Une attaque des plus graves à l’encontre du sport en France

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’accord trouvé en commission mixte paritaire hier ne modifie que très peu le fond du texte. Celui-ci conserve donc la plupart de ses travers.

Mon groupe, comme la plupart des autres groupes, a déjà eu l’occasion de souligner à quel point la création de l’Agence nationale du sport a été menée de façon cavalière, ignorant notamment le rôle de la représentation nationale.

Alors que l’Agence est en fonction depuis plusieurs mois, les dispositions relatives à sa création ont été intégrées au texte, dont les mesures sont légitimes et auxquelles nous sommes favorables, concernant l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques à Paris. Il s’agit de sécuriser juridiquement l’Agence, alors même qu’elle fait déjà l’objet de nombreuses contestations, y compris sur le plan juridique.

Au travers de la création de cette agence, c’est plus généralement le modèle que vous dessinez pour le sport français dont il est question. Il n’a malheureusement pas été modifié par les discussions parlementaires. Pourtant, il a de quoi inquiéter. Il inquiète d’ailleurs au plus haut point le mouvement sportif, mobilisé d’une manière inédite. Nous sommes très loin, madame la ministre, du plébiscite que vous venez d’évoquer !

C’est bien la fin du modèle français, avec un État porteur d’une politique publique du sport, depuis l’encadrement des pratiques populaires jusqu’au haut niveau, qui est en jeu.

La création de l’Agence nationale du sport, qui remplacera petit à petit un ministère en voie d’effacement, constitue non seulement désormais le cœur de ce texte, mais aussi une attaque des plus graves à l’encontre du sport en France.

Il s’agit en effet d’une délégation pleine et entière des prérogatives du ministère des sports à un partenaire extérieur à l’État, composé pour partie d’acteurs privés.

Vous avez beau répéter publiquement, madame la ministre, que les missions de cette agence visent seulement à compléter les prérogatives de votre ministère, tout le monde comprend bien que l’arrêt mort d’un véritable ministère des sports est signé. Les inspecteurs généraux de la jeunesse et des sports, qui ont réclamé la suspension de l’Agence devant le Conseil d’État – fait inédit –, ne s’y sont pas trompés.

Je me permets de rappeler que la décision du Conseil d’État, qui a refusé de considérer leur recours comme relevant d’une urgence, n’est qu’une décision de forme, le Conseil n’ayant en aucun cas statué sur le fond.

En revanche, le même Conseil d’État a déjà rappelé que la forme de groupement d’intérêt public ne pouvait être que transitoire et qu’elle est incompatible sur le long terme avec la notion de service public.

Le bouleversement catastrophique que vous avez voulu pour le modèle, pourtant efficace et reconnu, du sport français, est donc bien en marche. Commencé depuis plusieurs années, comme en témoignent les baisses de budget constantes de votre ministère, c’est sous votre responsabilité qu’il sera entériné. Triste palmarès !

Le détachement d’office des conseillers techniques sportifs aux fédérations, qui constituait une autre étape importante de cette dynamique, a fort heureusement été écarté du texte de transformation de la fonction publique, ce dont nous nous félicitons.

Nous nous réjouissons également que leur rattachement à l’Agence nationale du sport, lequel se présentait comme un remède qui aurait pu s’avérer pire que le mal, ait été retiré de ce texte final. C’est là une avancée qu’il convient de souligner, tant ces projets inconsidérés mettent le sport français en très grand danger.

Bien sûr, nous resterons extrêmement vigilants s’agissant des conclusions de la mission Cucherat-Resplandy-Bernard sur l’avenir des CTS et des décisions qui pourraient en découler.

Nous continuerons de la même manière à combattre tout désengagement de l’État et toute forme de privatisation du sport français. Nous défendrons au contraire le sport populaire, celui qui fédère le peuple français, celui qui est au cœur de la cohésion de nos territoires, celui pour lequel tant nos concitoyens donnent de leur temps. Il est indissociable du sport de haut niveau, qui bénéficie, lui aussi, de notre modèle sportif, lequel a depuis longtemps fait ses preuves.

Enfin, la complexification de l’organisation du sport français risque de conduire à ce que je qualifierais d’« usine à gaz ». C’est ce que ce texte institue, alors même que les élus locaux – nos collègues le savent très bien ici – réclament à cor et à cri qu’on leur simplifie la vie.

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