La précarisation de notre réseau consulaire est préoccupante

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’an dernier, le Président de la République a annoncé vouloir doubler le nombre d’apprenants du français, alors même que les prédictions démographiques anticipent un milliard de locuteurs d’ici à 2065. L’AEFE a donc intégré 8 800 nouveaux élèves et labellisé 30 nouveaux établissements.

Toutefois, le détachement de nouveaux enseignants et l’augmentation de la subvention de 25 millions d’euros seront difficilement suffisants pour absorber le choc.
De plus, l’AEFE n’est pas le seul outil du réseau diplomatique, réseau qui baisse d’ailleurs de 13 %. Ce constat d’une diminution des crédits s’applique à l’Alliance française, à Atout France, à l’Institut français ou encore à Campus France.
Bref, la plupart des outils censés viser un double objectif de rayonnement culturel et de développement de la francophonie doivent toujours faire plus, avec moins.
Je souhaiterais aborder ici le plan Bienvenue en France.

Même en modifiant les règles de calcul avant l’été, certaines zones d’origine prioritaires, le Maghreb et l’Afrique subsaharienne entre autres, avaient vu le nombre de demandes baisser de 24 % et 14 %.

Monsieur le ministre, quelle sera votre action à ce sujet après la décision historique du Conseil constitutionnel du 11 octobre dernier rappelant le nécessaire respect des exigences de gratuité de l’enseignement public et d’égal accès à l’instruction ?
L’autre levier essentiel de notre diplomatie, c’est bien évidemment le réseau administratif et politique auprès de nos compatriotes à l’étranger et des étrangers souhaitant avoir des liens avec la France.

Certes, l’objectif fixé dans le cadre de CAP 22 d’une réduction de 10 % des effectifs a été ramené à 5,7 %. Mais il faut quand même rappeler que le personnel diplomatique a baissé de 9,4 % depuis quinze ans. Pour 2020, ce sont 81 postes qui sont supprimés sur la mission.

Mes chers collègues, la précarisation de notre réseau consulaire est préoccupante. L’an dernier, plus de 150 demandes de missions de renfort n’ont pu être satisfaites par les services du ministère, faute de personnel.

En parallèle, on estime que le cumul des congés non pris et des heures non rémunérées et non récupérables équivaut à 70 emplois à temps plein. La situation est similaire à celle de l’année dernière.

S’il faut s’interroger, comme l’ont fait nos collègues Rémi Féraud et Vincent Delahaye sur l’augmentation de la charge de l’indemnité de résidence à l’étranger, il convient d’agir, me semble-t-il, avec une extrême prudence.

En effet, certaines villes du globe deviennent si chères que l’indemnité se révèle parfois nettement insuffisante pour vivre dans de bonnes conditions.

D’ailleurs, un bilan devra être fait des conséquences de la réforme du recrutement des agents diplomatiques sur la masse salariale du ministère.

Je ne serai pas étonnée que la priorité donnée aux contrats courts de spécialistes, accompagnée de la prime de fidélisation de 2,8 millions d’euros, coûte beaucoup plus cher que le recrutement de fonctionnaires.

Mon groupe constate une grande différence entre les attentes et les moyens mobilisés, et ce encore plus au regard des priorités fixées par le Gouvernement, que je rappelle : l’action pour la paix et la stabilité, la promotion de l’Union européenne, la défense de la démocratie et des droits humains, et, enfin, la régulation économique et commerciale. Notre pays s’inscrit depuis plusieurs années maintenant dans une politique où, à mon sens, la défense de la démocratie conduit à mettre, plus souvent que nous le souhaiterions, la paix entre parenthèses.

Les choix diplomatiques de notre pays s’appuient de plus en plus souvent sur des considérations d’alliance et/ou économiques, plutôt que sur des analyses de la situation.

Nous avons le sentiment que notre réseau et ses personnels sont – pardonnez-moi ce terme ! – des « VRP » des produits français, notamment, et surtout, en matière de commerce des armes. Vous connaissez notre opposition sur ce sujet. Comment poursuivre un objectif de promotion de la paix tout en étant l’un des plus grands exportateurs d’armes ?

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, malgré toute notre bonne volonté, nous ne pourrons pas voter des crédits dont le montant et l’utilisation méritent, à nos yeux, une autre répartition.

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