Le gouvernement bafoue le principe de séparation des pouvoirs

Le gouvernement bafoue le principe de séparation des pouvoirs - Les magistrats aux ordres de l'exécutif (Aloïs Moubax - https://www.pexels.com/fr-fr/@aloismoubax)

Ma question porte sur les rapports entre l’exécutif et la justice. Marc Robert, procureur de Riom, a été muté d’office à la Cour de cassation. Alors que le Conseil supérieur de la magistrature avait donné un avis défavorable, le 23 juin, un décret du Président de la République procédait à sa nomination « vu l’avis du Conseil supérieur de la magistrature du 4 juin 2009 » ! Or, le 4 juin, madame Dati, alors garde des sceaux, avait retiré sa proposition de mutation de l’ordre du jour. Monsieur Ouart, conseiller du Président de la République, était cependant intervenu contre ce retrait.

Les conditions de cette mutation suscitent beaucoup d’émoi. En effet, le décret de nomination est notoirement irrégulier, puisque l’avis du CSM doit être explicite. Or, il est intervenu sans que cet avis soit rendu. M. Robert lui-même conteste la légalité du décret. Il a saisi le Conseil d’État et les syndicats de magistrats se sont joints à sa requête.

Cette affaire est une atteinte extrêmement grave à l’institution judiciaire et au principe de séparation des pouvoirs. Je m’inquiète de la multiplication des interventions de l’exécutif auprès des magistrats du Parquet. L’injonction de Mme la garde des sceaux à celui de Paris de faire appel, alors qu’il ne l’envisageait pas, dans l’affaire Fofana, n’est pas faite pour rassurer. Votre politique interventionniste ouvre la voie à toutes les dérives. Entendez-vous donc faire appel de toutes les décisions de justice qui ne seraient pas conformes aux réquisitions des avocats généraux ? Sinon, sur quels critères déciderez-vous ? Alors que ces affaires interviennent en plein débat sur la suppression du juge d’instruction et alors qu’a été présenté en conseil des ministres un projet de loi organique réformant le CSM, qu’entendez-vous faire pour sortir de la crise que vous avez-vous-même provoquée ? (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG et sur certains bancs socialistes)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés . - Je remercie Mme Borvo Cohen-Seat de sa double question qui me permet de rappeler que dans l’affaire Robert, j’ai, dès ma prise de fonctions, reçu les présidents des trois formations du CSM et celui de la formation du Parquet pour leur dire ma volonté de travailler en toute transparence, en toute confiance, dans le respect des institutions et de la Constitution.

Hier, le CSM s’est réuni, en ma présence et celle de ses trois membres qui s’étaient retirés à la suite de l’affaire : voilà bien la première marque de la confiance retrouvée. Je leur ai dit que dès lors que le Conseil d’État avait été saisi, c’est à lui seul désormais qu’il revenait de se prononcer.

Oui, j’ai demandé qu’appel soit interjeté dans l’affaire Fofana. Mes critères ? Ce sont et ce seront toujours les mêmes : l’intérêt de la société et la paix publique. Lorsque j’ai constaté que les condamnations prononcées conduiraient à ceci que dans quelques mois, quelques-uns des participants les plus engagés dans ce crime pourraient se retrouver libres dans le quartier même où se sont déroulés les faits, il m’a semblé qu’un problème se posait, qui n’avait pas été envisagé. Je ne juge pas à la place de la Cour mais je demande que l’on réexamine les choses à la lumière de ce problème.

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