Développement économique de l’Outre-mer (2)

Madame la présidente, madame le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le Gouvernement a déclaré l’urgence, le 16 février 2009, sur un texte déposé le 28 juillet 2008... Or, si urgence il y avait, c’était bien du côté de l’outre-mer !

Les luttes engagées par nos concitoyens en Guadeloupe, en Martinique et, aujourd’hui, à la Réunion sont exemplaires : il faut changer de modèle de développement économique et social en outre-mer. À cet égard, ce projet de loi est encore une occasion manquée !

L’accord signé après six semaines de grève générale en Guadeloupe montre, par l’exhaustivité des sujets engagés, qu’il s’agit bien d’une urgence vitale et sociale. En contrepoint, le texte proposé à notre assemblée est en décalage complet avec les attentes et les espoirs immenses soulevés par les mouvements sociaux des dernières semaines.

Malgré l’ajout, tardif, de mesures en faveur du pouvoir d’achat, le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer porte bien mal son titre. À l’instar des lois Pons, Girardin, Perben et Baroin, il fait encore la part belle aux exonérations de charges et autres exemptions fiscales, qui ont eu pour seul point commun, depuis des décennies, d’accroître les inégalités de revenus et de ressources entre ces territoires et la métropole.

Monsieur le secrétaire d’État, il faut cesser d’argumenter, comme vous le faisiez encore devant la commission des finances la semaine dernière, sur les efforts financiers de l’État, car le développement économique des départements d’outre-mer ne doit plus celui de mesures de pure opportunité fiscales ou financières réservées à quelques groupes, voire à quelques individus.

Il est temps de passer d’une économie de rente à l’action pour un développement économique endogène, respectant les ressources et les potentialités ainsi que la situation géographique propres à chaque département et collectivité ultra-marine.

L’énumération des mesures fiscales comprises dans ce projet de loi est impressionnante, d’autant qu’aucune approche critique ni évaluation rigoureuse n’a été menée sur leurs supposés bienfaits depuis vingt ans. Or, ceux-ci paraissent bien minces aux yeux de l’immense majorité de nos compatriotes d’outre-mer, dont le souci premier est la vie chère.

Le remède à la vie chère ne réside en aucun cas dans les zones franches, dans les véhicules de défiscalisation ou dans les dispositions transitoires en matière de revenus de transfert. Il faut donner véritablement du pouvoir d’achat par des hausses de salaire, une réduction de la TVA et la mise en place d’une politique du crédit et du microcrédit qui soit immédiatement favorable à ceux, toujours plus nombreux, en particulier parmi la jeunesse et les travailleurs, qui doivent faire face aux difficultés du quotidien.

Les conditions du développement des économies locales, dans leur diversité, ne sont pas réunies : les territoires d’outre-mer veulent s’affranchir de leur dépendance vis-à-vis de la métropole et de l’Europe, si lointaine, pour promouvoir des liens propres avec les pays voisins, des accords régionaux de partenariat.

Le modèle de domination coloniale a montré ses limites en termes socio-économiques. Des sources de richesse locales doivent être promues en rendant le foncier à sa vocation agricole et nourricière première, plutôt que de le dédier à la spéculation immobilière ; en développant les énergies renouvelables comme sources d’indépendance énergétique des territoires ; en mettant l’accent sur la formation primaire et professionnelle des Domiens ; en développant la commande publique et en assurant aux collectivités locales des moyens pérennes pour conduire leur avenir et renforcer la cohésion sociale.

Rien de tout cela n’est rendu possible par les mesures contenues dans le projet de loi que nous examinons aujourd’hui !

Les États généraux de l’outre-mer annoncés au printemps et la mission commune d’information parlementaire confiée à certains de nos collègues apporteront-ils des réponses aux graves questions posées par nos concitoyens ?

Quoi qu’il en soit, et en l’état du texte qui nous est proposé, le groupe CRC-SPG ne votera pas le présent projet de loi.

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