Avec cette seconde délibération, vous rendez un mauvais service aux Françaises et à la France

Mes chers collègues, pourquoi théâtraliser ainsi le vote de l’amendement adopté vendredi par le Sénat ? Dans votre mise en scène, la droite de cet hémicycle ne souhaite pas prolonger le délai. Je pense que vous rendez un très mauvais service aux Français, aux Françaises et la France. Vous vous rangez dans le camp des grands conservateurs du vaste mouvement conservateur qui se développe partout en Europe, et encore plus aux États-Unis. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Sido. Allons bon !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Philosophiquement, c’est ce que vous êtes en train de vouloir faire acter.

Vous dites vouloir débattre de l’allongement de deux semaines du délai dans le cadre de la loi de bioéthique. On entendra alors les mêmes raisonnements que celui de notre collègue qui se dit médecin. On les connaît depuis des lustres, depuis la loi Veil : on nous expliquait alors que la vie démarrait dès la conception. On les connaît, ces théories.

La réalité, c’est que les Anglais, les Espagnols, les Islandais ne sont pas moins humanistes, moins soucieux de la vie humaine, moins respectueux de la vie en général que nous, Français. On sait très bien qu’il n’y a scientifiquement rien de radicalement différent, le planning familial l’a montré, dans l’acte, qu’il soit pratiqué à douze ou à quatorze semaines de grossesse.

M. Alain Milon, rapporteur. Ce n’est pas vrai !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. La réalité, c’est que vous voulez faire reculer le droit à l’avortement ! (Vives protestations et huées sur les travées du groupe Les Républicains.)

Ce recul, on le constate dans les faits, car le droit n’existe que dans les faits. C’est vrai dans de nombreux autres domaines. Vous ne remettez pas en cause l’âge de la retraite, mais, dans les faits, on ne pourra pas partir. C’est le droit réel qui compte. Les lois que nous votons doivent s’appliquer à toutes, à tous, partout, dans tous les territoires, quelles que soient les conditions.

Vous accroissez les inégalités, mais, au fond, c’est la philosophie même de ce grand mouvement d’émancipation que vous remettez en cause, avec, comme d’habitude, les mêmes arguments, les mêmes votes qu’à l’époque, et ce au moment même de la panthéonisation de Simone Veil ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Il faut conclure !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Heureusement que la gauche était là à l’époque.

M. le président. Il faut conclure ! (Exclamations redoublées et claquements de pupitres sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Heureusement qu’elle est encore là aujourd’hui !

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