67 ans pour une retraite à taux plein : une injustice sociale flagrante

67 ans pour une retraite à taux plein : une injustice sociale flagrante - Réforme des retraites : article 6 (Josh Hild - https://www.pexels.com/fr-fr/@josh-hild-1270765)

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans cette réforme des retraites, ou, en tout cas, dans ce que le Gouvernement appelle la réforme des retraites, il y a beaucoup de non-dits.

Avec cet article 6, nous entrons dans le non-dit par excellence. Que fait cet article ? Il consacre l’allongement de la durée de la vie professionnelle en ouvrant droit à pension à compter de 62 ans révolus, sous réserve de disposer des annuités nécessaires, et à 67 ans à taux plein, l’augmentation de deux ans de l’âge légal se répercutant sur l’âge limite.

Une telle mesure a évidemment des conséquences multiples, dont la moindre n’est pas de permettre de réaliser à terme des économies sur le dos de la santé des salariés et des retraités, et raccourcit d’autant la durée potentielle de perception de toute retraite ou pension.

Prenons le problème à travers le prisme de l’espérance de vie, ce concept au demeurant discutable, puisqu’il s’agit de déterminer l’âge à partir duquel les natifs d’une génération sont majoritairement décédés.

Dans une étude menée par les services de l’INSEE il y a déjà quelques années et reprise dans les documents préparatoires aux dernières lois de financement de la protection sociale, les différences d’espérance de vie sont connues pour être particulièrement importantes selon les catégories professionnelles.

Ainsi, à 35 ans, selon cette étude, un ouvrier disposait d’une espérance de vie de 39 ans, et pouvait donc atteindre l’âge de 74 ans, tandis qu’un cadre pouvait escompter vivre encore 46 ans, c’est-à-dire atteindre l’âge de 81 ans.
Toutes les catégories sociales ont gagné en espérance de vie depuis plusieurs décennies – en partie grâce à la sécurité sociale, financée par le travail de tous –, mais les écarts demeurent sensibles.

En supposant en effet que notre ouvrier ait atteint 42 annuités cotisées à 62 ans, il n’aura au mieux que 12 ans de perception de pension, tandis que le cadre, même en étant contraint de travailler jusqu’à 67 ans, disposera d’au moins 14 ans de versement.

Le document de l’INSEE était d’ailleurs implacable : les ouvriers, les employés et les inactifs non retraités constituaient les trois catégories professionnelles dont l’espérance de vie était inférieure à la moyenne.

C’est donc, profondément, une mesure d’injustice sociale que celle que l’on nous invite aujourd’hui à voter avec cet article 6.

Avec la retraite à 60 ans, un ouvrier travaillerait 40 ans et toucherait 14 années de pension, soit un rapport de 2,85 années cotisées pour 1 année de retraite.

Avec la retraite à 62 ans, ce sera 42 ans de travail et 12 de pensions, soit un rapport de 3,5 années cotisées pour 1 année de retraite, c’est-à-dire une hausse d’un quart de la proportion !

Le tout pour avoir le bonheur de toucher une retraite indexée sur l’évolution des prix, c’est-à-dire dont le pouvoir d’achat sera définitivement gelé de la date de cessation d’activité à celle du décès !

Mes chers collègues, voilà quelques bonnes raisons de rejeter fermement cet article 6.

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