conditions de travail des agents et de prévenir les éventuels risques sanitaires.

Le service public est notre patrimoine commun, utile à toutes et tous. Les missions de ses agents sont indispensables au bon fonctionnement de nos institutions. Nos concitoyens espèrent accéder à un service public de proximité fort et doté de moyens humains et financiers suffisants.

Je compte sur votre bienveillance pour veiller d’une part au maintien de la qualité de notre service public et d’autre part, à la préservation des conditions de travail des agents de la fonction publique.

Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de mes sincères salutations.

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