La vente des locaux de l’Imprimerie nationale devient une affaire d’Etat

La vente des locaux de l'Imprimerie nationale devient une affaire d'Etat (Département les Yvelines - https://www.flickr.com/photos/yvelines/)

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers Collègues,

Le scandale des locaux de l’Imprimerie nationale est maintenant public.

Les 30 000 m² vacants à la suite du démantèlement de l’Imprimerie nationale ont fait l’objet d’une promesse de vente de 85 millions d’euros, au bénéfice du fonds d’investissement Carlyle, en 2003. Les paiements par le groupe américain sont intervenus le 31 janvier 2006 semble-t-il, lors de la signature de l’acte authentique, soit 31 mois plus tard. Aucun acompte n’avait été versé, aucun paiement partiel effectué, aucun intérêt payé entre la promesse de vente et la signature de l’acte authentique. S’ajoute à la somme perçue en 2006 une clause de complément de prix peu avantageuse pour l’Imprimerie nationale.

Cette dernière s’élèverait selon le récent rapport de l’IGF à 18 millions d’euros perçus le 10 juillet 2007 et auxquels il faut soustraire les 1,78 millions d’euros de divers travaux de dépollution et les 5,3 millions d’euros d’intérêts intercalaires supportés par l’Imprimerie nationale, au titre d’un prêt relais de 50 millions d’euros. Le ministère des Affaires Étrangères a racheté le 18 juin 2007 ces locaux pour une somme de 376,7 millions d’euros, prix TTC et travaux compris. De plus le fonds d’investissement Carlyle, profitant d’une faille fiscale, échappe à la taxation de la plus value effectuée lors de cette vente, ce qui aurait rapporté environ 30 millions d’euros à l’Etat.

L’Etat a donc payé une plus value d’au moins 135 millions d’euros. Les gestionnaires de cette affaire, Monsieur Vialla, ancien directeur, Carlyle, la MAE, les domaines, auditionnés par la commission des finances du Sénat n’ont rien trouvé à redire au rapport de l’IGF et n’ont rien ajouté.

Pour le moins, en rachetant un bien 376 millions d’euros vendu auparavant 85 millions, avec une promesse de vente incroyablement favorable à Carlyle et une non taxation de la plus value, l’Etat a dilapidé les fonds publics et alimenté la spéculation.
A l’évidence, ces sommes auraient sans doute été plus utile à soutenir, par exemple, l’activité industrielle de l’Imprimerie Nationale et ses emplois ainsi qu’à sauvegarder son patrimoine culturel, activité et patrimoine que je soutiens, vous le savez, depuis fort longtemps auprès des gouvernements successifs.

Le problème c’est que le rapport de l’IGF laisse des zones d’ombre tout à fait regrettables. En effet, il existe différentes estimations du coût des travaux qui vont de 65 à 120, voire 170 millions d’euros. Il est également à noter que le MAE devra encore débourser entre 500 et 1000 euros par m² pour finir d’adapter les locaux à ses besoins.
J’ai demandé une commission d’enquête parlementaire, et je le réitère. Il est du devoir du parlement de mener de véritables investigations sur une si lamentable gestion du patrimoine public. C’est-à-dire l’argent des contribuables.
Au gouvernement, par votre entremise, je demande de faire la clarté sur ce dossier et de reconnaître les responsabilités de l’Etat et de ses représentants.

Le rapport de l’IGF relève par ailleurs que le MAEE qui a exposé son schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) au Conseil immobilier de l’Etat (CIE) le 12 décembre 2006 n’a pas, je cite, « indiqué à cet organisme de façon claire que l’acquisition de l’immeuble Gutenberg était très avancé. » Pourquoi ?

Toujours selon ce rapport le Président du CIE a été amené à écrire le 23 mars 2007, date à laquelle les opérations de vente des terrains Gutemberg à Carlyle par l’Etat n’était pas terminée, au Premier Ministre pour exprimer, je cite « ses préoccupations à propos de ce projet, l’estimant peu compatible avec l’objectif de rationalisation des implantations administratives parisiennes et attirant son attention sur le montant de la plus value qui en résulterait pour le groupe Carlyle. »

Plus grave encore : le rapport indique, je cite encore, que « non seulement cette lettre ne reçut pas de réponse, mais que tout fût fait, pour qu’elle n’en reçut point avant que l’opération devînt irréversible », n’est-ce pas une sorte de délit d’initié ? La mise en place d’une commission d’enquête parlementaire s’impose plus que jamais. Les sanctions devront être prises envers ceux qui sont responsables d’une telle situation.

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