Nous voulons une agriculture familiale, locale, permettant une production de qualité

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la négociation du prochain cadre financier européen pour la période 2021-2027 aurait pu être l’occasion de recadrer, réorienter, la politique agricole commune, mais, encore une fois, l’occasion est manquée. Le pire, c’est qu’il semble qu’il n’y ait plus véritablement de vision commune de la politique agricole européenne. Ainsi, la baisse du budget, annoncée à 5 %, sera en fait plus importante, comme cela a été souligné notamment par M. le ministre, afin de financer les nouvelles priorités politiques de l’Union européenne. Si le financement de ces priorités est nécessaire, cela ne doit pas se faire au détriment de l’agriculture.

Nous soutenons donc la démarche de nos collègues, en particulier sur la nécessité d’une adaptation du droit de la concurrence au secteur agricole, d’un renforcement du poids des producteurs dans la chaîne alimentaire ou encore d’un renforcement de la lutte contre les pratiques commerciales déloyales des firmes transnationales et contre les pratiques des centrales offshore d’optimisation fiscale du secteur de la distribution.

Toutefois, il ne faut pas se leurrer, la PAC a évolué au fil du temps vers un simple soutien au revenu des agriculteurs, principalement en fonction des surfaces cultivées – c’est le premier piller – et avec un budget modeste pour financer le développement rural – le second pilier. Ce faisant, elle bénéficie principalement aux gros producteurs.

L’objectif d’accroissement de la productivité a pris le pas sur les autres objectifs et a provoqué la disparition massive des petites exploitations jugées moins rentables et moins capables de faire face aux défis de la concurrence, notamment dans le cadre de l’OMC, qui exige que l’Union européenne aligne ses prix agricoles sur les cours mondiaux.

Il y a donc ceux qui s’enrichissent – 84 % des aides vont à 20 % des agriculteurs – et les petits exploitants qui ne s’en sortent pas.

La tentative de verdissement des aides, décidée en 2013, a globalement été un échec. Les propositions qui sont aujourd’hui sur la table correspondent à une PAC beaucoup moins commune avec une forte réduction des budgets du second pilier et un renoncement à toute politique environnementale ambitieuse.

Il est urgent que l’Europe mette en place une nouvelle politique agricole commune, intégrant un véritable plan stratégique de souveraineté et de sécurité alimentaires, et qu’elle cesse de sacrifier son agriculture sur l’autel du libre-échange. Il faut aussi que cessent les concessions agricoles accordées dans les négociations commerciales – MERCOSUR, CETA, etc. –, qui menacent des pans entiers de l’agriculture européenne et nombre de nos territoires.

De plus, pour nous, comme pour nos collègues députés européens, il faut sortir la PAC de cette politique productiviste mortifère. Entre le flux des paiements indiscriminés du premier pilier, dont une proportion échappe in fine aux agriculteurs et dont les effets redistributifs posent question, et l’éparpillement du second pilier entre des objectifs très variés, la politique agricole commune n’a plus de véritable orientation.

À l’inverse, nous voulons une agriculture familiale, locale, permettant une production de qualité, un « réinvestissement » des campagnes et une transition écologique et ayant pour objectifs la souveraineté alimentaire et une rémunération juste pour celles et ceux qui travaillent la terre.

Pour cela, nous demandons une relocalisation de la production afin de favoriser les circuits courts, qui permettent une meilleure traçabilité des produits et favorisent de nouvelles formes de distribution.

Nous demandons aussi une redirection des aides vers les exploitations paysannes en faveur de la transition écologique ; une sortie du glyphosate et des substances nocives pour la santé et l’environnement, tout en accompagnant financièrement les agriculteurs ; une production axée sur la transition écologique, en favorisant la rotation des cultures et en refusant les OGM ; la mise en place des réformes foncières par les États membres pour lutter contre la spéculation sur les terres et l’étalement urbain ; des instruments publics de régulation de la production – réinstauration de quotas pour sortir de la logique de surproduction, maintien des droits de plantation des vignes – ; la mise en place d’un système européen de garantie de la propriété publique du patrimoine génétique animal et végétal pour éviter son appropriation par les multinationales ; la mise en place d’agences publiques de certification et de contrôles des productions bio et des labels afin de favoriser les savoir-faire locaux.

Nous voterons bien évidemment cette proposition de résolution européenne pour consolider le budget de la politique agricole commune, mais nous devons aussi être beaucoup plus ambitieux sur les objectifs et le contenu de cette politique. En ce qui nous concerne, nous ne cesserons de travailler dans le sens d’une agriculture durable et de qualité, tant en France qu’en Europe.

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