Les citoyens souhaitent l’adoption de mesures contre la délinquance fiscale et financière

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a des hasards du calendrier qui ne peuvent qu’interpeller : alors que nous examinons, en un temps pour le moins limité, la convention de l’OCDE destinée à lutter contre l’érosion fiscale et la dissimulation des bénéfices, nous sommes également réunis pour débattre d’une proposition de loi téléguidée sur le secret des affaires.

Une proposition de loi dont on peut se demander, au demeurant, si elle ne va pas transformer certains montages d’évasion fiscale en autant de secrets industriels... Avouez qu’il serait quand même quelque peu dommage que la « marque de fabrique » de quelques-unes de nos entreprises soit désormais d’échapper à l’impôt, sous quelque forme que ce soit !

Revenons-en, dans ces quelques minutes d’intervention, à l’essentiel, à savoir que le poids de l’opinion publique au niveau international est devenu suffisamment fort pour que, devant l’importance présumée ou réelle de la fraude et de l’évasion fiscales, il ne soit plus possible, même à l’OCDE, vecteur de la pensée économique libérale en actes, de ne pas se décider à agir.

Tout commence en 2008, si j’ose dire, avec cette crise financière qui a failli emporter l’ensemble des marchés boursiers internationaux et a occasionné une application à grande échelle de la règle dite de socialisation des pertes.

N’oublions pas tout de même, mes chers collègues, que d’aucuns, ici, ont voté en une journée, sans en connaître le contenu exact le matin, un collectif budgétaire comportant 400 milliards d’euros d’engagements financiers publics destinés, d’une part, à recapitaliser les banques en difficulté et, d’autre part, à mettre de l’huile dans les rouages grippés des marchés financiers !

Dans ce contexte, l’opinion publique – la véritable société civile – est devenue quelque peu exigeante à propos de l’utilisation des deniers publics en pareil cas.

Les efforts imposés depuis longtemps aux salariés, aux retraités, aux jeunes, au nom de la concurrence mondiale conduisent naturellement ceux-ci à exiger que ces efforts soient désormais portés par d’autres.

C’est donc l’opinion publique, mes chers collègues, qui a fini par imposer l’adoption de mesures afin de poursuivre la délinquance fiscale et financière, notamment dans notre pays.

Au point que nous allons bientôt nous pencher sur une proposition de loi mettant en question l’existence de la commission des infractions fiscales, mesure qui, au demeurant, aurait pu être prise bien plus tôt...

Pour l’heure, notre club de trente-cinq pays développés à économie libérale, l’OCDE, nous propose une convention modèle, qui risque fort de nous conduire à rectifier une partie de notre arsenal de coopération fiscale internationale.

Tirons parti de cette convention à visée multilatérale pour procéder à l’évaluation de certaines conventions passées depuis 2008. Madame la secrétaire d’État, je pense notamment, sans être exhaustif, à celles qui nous lient au Panama, au Qatar ou aux Bermudes...

Notons cependant de suite que le document de l’organisation internationale est très largement optionnel et que, de fait, les conditions de la coopération sont plutôt souples.

L’ensemble de ces mesures et dispositifs met une fois encore en évidence que c’est du point de vue de l’impôt sur les sociétés, des revenus d’activité non salariée et de l’imposition des patrimoines que se situe l’essentiel de l’érosion des bases.

Cette convention de l’OCDE ne peut nous faire oublier qu’il nous faut réfléchir au devenir de notre propre système fiscal, au moment où certains pensent que les hausses de la contribution sociale généralisée, de la contribution climat-énergie et, peut-être, de la TVA peuvent aller de pair avec la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés et la pérennisation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et au moment où, sous l’impulsion des États-Unis, la guerre fiscale pour l’attractivité des territoires se rallume.

À notre sens, l’efficacité consisterait plutôt à rendre les dispositions fiscales universelles et à les construire de manière démocratique. C’est pourquoi nous vous avons proposé de promouvoir un projet de Conférence des parties au plan fiscal, sous l’égide de l’ONU, aux fins de préserver les conditions d’un développement durable et équilibré de l’ensemble des pays de la planète.

Voilà ce que nous voulions dire ce jour sur cette situation et sur cette convention. Nous voterons ce petit pas, conscients que le chemin sera encore bien long.

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