Il est urgent de redéfinir cette mission budgétaire

Il est urgent de redéfinir cette mission budgétaire - Projet de loi de finances pour 2020 : aide publique au développement (Pixabay)

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de nos débats de l’an dernier, nous avions tous conclu que nous attendions beaucoup d’une loi de programmation spécifique relative à l’aide publique au développement. Malheureusement, cette loi n’existe toujours pas.

D’où mon interrogation, déjà exprimée par certains orateurs, sur la sincérité du débat budgétaire de cet après-midi : une future loi pourrait redéfinir la trajectoire financière de l’aide publique au développement. J’espère, monsieur le ministre, que vous saurez nous rassurer.

Le seul objectif, martelé par le Président de la République, est d’atteindre, d’ici à la fin du quinquennat, 0,55 % du PIB consacré à l’aide publique au développement. Loin, donc, des 0,7 % sur lesquels la France s’était engagée... Il faut dire que le niveau actuel n’est que de 0,44 % !

Pour cette année, le Gouvernement propose un budget d’un peu plus de 3 milliards d’euros, en augmentation de 210 millions d’euros. Certes, cette hausse est bienvenue, mais comment croire que la trajectoire impulsée depuis 2017 sera amplifiée au point d’atteindre des hausses de 700, puis 900 millions d’euros les deux prochaines années ?
Bien évidemment, certains jeux d’écriture pourraient permettre de gonfler artificiellement le budget. Je pense tout particulièrement au recours accru aux fonds inscrits, mais bloqués. Cela suffira-t-il ? Je ne le pense pas.

Il est urgent de redéfinir cette mission budgétaire. Tout d’abord, en augmentant massivement les crédits inscrits, sans se contenter de promesses. Ensuite, en réformant la taxation affectée à l’aide publique au développement. En effet, si le produit de la taxe sur les transactions financières était intégralement affecté à l’APD, celle-ci augmenterait de 800 millions d’euros.

Une fois les fonds réunis, vers qui les orienter ? Aujourd’hui, l’aide publique au développement française ne bénéficie toujours pas aux pays qui en ont le plus besoin, mais plutôt à ceux qui présentent de sérieuses garanties de solvabilité. Monsieur le ministre, nous avons dans ce domaine un certain désaccord : je ne conçois pas l’APD comme un outil conditionné aux bénéfices à en attendre pour notre pays. Au reste, je m’interroge sur l’efficacité d’une telle pratique.

Il est une autre pratique dont je veux parler, et que je conteste vraiment : le financement de la retenue des migrants en Turquie, dans des conditions indignes. Vous me corrigerez si je me trompe, monsieur le ministre, mais ce financement est considéré comme de l’aide au développement, ce que mon groupe n’estime pas justifié. Il semble qu’il faut redéfinir ce qu’est l’aide au développement...

Plus largement, nous assistons à un essor croissant de l’économie de marché et du libéralisme dans les pays bénéficiaires. Or le ruissellement, si cher à notre Gouvernement, creuse toujours les inégalités chez nous : comment ne produirait-il pas les mêmes effets dans les pays en développement ?

Compte tenu de ces observations, monsieur le ministre, nous voterons contre les crédits de cette mission.

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