Il faut limiter l’étalement urbain, mais pas au prix d’une quasi-interdiction de construction

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi de nos collègues du groupe Union Centriste, qui vise à favoriser l’habitat en zone rurale tout en protégeant l’activité agricole et l’environnement. Nous partageons clairement ses considérants et son objectif : permettre aux communes de revitaliser leur territoire.

Il est vrai que le code de l’urbanisme a évolué ces dernières années afin de réduire l’artificialisation des sols et de limiter l’étalement urbain.

Pourtant, cet objectif, juste et légitime, a malheureusement conduit à une quasi-interdiction des constructions en zone rurale.

En effet, le code de l’urbanisme impose aux collectivités de fixer des objectifs en fonction de l’évolution démographique d’un territoire au cours des années précédentes. Il en résulte que les petites communes rurales, dont la population évolue peu, ne peuvent plus délivrer de permis de construire.

C’est une forme de double peine puisqu’à la déprise démographique s’ajoute l’impossibilité d’accueillir de nouveaux habitants. Cette situation est inacceptable alors que la crise sanitaire a suscité un réel engouement pour la ruralité.

Cette proposition de loi est donc intéressante, d’autant que son passage en commission en a pleinement amélioré le dispositif initial.

Ainsi, elle ne vise plus uniquement les zones de revitalisation rurale, dont l’avenir reste incertain. Elle vise désormais l’ensemble des petites communes, plus particulièrement celles qui ne disposent pas de plan local d’urbanisme et qui sont donc soumises au règlement national d’urbanisme (RNU).

La proposition de loi permet la construction en continuité urbaine des bourgs et hameaux, ainsi qu’un changement de destination de certains bâtiments, notamment au sein des exploitations agricoles. Ces facultés ont été recentrées sur la seule nécessité de produire des logements ou des hébergements, et ce uniquement dans la continuité de l’espace déjà urbanisé à la date de la présente proposition de loi. Cet équilibre nous semble pertinent pour éviter un mitage trop important des terres agricoles. Il nous paraît surtout particulièrement opportun de solliciter l’avis de la CDPENAF.

Par ailleurs, la proposition de loi vise désormais non plus le dispositif Pinel, mais le dispositif Denormandie dans l’ancien, plus adapté aux zones rurales pour favoriser la rénovation de bâtiments dégradés et souvent vacants. On déplore, en effet, en zone rurale 10 % de logements vacants. Ce taux, il importe de le souligner, s’élève même à 24 % dans certains endroits.

Au-delà de ces évolutions du code de l’urbanisme, il faut reconnaître que le gel des terres est également la conséquence d’une perte majeure d’ingénierie au sein des collectivités en zone rurale.

La suppression de l’assistance technique de l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire (Atesat) et la redéfinition de l’application du régime des autorisations du droit des sols (ADS) ont conduit à de grandes disparités territoriales.

Les documents d’urbanisme sont pourtant d’une importance majeure comme support des projets des collectivités. L’État devrait mieux accompagner ces dernières, y compris pour basculer en PLU, car cela offre des possibilités plus importantes en matière d’urbanisation.

Par ailleurs, les situations de blocage peuvent également être liées à la création d’intercommunalités forcées, les plus petites communes se trouvant dans un rapport de force ne leur permettant pas de partager leurs projets urbains et une vision dynamique de leur territoire.

Les différentes lois qui se sont succédé, telles que la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi Notre », et la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi Maptam », ont contribué à obérer la réelle maîtrise de leur sol autant que le libre choix intercommunal.

Une autre question, pourtant très liée à cette évolution du code de l’urbanisme, n’est pas soulevée, à savoir celle des moyens financiers nécessaires pour permettre aux collectivités d’éviter la déprise de leur territoire. Rien ne sert en effet de favoriser la construction si l’on ne permet pas le retour des services publics nationaux et locaux et si les équipements indispensables à l’attractivité de nos territoires ruraux ne suivent pas.

Cette proposition de loi vise également à faciliter l’exercice des activités agricoles. Il s’agit notamment de reconnaître le droit pour chaque agriculteur de vivre sur son exploitation. C’est une idée que nous partageons.

Aujourd’hui, de plus en plus de bâtiments agricoles sont en ruine sur nos territoires. C’est, de mon point de vue, une bonne chose que de permettre leur réhabilitation en favorisant les transmissions d’exploitations.

Tels sont les quelques éléments que je tenais à préciser avant d’indiquer que nous voterons cette proposition de loi.

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