Cour Pénale Internationale : entendre la société civile

Lettre au Premier Ministre

Le 9 juin 2000, la France ratifiait le Statut de Rome du 17 juillet 1998, qui créait la Cour pénale internationale. En février 2002, le Parlement français votait une loi de « Coopération avec la CPI », ce qui permettait d’intégrer dans notre droit interne la partie procédurale du statut.

Alors que la CPI a commencé à fonctionner, notre Parlement n’a toujours pas été saisi de la deuxième partie de la loi d’adaptation, qui doit permettre à nos tribunaux d’avoir compétence pour juger les crimes tels que les définit le Statut de la CPI.

Avec Mesdames Eliane ASSASSI et Josiane MATHON, Commissaires aux Lois, membres de mon groupe, j’ai reçu des représentants de la Coalition française pour la Cour pénale internationale, qui nous ont fait part de leurs préoccupations tant sur l’urgence de l’adoption de la loi d’adaptation que sur son élaboration et son contenu.

Comme vous le savez, cette Coalition regroupe 42 organisations non gouvernementales, associations et corps professionnels représentatifs des sensibilités de la société civile aux divers aspects de la justice pénale internationale. Elle s’est constituée dès 1997 pour agir en faveur de l’engagement de la France pour la création d’une juridiction permanente ayant à connaître des crimes les plus graves, comme le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.

Malgré ses demandes, la Coalition française pour la Cour pénale internationale n’a jamais obtenu que soit mise en œuvre une quelconque concertation dans l’élaboration du premier avant-projet de 2003. Je pense pourtant que l’apport de ses membres aurait pu permettre d’éviter les critiques importantes que ce texte a suscitées, notamment de la part de la CNCDH dans son avis du 15 mai 2003.

Selon des informations qui me sont parvenues, une concertation simplement interministérielle aurait lieu sur un deuxième avant-projet. Il serait pour le moins regrettable qu’à nouveau, les rédacteurs de ce texte ne s’appuient pas sur les réflexions et propositions de la Coalition, comme sur l’avis de la CNCDH, et que les parlementaires aient à connaître d’un texte au final insatisfaisant.

Il faut, très rapidement, que les ministères intéressés entendent les membres de la société civile. Il est en effet désormais urgent que le deuxième volet de la loi d’adaptation soit mis à l’ordre du jour du calendrier parlementaire.

J’ajoute que notre groupe s’était opposé, dès l’origine, à l’intégration dans le Statut de Rome, à l’initiative de la France, de l’article 124. Notre pays s’en prévalant, cet article lui accorde une immunité absolue pour les crimes de guerre, jusqu’en 2009.

En levant cette réserve, en travaillant avec tous ceux concernés sur un deuxième volet de la loi d’adaptation mettant en oeuvre concrètement les objectifs qui ont présidé à la création de la CPI, notre pays donnerait l’exemple du refus de l’impunité pour les crimes les plus graves. Il a, à mon avis, un rôle important à jouer en ce sens.

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