Avec cette réforme, le CESE va perdre en représentativité

Mes chers collègues, au terme de ce débat sur le CESE, force est de constater que l’Assemblée nationale n’a pas pris en compte les points que le Sénat jugeait essentiels. Aucune recherche de compromis n’a pu se concrétiser.

Oui, nous souhaitons un CESE fort, représentatif des corps intermédiaires, et, pour qu’il en soit ainsi, monsieur le ministre, les effectifs ont de l’importance. Si l’on veut que les différents corps intermédiaires, dans leur diversité géographique et fonctionnelle, puissent s’exprimer et trouver leur place dans cette institution, la réduction du nombre de membres n’est pas une bonne mesure.

Nous avions approuvé la proposition du Sénat de supprimer les postes de personnalités qualifiées, tout en gardant le même nombre de membres des organisations représentatives. Vous avez décidé d’aller au-delà. Pourtant, jamais une assemblée comme le CESE, consultative de surcroît, n’est paralysée par le nombre de ses votants. C’est faux !

Nous allons constater une réduction de la diversité, qui va toucher en particulier les petits groupes. Déjà peu nombreux, ils vont être réduits à l’état de traces. Il y a, par exemple, très peu de représentants du logement social et du logement en général au CESE. Or il ne s’agit pas d’une petite question.

Vous l’aurez compris, nous sommes défavorables à la réduction du nombre des membres de cette institution.

Ensuite, nous sommes hostiles à l’idée d’un CESE guichet unique lorsqu’il est consulté sur un texte législatif. La petite amélioration apportée par l’Assemblée nationale ne suffit pas. En conséquence, toute une série de structures – certaines sont inutiles, mais d’autres sont très représentatives, notamment sur quelques sujets très pointus, très professionnels – vont être contournées et ne seront plus réellement entendues. C’est une vraie difficulté.

Bilan des courses : le rôle des corps intermédiaires dans le processus consultatif et législatif est globalement affaibli, comme on a pu l’observer à travers d’autres décisions concernant le paritarisme. Pour nous, c’est une fragilité démocratique.

En revanche, à la différence de nos collègues de la majorité du Sénat, nous sommes favorables à ce que j’appelle « l’implication » ou « l’intrusion » citoyenne dans le moment démocratique, notamment lorsqu’il est consultatif. Nous n’avons donc aucune hostilité de principe aux conférences citoyennes et au tirage au sort, à partir du moment où le cadre est clair et où l’on dit la vérité aux citoyens.

Évidemment, si l’on commence par affirmer que toutes les propositions seront prises en compte, pour ensuite se dédire, comme le fait aujourd’hui le Président de la République avec la Convention citoyenne pour le climat, au terme d’une curieuse gymnastique…

La clarté s’impose. Aujourd’hui, la conférence citoyenne, c’est « le peuple » tiré au sort face à Dieu le père, c’est-à-dire le Président de la République ! (M. le garde des sceaux s’esclaffe.) Inutile de vous dire que c’est ironique, monsieur le ministre : vous connaissez notre conception de la Ve République, très hostile à ce présidentialisme excessif.

En tout cas, il eût été nécessaire, d’une part, de consacrer l’obligation pour l’exécutif de donner une réponse à la conférence citoyenne, et, d’autre part, d’organiser la transmission et le dialogue entre les membres de celle-ci et le Parlement. Si l’on associe les citoyens, ce n’est pas forcément pour leur donner raison, mais à tout le moins pour leur offrir un droit de réponse construit et argumenté.

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. En conclusion, nous nous abstiendrons sur la motion à cause de ce désaccord sur la conférence citoyenne et sur l’intrusion des citoyens dans la vie démocratique.

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