Ce projet de décret est un déni de démocratie !

Mme Laurence Cohen interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur le projet de décret pour la mise en œuvre de l’obligation de stock de sécurité prévu à l’article L. 5121-29 du code de la santé publique dans sa version issue de l’article 48 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.

Cet article 48 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 prévoyait une obligation pour les industriels de constituer un stock de quatre mois, correspondant à une couverture des besoins en médicaments, et ce, afin de faire face aux pénuries régulières. Le rapporteur du PLFSS à l’Assemblée nationale affirmait à l’époque : « C’est un article très important (…).
Lutter contre les ruptures de stock de médicaments est un objectif partagé par tout le monde.

Ce n’est pas une question politique, mais une question de bon sens, sachant que les ruptures de stock se multiplient et qu’elles concernent de plus en plus souvent des médicaments d’usage courant (…). Il faut donc prendre des mesures.

Imposer des stocks aux laboratoires pour des médicaments d’intérêt thérapeutique est une bonne façon de procéder. Une concertation de très bonne qualité est menée, notamment dans le cadre du CSIS, le conseil stratégique des industries de santé, et plusieurs mesures ont été prises ces dernières années, mais on se rend bien compte qu’il manque encore des dispositifs permettant de lutter efficacement contre les ruptures de stock. (…).

Le délai de quatre mois est raisonnable, juste, avéré scientifiquement et surtout suffisant pour assurer la continuité de l’accès aux médicaments pour le marché français. »

Or, le projet de décret qui vient d’être transmis à la Commission européenne ne respecte pas le texte adopté par le Parlement, puisqu’il abaisse le niveau du stock à deux mois pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur et à un mois pour tout autre médicament. C’est un déni de démocratie, obtenu par la pression des industriels pharmaceutiques, qui met, par ailleurs, en danger la santé de nos concitoyens, alors que la crise sanitaire a encore davantage mis en lumière la dépendance sanitaire française vis-à-vis d’autres pays.

Le rapport d’information sénatorial d’octobre 2018 sur la pénurie de médicaments et de vaccins a notamment montré que la durée moyenne des pénuries de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur était de quatorze semaines ! Les tensions d’approvisionnement ont été multipliées par vingt entre 2008 et 2018.

Sans obligation de constitution d’un stock de sécurité de quatre mois pour l’ensemble des médicaments à intérêt thérapeutique majeur, les pénuries se poursuivront, et ce, au détriment des malades, comme le soulignent des associations d’usagers.

Alors que le Gouvernement semble se soucier des causes de ces pénuries comme le montre le rapport Biot remis au Premier ministre en juin 2020, elle lui demande s’il entend revenir sur ce projet de décret qui vide cette mesure de tout son sens, et respecter le dispositif tel que voté par le Parlement en décembre 2019.

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