Protéger l’Arménie, sanctionner l’Azerbaïdjan

Ne vendons pas notre honneur contre un plat de lentilles en achetant le gaz et le pétrole azéris en échange de notre silence sur l’asservissement du peuple arménien.

Lorsque le Sultan voit que pendant trois années, il a pu, grâce au sommeil complaisant de l’Europe, conduire impuni des massacres qui n’ont peut-être pas de précédent dans les derniers siècles de l’histoire humaine ; lorsqu’il voit l’Europe se levant dans le premier sursaut de ce réveil tardif, au lieu de se tourner vers les victimes du Sultan pour guérir leurs blessures, au lieu de se tourner vers les populations opprimées pour les aider à conquérir leur indépendance, se faire d’abord, pour première démarche, pour première politique, la servante de ses intérêts à lui, il se dit qu’il tient l’Europe dans ses mains, qu’il peut à son gré se jouer d’elle. » Ainsi parlait Jean Jaurès à la tribune de la Chambre, le 15 mars 1897.

L’Azerbaïdjan a envahi l’Artsakh et a fait disparaître un État en trois jours ; les Arméniens sont partis, laissant derrière eux les infirmes et les morts ; l’Azerbaïdjan a dessiné les frontières, procédant au nettoyage ethnique d’un territoire presque exclusivement peuplé depuis la plus haute Antiquité par des Arméniens.

Staline a fragmenté la région en rattachant Haut-Karabagh et Nakhitchevan à l’Azerbaïdjan. Mais la loi soviétique du 3 avril 1990 avait donné aux entités autonomes la possibilité de faire sécession. Les frontières de la République d’Artsakh née en décembre 1991 sont donc des frontières internationales. En acceptant leur violation, nous avons consenti à la primauté de la force sur le droit et fragilisé de facto l’intégrité territoriale de la République d’Arménie : fort de son impunité, l’Azerbaïdjan exerce maintenant une forme de souveraineté sur le Bas-Karabakh et donc sur la province arménienne du Syunik pour progressivement établir une continuité territoriale avec le Nakhitchevan et la Turquie. Bientôt, ces régions seront annexées.

Il faut sanctionner l’Azerbaïdjan pour protéger l’Arménie. Il faut tout faire pour que l’Union européenne oblige l’Azerbaïdjan à respecter les frontières. Il est inacceptable qu’Israël, l’Italie, la Tchéquie, la Bulgarie, l’Espagne, la Slovaquie ou même l’Ukraine fournissent des armes à l’Azerbaïdjan, qui les retourne contre l’Arménie. Ne vendons pas notre honneur pour un plat de lentilles - le gaz azéri.

Le Parlement européen, dans une résolution du 5 octobre 2023, a demandé la suspension du protocole d’accord dans le domaine de l’énergie. La France doit rendre cette suspension effective et saisir les biens des dirigeants azéris.

Le buste d’Auguste Scheurer-Kestner qui fut, pendant vingt-cinq ans, le représentant au Sénat d’une Alsace annexée par l’Empire allemand, doit être pour tous les Artsakhiotes exilés, un symbole d’espoir : tous les exils peuvent être provisoires. Nous restons à vos côtés, pour refuser l’asservissement.

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