Il est grand temps que la sphère spéculative mette la main au portefeuille

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet article de la proposition de loi porte sur le financement de la remise à niveau des retraites versées par le régime agricole.

Bien entendu, ce ne serait pas la première fois qu’une recette de caractère fiscal serait mobilisée pour financer un des pans de « l’effort social de la Nation », puisque le régime agricole fait déjà l’objet de maintes dispositions de cette nature.

Pourquoi une taxe additionnelle sur les transactions financières ? Tout simplement parce que, depuis l’adoption de la loi de modernisation des activités financières il y a plus de vingt ans, les produits agricoles sont entrés dans le circuit infernal des marchés financiers de toute nature.

Il existe des contrats à terme pour négocier le prix des matières premières agricoles, en France, en Europe comme sur d’autres places boursières où l’on échange la production de pommes de terre, par exemple, avant que celles-ci n’aient commencé de fleurir, où l’on trafique le cours des produits de première transformation, où l’on décide, devant un écran, du prix que l’on paiera à un éleveur laitier ou à l’éleveur d’un troupeau de vaches allaitantes... Sans compter, bien entendu, les opérations menées sur les marchés céréaliers !

Soyons réalistes : ce qui désorganise les prix agricoles depuis plus de vingt ans et crée, par conséquent, une forte incertitude pour les exploitants en activité et met en question la régularité des ressources de la Mutualité sociale agricole, ce sont bien les transactions financières de caractère spéculatif. Les soumettre à taxation est donc non pas une idée saugrenue ou une illumination de quelque intellectuel marxiste ou d’un intellectuel qui serait ni de gauche ni de droite, ou de gauche et de droite, mais une simple question de logique : que l’argent du travail aille au travail, alors que la spéculation n’est rien d’autre qu’une ponction indue sur le travail !

Ne l’oublions jamais : les premiers marchés financiers à produits dérivés ont porté sur des produits agricoles. Il s’agissait alors de blé, de maïs, de viande de bœuf ou de jus d’orange.

Il est donc grand temps que la sphère spéculative, qui gage une partie de sa rentabilité sur le revenu des agriculteurs en activité, mette la main au portefeuille.

Là, il faut parler clairement. Notre collègue Roland Courteau l’a dit précédemment, ce que l’on vous demande, madame la ministre, c’est un centime sur les 10 euros de la spéculation financière des marchés agricoles ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.) Voilà ce que vous demande la majorité du Sénat.

Comme nous parlons des milieux agricoles, vous me permettrez de faire référence au poète :

« Quand les blés sont sous la grêle

« Fou qui fait le délicat »

Ne soyez pas délicats !

Retour en haut