L’Etat UMP reprend en main plusieurs organismes indépendants

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me concentrerai sur le programme « Protection des droits et libertés », et donc sur les onze autorités administratives indépendantes dont il retrace les crédits.

Je me permettrai d’y associer le Défenseur des enfants, car je regrette, comme le rapporteur de la commission des lois, que ses crédits ne soient pas encore rattachés à cette mission.

Je profite de cette occasion pour saluer le travail du Contrôleur des lieux de privation de liberté et je tiens à soutenir son action, d’autant que, au vu de l’état de nos prisons, elle ne peut qu’être amenée à se développer.

Je voudrais à mon tour évoquer les loyers souvent très élevés payés par ces AAI – nous en avons un exemple avec la HALDE –, mais cette question ne peut être envisagée que dans le cadre global de la gestion par l’État de son patrimoine, laquelle n’est pas toujours des plus compréhensibles.

À dire vrai, nous examinons les budgets de ces autorités dans un contexte particulier, puisque la création prochaine du Défenseur des droits, dont les contours sont désormais connus, ne pourra bien évidemment qu’avoir des conséquences sur ces AAI.

Mon groupe n’avait pas voté sa création, craignant précisément qu’il n’absorbe plusieurs autorités et n’ait des compétences et un budget restreints.

Nos craintes se révèlent, hélas ! fondées. Qu’on en juge : le projet de loi lui confère les missions du Médiateur de la République, de la Commission nationale de déontologie de la sécurité et du Défenseur des enfants, sans que ces deux dernières autorités aient été consultées. Il pourrait aussi englober la HALDE et la CADA, la commission d’accès aux documents administratifs, comme l’a confirmé la commission des lois.

Je constate qu’on assiste, dans ce domaine comme dans d’autres, à une reprise en main d’organismes dont, à l’évidence, l’indépendance et le sérieux du travail, utile et reconnu, n’a pas l’heur de convenir au Gouvernement. Déjà, le Défenseur des enfants en 2004 et la CNDS en 2005 avaient échappé de peu à une « réduction-sanction » de leur budget.

L’utilité d’un contrôle extérieur, et donc indépendant, des droits et des libertés s’est pourtant accrue devant la régression actuelle des droits au fil des lois et des pratiques ; je pense notamment à la politique pénale, de plus en plus répressive, à la multiplication des fichiers et à la mise en coupe réglée des médias.

Je rappelle que notre pays a été, à plusieurs reprises, montré du doigt par le commissaire européen aux droits de l’homme.

Ces autorités, et le contrôle extérieur qu’elles permettent, sont non seulement nécessaires pour assurer le respect des droits, mais également pour réfléchir à leur développement et faire des propositions.

Ainsi, il entre dans la mission du Défenseur des enfants de défendre non seulement les droits inscrits dans la loi, mais aussi ceux qui sont consacrés par les engagements internationaux régulièrement ratifiés ou approuvés, parmi lesquels figure la Convention internationale des droits de l’enfant, dont nous venons de fêter le vingtième anniversaire. Ne consiste-t-elle pas aussi à promouvoir les droits de l’enfant non encore consacrés et à faire en ce sens des propositions législatives ou des recommandations ?

Le Défenseur des droits, créé par la Constitution, ne pourra, quant à lui, intervenir que sur saisine et, contrairement à la HALDE, seulement en regard des services publics, sauf dans les domaines de l’enfance et de la sécurité. Comment sera assurée l’effectivité des droits ? Quid du pluralisme minimal de représentation aujourd’hui assuré ? Que deviendra la spécificité du champ d’intervention des autorités concernées, laquelle exige des interventions différentes, ce qu’un regroupement rendrait beaucoup plus difficile ?

La création, en l’état, du Défenseur des droits nous paraît donc participer d’une régression des droits. Le président de la commission des lois assure que le Défenseur sera plus efficace parce qu’il disposera de pouvoirs d’injonction. Mais encore faut-il qu’il ait des moyens d’investigation !

Il vaudrait mieux donner des pouvoirs d’injonction aux autorités qui n’en disposent pas actuellement et les moyens de travailler. La CNDS, dont le nombre de saisines a, malheureusement, augmenté de 50 % entre 2008 et 2009, estime que les moyens actuels sont insuffisants au regard de la situation et de l’évolution de ses activités.

La CNIL, quant à elle, ne cesse de voir son activité s’accroître en raison de la multiplication des fichiers et de leur interconnexion. C’est désormais la règle : à chaque fait divers, ou presque, une loi ; à chaque loi, ou presque, son fichier. Le projet de loi sur la récidive en est une parfaite illustration.

Nous soutenons bien entendu l’amendement de la commission des lois, qui vise à rétablir les crédits de la HALDE tels qu’ils étaient prévus initialement, mais nous voterons contre ceux de la mission.

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