La baisse des dotations aux collectivités territoriales et la suppression de l’ISF ont réduit les dons aux associations

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la vie associative est fondamentale pour nos territoires : 1,3 million d’organisations participent activement au renforcement du lien social et à la cohésion de la France, et nombre de missions essentielles à notre vie en commun sont assurées grâce à l’engagement de 15 millions de bénévoles. Il y a là, assurément, de quoi légiférer, d’autant que ce sujet n’occupe pas toujours la place qu’il mérite.

La proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui apporte des améliorations, que nous saluons.

Par exemple, étendre le principe de l’exception de négligence à toute personne morale, alors qu’il n’est applicable à l’heure actuelle qu’aux dirigeants d’entreprises, nous semble tout à fait positif. Cela remédie à la situation incongrue dont sont aujourd’hui victimes les dirigeants d’associations, qui peuvent se voir contraints d’engager leurs propres ressources pour combler l’insuffisance d’actif de l’association. Il nous semble cependant nécessaire de préciser cette disposition, pour exclure de son bénéfice les dirigeants de fondation, lesquelles ne sont en effet pas gérées de la même façon que les petites associations de quartier : elles sont « professionnalisées », et nous devons en tenir compte.

Nous sommes également favorables à ce que l’on s’oriente vers la redistribution des fonds disponibles sur les comptes bancaires associatifs inactifs, en l’occurrence via l’élaboration d’un rapport, puisqu’il semble que nous ne puissions aller plus loin à ce stade. Des sommes très importantes pourraient ainsi être récupérées pour répondre aux besoins de financement des associations. Ce ne serait que justice, dans la mesure où ces sommes proviennent précisément du monde associatif. Toutefois, il faudra veiller à ce que les fonds ainsi récupérés profitent réellement aux associations, en particulier à celles qui en ont le plus besoin. Vous pouvez compter sur notre vigilance à cet égard !

L’expérience de la suppression de la réserve parlementaire, dont les fonds ne sont pas totalement redistribués aux associations et aux collectivités qui en bénéficiaient auparavant, suscite en effet un certain scepticisme quant à la manière dont le Gouvernement pourrait, à terme, répartir le produit des comptes inactifs des associations.

Mme Sophie Primas. C’est vrai !

Mme Céline Brulin. De même, cette nouvelle source potentielle de financement ne doit pas conduire à un désengagement supplémentaire de l’État de la vie associative, après celui qui a été entériné par la dernière loi de finances.

Nous saluons l’intention d’intégrer le champ de la vie associative dans l’enseignement moral et civique, comme le prévoit l’article 2. Il faut cependant être attentif au fait que, au cours des six derniers mois, les programmes d’enseignement moral et civique ont déjà été enrichis de nouveaux contenus par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et la loi contre la manipulation de l’information. Or cet enseignement ne bénéficie que d’une demi-heure par semaine : veillons donc à ne pas trop « charger la barque », d’autant qu’il est déjà bien souvent remplacé par des cours d’histoire-géographie.

Nous accueillons favorablement l’ouverture du service civique aux ressortissants algériens. Cette mesure aurait logiquement dû s’appliquer à des jeunes d’autres nationalités, comme nous le proposions, mais notre amendement a malheureusement été jugé irrecevable, pour des raisons qui m’échappent quelque peu...

Ce texte contient donc de bonnes choses ; il ne répond cependant pas aux principaux besoins du monde associatif. Celui-ci ne peut pas fonctionner sans bénévoles. À la crise des vocations engendrée par une idéologie individualiste s’ajoute la précarisation croissante des salariés, en particulier des jeunes. Comment consacrer du temps à une association lorsque l’on est contraint de cumuler emploi et études, lorsque l’on doit multiplier les heures supplémentaires pour atteindre un revenu décent ou lorsque l’on est informé de son emploi du temps la veille pour le lendemain ?

Le secteur associatif ne peut pas non plus fonctionner sans financements. À cet égard, les récentes réformes n’ont fait que renforcer les difficultés des associations. Je pense à la baisse des dotations aux collectivités territoriales ou, bien évidemment, à la suppression de l’ISF, qui, en plus d’avoir privé les politiques publiques de plusieurs milliards d’euros, a eu pour effet de réduire considérablement les dons aux associations. De même, la baisse de pouvoir d’achat subie par la plupart de nos concitoyens ne leur permet plus de consacrer une partie de leur budget aux causes qui leur tiennent à cœur. En un an, les dons, qui représentent un quart des ressources des associations, ont chuté de 20 %.

Que dire, enfin, de la faiblesse des crédits budgétaires affectés au programme « Jeunesse et vie associative » et, surtout, de la suppression des contrats aidés, alors même que le secteur associatif est souvent contraint de pallier les conséquences des politiques libérales aggravant les inégalités et fragilisant les services publics ?

M. Jean-François Husson. Ça manquait !

Mme Céline Brulin. Des missions élargies à des domaines de plus en plus nombreux, du social au sportif en passant par la santé ou le périscolaire, et des moyens de plus en plus faibles : tel est le premier paradoxe dont pâtit la vie associative.

Dans ce contexte, bien que cette proposition de loi nous semble pécher par manque d’ambition, notre groupe votera en faveur de son adoption, car elle comporte tout de même quelques avancées favorables au monde associatif et à toutes celles et tous ceux qui s’y engagent au quotidien. Nous ne manquerons jamais une occasion de les soutenir et de les accompagner.

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