La cause animale est un sujet que nous ne pourrons plus occulter

La cause animale est un sujet que nous ne pourrons plus occulter - Lutte contre la maltraitance animale : conclusions de la CMP

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, malgré ses imperfections et ses manques, cette proposition de loi constituait une avancée pour la lutte contre la maltraitance animale, car sur ce sujet nous partons de très loin.

C’est pourquoi, malgré quelques désaccords entre notre position et la version issue des travaux du Sénat, nous avions voté pour ce texte en première lecture.

Le compromis qui a été trouvé entre nos deux chambres reste à mi-parcours, mais il permet tout de même quelques avancées.

D’abord, les spectacles avec des animaux sauvages seront finalement interdits dans les delphinariums en 2026, malgré des dérogations, et dans les cirques itinérants en 2028. À ce sujet, je tiens à souligner la proposition de Mme la rapporteure, acceptée en commission mixte paritaire, de trouver d’ici à 2028 une solution pour accueillir ces animaux de cirque au lieu de les euthanasier comme le prévoyait l’Assemblée nationale.

Il en va de même pour la fin de la vente de chats et de chiens en animalerie à partir de janvier 2024. Nous sommes plus partagés sur cette question, car nous avons conscience que cela peut accroître le risque d’augmentation du nombre d’élevages clandestins ; il est impératif de renforcer les contrôles. Cela étant, on sait que les animaux vendus en animaleries sont issus souvent d’élevages d’Europe de l’Est, où ils sont détenus dans des conditions déplorables, sevrés trop tôt, ce qui entraîne des conséquences comportementales, et transportés dans de très mauvaises conditions ; d’ailleurs, beaucoup meurent au cours du trajet.

M. Stéphane Piednoir. Caricature !

M. Fabien Gay. Certes, cette proposition de loi s’est cantonnée aux mesures les plus consensuelles et certains sujets n’ont pas été abordés, mais il est important qu’un texte soit voté pour apporter un début de réponse aux attentes de nos concitoyens.

En effet, il n’est plus acceptable que les animaux soient considérés comme des objets ou de simples marchandises dont on fait la promotion, que l’on offre sans réfléchir aux conséquences et que l’on peut jeter après un achat compulsif ou non raisonné.

Il n’est plus acceptable que des animaux sauvages soient tenus en captivité et exhibés dans un cadre et un environnement qui ne sont pas les leurs.

Dans le même temps, il nous faudra être vigilants afin que certaines pratiques ne perdurent pas du fait des lacunes que ce texte laisse subsister ; encore une fois, la parole du politique en sortirait grandement affaiblie. Je pense en particulier à la dérogation, qui permettra aux delphinariums de conserver leurs animaux et de les présenter au public s’ils participent à un programme de recherche homologué par le ministère de la transition écologique. C’est un débat que nous avons avec Mme la rapporteure.

Au-delà du texte en lui-même, je pense que cet accord en commission mixte paritaire nous oblige. Il nous oblige à une réflexion et à une action plus globale en faveur des animaux. Il nous oblige aussi à débattre de sujets qui crispent et à faire évoluer certaines pratiques.

Je pense à la nécessité de revoir complètement notre modèle d’élevage intensif et notre rapport aux animaux que l’on dit « de rente », avec les agricultrices et les agriculteurs, mais je pense aussi à la protection d’espèces en voie de disparition et à la fin de l’usage irraisonné des pesticides dont l’impact sur la biodiversité est dévastateur. Rappelons que la biodiversité est une condition indispensable de la vie sur Terre.

Comme je l’ai dit en première lecture, je ne suis pas favorable à la politique des petits pas ; pour autant, je pense sincèrement que la cause animale est un sujet que nous ne pourrons plus occulter et qu’il est urgent d’en débattre ici, car il s’agit d’une question éminemment politique.

Ne nous y trompons pas, la société capitaliste, qui se traduit par l’exploitation de l’homme et de l’environnement, porte aussi préjudice aux animaux. La recherche effrénée du profit se fait au détriment de la vie humaine, de l’environnement et de la vie animale. (M. Stéphane Piednoir le conteste.) D’ailleurs, peu nombreux sont ceux qui tirent bénéfice de cette course au profit. Un tel constat devrait nous inciter à mettre en œuvre d’autres politiques. Ce système, avec son mode de production, a exacerbé l’exploitation des animaux et a fait d’eux une marchandise comme une autre.

Il faut bien réaliser qu’aucune compensation ne pourra remédier à la disparition d’espèces sur terre et aux dégâts irréversibles qu’elle provoque sur notre écosystème. (M. Stéphane Piednoir s’exclame.)

Nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à attendre que nous nous saisissions véritablement de la question de la maltraitance animale. Il nous faut maintenant aller plus loin. (M. Stéphane Piednoir s’agace.)

Cher collègue qui avancez des arguments que j’aimerais entendre à cette tribune…

M. Stéphane Piednoir. Absolument !

M. Fabien Gay. … plutôt qu’en échos lancinants derrière un masque, vos réflexions ne me feront jamais taire. Je n’ai jamais reculé sur un terrain de rugby, ce n’est pas ici que je le ferai sous la pression de vos interpellations ! (

Nous voterons cette proposition de loi, en espérant qu’elle ne sera qu’une première étape à la fois dans la lutte contre la maltraitance animale et dans une réflexion sur notre rapport aux autres espèces.

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