UNE REFORME POUR LES PORTS AUTONOMES ?

UNE REFORME POUR LES PORTS AUTONOMES ? (Pixabay)

Suite à l’annonce du mouvement de grève des Dockers et Agents de tous les PAM de France,
Point de vue de Robert BRET

Si l’on veut que le Port de Marseille-Fos retrouve sa place aux premiers rangs des grands ports internationaux, ne nous trompons pas de diagnostic ! Notre PAM présente des faiblesses certes, mais des atouts aussi ! Feindre d’ignorer les uns à la faveur des autres, serait, à l’heure de la réforme, vecteur d’un échec assuré.
En effet, il serait illusoire et sources d’erreurs de penser, ainsi que veut nous le faire croire le projet de réforme portuaire, que la compétitivité de notre port dépendrait d’une réforme dont les seules visées sont 1) l’ouverture au privé de la gestion de l’outillage, 2) une nouvelle gouvernance donnant plus de place aux collectivités territoriales et 3) un recentrage pour les ports sur leurs missions régaliennes.

De fait, sont pointés régulièrement l’absence d’unité de commandement sur les terminaux, la faible productivité et le manque de fiabilité, imputés aux seuls salariés et à leurs organisations syndicales. D’où la légitime inquiétude, que je ne peux que partager, des Dockers et Agents des Ports Autonomes sur qui l’on fait reposer tous les maux du PAM et à qui je souhaite témoigner de mon soutien.
En conséquent, il convient, dans un premier temps, de tirer tous les enseignements de la réforme du statut des dockers de 1992 et de la mise en place des conventions d’exploitation de terminal visant à intégrer l’ensemble des activités de manutention.

Dans le même temps, les atouts du PAM ne sont que rarement, pour ne pas dire jamais, évoqués alors que l’activité marchande du port de Marseille Fos a refranchit le seuil des 100 millions de tonnes en 2006 avec une progression de 3% sur Marseille en 2007.
Force est de reconnaître que progression il y a et qu’elle ne repose plus seulement sur le pétrole mais aussi sur le trafic de marchandises diverses, auquel s’ajoute le trafic passagers.
Et que cette progression est possible parce que le PAM est un port polyvalent unique en méditerranée, concentrant toutes les formes d’activités, doté d’un niveau d’outillage élevé, d’une réparation navale réputée, de services et de qualifications qui sont autant d’atouts dans une position géographique exceptionnelle.

Enfin, et alors que certains avancent l’idée que ce serait le caractère public du port autonome qui poserait problème, comment ne pas souligner le rôle joué par cet Etablissement public dans la complémentarité de nos deux bassins permettant d’accueillir tous les trafics ?
C’est justement cette maîtrise publique qui permet la polyvalence des formes d’activité et évite toute concurrence destructrice. Une maîtrise publique qu’il nous faut préserver, d’autant qu’elle n’a nullement empêché l’investissement du privé.

Pour finir, le doublement du terminal de Fos, dont la mise en service est prévue pour 2009, devrait permettre de traiter 1 million de conteneurs supplémentaires et consécutivement laisse espérer la création de 7000 emplois dans les 5 ans en plus des 9000 emplois directs et des 31 000 emplois indirects actuels.

Autant d’atouts, de résultats, qu’on ne peut ignorer et qui nous permettent aujourd’hui d’avoir l’ambition de retrouver les 1ères places au niveau international.
Dans le même temps, pour tendre vers cette ambition n’omettons pas de regarder les causes réelles de notre retard.

En premier lieu, je pense au désengagement financier, au fil des années, de l’Etat, laissant le PAM puiser dans ses capacités d’autofinancement.
Ainsi, de 2000 à 2006, pour les 6 ports, la contribution nette de l’Etat aura été de 140M€ soit l’équivalent de 13% de l’effort d’investissement à défaut des 60% attendus eu égard son engagement.

De la même manière, comment ne pas voir que notre port est fragilisé par la faiblesse de son hinterland ?
Alors que la croissance du trafic conteneur demande un développement ferroviaire et fluvial, les projets de tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre vers le Nord de l’Italie et d’aménagement du Rhône ne sont jamais prioritaires. Tandis que plusieurs tunnels relieront l’Italie aux ports du nord, via la Suisse.
Ou encore l’échec du projet d’autoroute des Mers de Fos vers l’Italie pour désengorger le trafic routier, alors que Toulon a ouvert une telle ligne en direction du port de Rome.
Il est regrettable que les politiques ne soient pas capables de se mobiliser pour réaliser ces grandes infrastructures et que l’Etat n’en fasse pas ses priorités.

Non, la réforme ne peut se réduire, comme le propose le maire de Marseille, à une meilleure redistribution de la Taxe Professionnelle au profit de la Communauté Urbaine Marseille Provence Métropole, ou encore à un nouveau transfert du foncier du domaine maritime pour favoriser des opérations d’urbanisme !
Non, réformer les Ports Autonomes de France ne saurait se traduire par un simple transfert des outillages et personnels vers le privé !

Puisque réforme il y a, il faut maintenant que le Gouvernement annonce clairement ses intentions pour développer et accompagner la croissance des ports, du notre en particulier.
Et, pour être en mesure de dessiner un projet partagé d’une grande ambition il convient, bien entendu, d’y associer l’ensemble des acteurs politico-socio-économiques du port, organisations syndicales y compris, et ce en amont du débat parlementaire, dans le but de promouvoir Marseille/Fos au rang de grand port international.

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