Travail, emploi et pouvoir d’achat : motion tendant à opposer la question préalable (explication de vote)

Travail, emploi et pouvoir d'achat : motion tendant à opposer la question préalable (explication de vote) (Josh Hild - https://www.pexels.com/fr-fr/@josh-hild-1270765)

Le choc fiscal que vous nous proposez serait destiné à rétablir la confiance pour relancer la croissance mais le doute est largement répandu sur la pertinence du dispositif.

Dans La Tribune, Patrick Artus écrit : « La défiscalisation des heures supplémentaires fait apparaître à la fois des effets d’aubaine et d’éviction. Des heures supplémentaires qui auraient été de toute manière effectuées vont être défiscalisées, ce qui est bien un effet d’aubaine. La substitution d’heures supplémentaires aux nouvelles embauches est bien un effet d’éviction. Dans le cas de la déductibilité des intérêts d’emprunt, il apparaît potentiellement un important effet d’aubaine pour tous les achats immobiliers qui auraient été réalisés sans cette mesure.

Quant à Thomas Piketty...

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Que voilà un illustre économiste ! Le conseiller de Mme Royal ...

M. Bernard Vera. - ... il indique : « Le paquet fiscal coûte extrêmement cher, probablement 15 à 20 milliards, et ne se justifie pas du point de vue économique. On va dépenser 6 milliards, en pur effet d’aubaine sur les heures supplémentaires, tout en créant une énorme niche fiscale. Notre système fiscal, déjà injuste et opaque, n’en avait pas besoin. »

Jacques Le Cacheux précise que « ne pas taxer le patrimoine nuit à la mobilité sociale » et souligne le « caractère néfaste pour le dynamisme de l’économie de l’inertie des situations acquises et d’une économie de rentiers. »

Le gouvernement, au lieu de créer les conditions d’une croissance économique saine et durable, préfère répondre dans l’immédiat aux attentes d’une frange extrêmement limitée de la population, la plus fortunée. Ce paquet fiscal est à mille lieues d’une réforme qui ferait de la fiscalité un outil de la croissance.

Les allégements fiscaux ont un coût immédiat, celui de la réduction drastique de la dépense publique. Le rapport est sans équivoque là-dessus : les moins-values de recettes doivent être compensées par des réductions de dépenses à due concurrence !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - C’est leur grande vertu !

M. Robert Bret. - Pour qui ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Pour réduire la dépense publique.

M. Bernard Vera. - Imaginez que l’effet d’éviction joue à plein et que les entreprises décident d’utiliser le plafond existant en matière d’heures supplémentaires. Ce ne serait pas 6 milliards d’euros de moins-values fiscales et sociales que nous aurions mais 12, 15, voire 20. Où trouver l’argent ? Allez expliquer que, pour réduire l’impôt sur la fortune de quelques milliers de privilégiés et restaurer la rentabilité financière des entreprises, il faudra réduire les crédits pour rénover les cités HLM...

M. Josselin de Rohan. - Ça commence !

M. Bernard Vera. - ... fermer les écoles,

M. Henri de Raincourt. - Ça continue !

M. Bernard Vera. - ...dissoudre les juridictions d’instance dans un certain nombre de sous-préfectures, réduire les crédits destinés au financement des transports ferroviaires...

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Pleurons ensemble !

M. Bernard Vera. - ... remettre en cause les aides directes à l’agriculture. Votez ce texte, mais ne venez pas ensuite vous plaindre amèrement de la réduction de la dépense publique au détriment de ceux qui n’auront pas fait jouer le bouclier fiscal ou la défiscalisation des heures supplémentaires parce que leur salaire est trop faible pour qu’ils soient concernés par ces dispositifs.

Demandez-vous seulement combien coûtera à la collectivité nationale de laisser 40 000 jeunes sans emploi.

M. Josselin de Rohan. - Ce n’est plus une explication de vote, c’est un discours !

M. Michel Charasse. - Une explication de vote à 15 milliards !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - Treize !

M. Bernard Vera. - Hier, le président Arthuis « exprimait un doute sérieux » sur le « choc de confiance et de croissance » que le gouvernement attend de ce projet de loi ; dans un quotidien économique, il se dit « réservé » sur la déductibilité des intérêts d’emprunt, sur la défiscalisation massive des mutations, sur l’extension et le renforcement du bouclier fiscal.

Il vous reste donc à voter cette question préalable !

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