Une politique pour les riches, grands gagnants de ce quinquennat

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voilà réunis pour l’examen en nouvelle lecture de ce projet de loi de finances rectificative, au lendemain d’un simulacre de débat sur le projet de loi de finances initiale.

Convenons-en, ces textes budgétaires, dont nous achevons l’examen aujourd’hui, ont fait l’objet de calculs électoraux et de manœuvres politiques qui ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Nous sommes pourtant très attendus : il est en effet urgent d’améliorer les conditions de vie de millions de Françaises et de Français.

D’après le dernier rapport du Secours catholique, 7 millions de personnes, soit 10 % de la population française, ont eu recours à l’aide alimentaire en 2020. Leur nombre avait déjà doublé au cours de la décennie !
Parmi elles se trouvent une grande majorité de mères célibataires, mais également des étudiants et des autoentrepreneurs, contraints de choisir entre se chauffer, se nourrir ou se soigner.

Les mobilisations en Guadeloupe et à la Martinique – je parle bien des mobilisations et non des comportements qui, à mes yeux, ne sont pas des actions revendicatives – sont symptomatiques de la détresse sociale, à laquelle ce Gouvernement n’a su apporter que des réponses peu ambitieuses, des miettes éparpillées ici et là, au lieu d’envisager une meilleure répartition des richesses.

L’indemnité inflation en est l’illustration. Qu’elle soit d’un montant plus élevé, mais destinée à un nombre moins important de bénéficiaires, comme le proposent Les Républicains, ou qu’elle soit d’un montant plus faible, mais ciblée sur un public un peu plus large, comme le prévoit le Gouvernement dans son texte initial, rétabli en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, le problème reste le même. Dans les deux cas, ces chèques distribués à des fins électoralistes sont des aides ponctuelles, qui ne permettront pas de protéger une population en proie à une pauvreté endémique et à des inégalités structurelles.

Il ne s’agit là que de rustines, le temps d’acheter à bas coût, pardonnez-moi de le dire, mes chers collègues, une forme de « paix sociale » – pas sûr d’ailleurs que cela réussisse ! –, voire de silence en vue des prochaines élections.
Qu’elle prenne la forme d’un chèque ou d’une indemnité, cette aide ponctuelle représente, pour les uns, 150 euros, soit 12,50 euros par mois et, pour les autres, 100 euros, soit 8,33 euros par mois…

Par ailleurs, vous laissez sur le bas-côté un certain nombre de personnes qui ont pourtant cruellement besoin d’aide. C’est la constante de ce quinquennat, fait de chèques, d’indemnités, de primes et de pourboires pour les pauvres, quand les plus aisés bénéficient de baisses d’impôt pérennes.

L’Institut des politiques publiques (IPP) a récemment noté que la politique du Gouvernement avait été menée au détriment des 5 % des Français les plus précaires.
En cette vague épidémique, l’activité économique pourrait reculer, ce qui entraînerait de graves conséquences sociales sur l’emploi.

Un tel contexte implique la promotion de politiques sociales ambitieuses et – il n’en a nullement été question lors de nos débats – une hausse des revenus : hausse du SMIC, dégel du point d’indice des fonctionnaires, revalorisation des minima sociaux, en particulier pour les jeunes, aujourd’hui exclus du bénéfice du revenu de solidarité active (RSA) et particulièrement précaires.

Malgré l’apparente opposition mise en scène par les majorités sénatoriale et gouvernementale, on peut parler d’un accord idéologique profond, sur le fond, entre les uns et les autres.

En effet, il y a encore et toujours deux poids, deux mesures : vous octroyez, sans aucune conditionnalité, des aides aux grandes entreprises, aveuglés que vous êtes par le mythe du ruissellement – qui ne cesse pourtant de s’évaporer par le haut –, tout en mettant à sec les ménages les plus modestes, lesquels sont constamment suspectés de tricher et subissent des contrôles de plus en plus fréquents et déshumanisants.

Cette politique pour les riches, grands gagnants de ce quinquennat, est à l’opposé de celle que nous défendons. En d’autres termes, la dignité des uns s’arrête là où commencent les dividendes des autres…

Tant sur le fond que sur la forme, ce texte et les débats budgétaires qui l’ont entouré sont loin d’être à la hauteur. Nous sommes une fois encore pris dans un étau, celui d’une accélération du calendrier liée au régime présidentialiste, coincés entre majorité sénatoriale et majorité gouvernementale.

Comprenez-le, pour nous, choisir entre droite sénatoriale et droite gouvernementale reviendrait, en tout état de cause, à faire un choix de droite ; nous nous priverions d’emblée de toute alternative de gauche, dont nos amendements étaient le reflet.

C’est dans un esprit de responsabilité, et par sincérité politique, que nous refusons de jouer au jeu de dupes que vous nous imposez, et que nous voterons contre ce texte.

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