Les textes actuels visant à contrôler et à sanctionner la détention illégale d’armes sont trop complexes et insuffisamment dissuasifs

Les textes actuels visant à contrôler et à sanctionner la détention illégale d'armes sont trop complexes et insuffisamment dissuasifs - Contrôle des armes (Bass_nroll - https://www.flickr.com/photos/bass_nroll/)

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi, qui fait suite au rapport de la mission d’information sur les violences par armes à feu et sur l’état de la législation, nous amène à un double constat que je crois partagé : les armes prolifèrent en France, où elles semblent se vendre très facilement, et le nombre des victimes augmente ; par ailleurs, les textes actuels visant à contrôler et à sanctionner la détention illégale d’armes sont trop complexes et insuffisamment dissuasifs.

La proposition de loi fixe quatre objectifs qui vont dans le bon sens : établir une classification plus lisible et conforme à la réelle dangerosité des armes ; mettre en place une action préventive à l’égard des détenteurs d’armes représentant un danger pour eux mêmes ou pour la société ; réprimer plus sévèrement et plus efficacement les trafics d’armes, avec la volonté politique et toutes les implications que cela suppose, notamment s’agissant de l’argent et de son blanchiment, ce qui pour nous est essentiel ; enfin, assurer la traçabilité des armes en renforçant l’efficacité des fichiers recensant les armes à feu et leurs détenteurs.

Si ne nous sommes pas pour le recours systématique au fichage des citoyens – vous le savez, mes chers collègues –, la question de la détention d’armes fait exception, eu égard aux risques encourus pour la sécurité publique. Cette question sort en effet du domaine du fichage injustifié des citoyens auquel on nous a, hélas ! peu à peu habitués.

Au-delà de ces avancées, deux points soulèvent toutefois des interrogations.

Nous avons été, comme tout le monde, interpellés par de nombreuses associations de chasseurs qui s’inquiètent de la mise en place de peines complémentaires automatiques. Nous souhaiterions avoir des précisions sur les articles relatifs à celles-ci, et notamment sur l’article 10.

L’article 1er renvoie à un décret en Conseil d’État pour la détermination des matériels, armes, munitions, compris dans chacune des catégories établies. On peut regretter que cette détermination ne revienne pas au législateur.

Je souhaiterais plus particulièrement évoquer certaines armes de quatrième catégorie à propos desquelles je suis intervenue à de nombreuses reprises, comme plusieurs des membres de mon groupe : les armes à impulsions électriques permettant de provoquer un choc électrique à distance et les armes à impulsions électriques de contact permettant de provoquer un choc électrique à bout touchant, armes qui, comme les armes à feu, sont théoriquement interdites à la vente libre.

J’estime que, comme pour les armes à feu, le pouvoir exécutif doit, dans le décret, au moins interdire la vente aux particuliers des pistolets à impulsion électrique, puisque, comme le souligne le Conseil d’État dans sa décision du 2 septembre 2009, leur emploi « comporte des dangers sérieux pour la santé, résultant notamment des risques de trouble du rythme cardiaque, de syndrome d’hyperexcitation, augmentés pour les personnes ayant consommé des stupéfiants ou de l’alcool, et des possibles complications mécaniques liées à l’impact des sondes et aux traumatismes physiques résultant de la perte de contrôle neuromusculaire ; que ces dangers sont susceptibles, dans certaines conditions, de provoquer directement ou indirectement la mort des personnes visées ».

Un contrôle renforcé quant au respect de ce contrôle devrait être effectué. Souvenons-nous que le comité de l’ONU contre la torture, dans un rapport sur le Portugal du 23 novembre 2007, indiquait au sujet du Taser que « l’usage de ces armes provoque une douleur aiguë, constituant une forme de torture, et que, dans certains cas, il peut même causer la mort. »

Je rappelle que nous avions déposé, avec d’autres, une proposition de loi visant à interdire l’utilisation d’armes de quatrième catégorie par la police ou la gendarmerie contre des attroupements ou manifestations, leur commercialisation ou leur distribution pour des polices municipales ou des particuliers ; il serait souhaitable qu’à l’occasion du présent débat le Gouvernement nous donne des réponses allant dans le sens de ce texte.

Je rappelle aussi que la CNDS, la Commission nationale de déontologie de la sécurité, à la suite de nombreux drames liés à l’usage par la police de ce type d’arme, a recommandé de ne pas utiliser le flash-ball « lors de manifestations sur la voie publique ». Dans ce domaine encore, il serait souhaitable que l’actuel débat apporte des avancées.

La CNDS rappelait que cette arme, dont les policiers municipaux peuvent être équipés, risquent de causer des blessures graves et irréversibles d’autant que leurs trajectoires de tirs sont imprécises. Elle soulignait en outre que des négligences et des manquements professionnels graves ont été constatés à maintes reprises quant à l’utilisation de ces armes dites « sublétales ». Voilà près d’un an, le lundi 13 décembre 2010, à Marseille, un homme décédait, victime d’un arrêt cardiaque après avoir reçu un tir de flash-ball d’un policier.

C’est pourquoi je renouvelle dans l’immédiat notre souhait de voir proclamer un moratoire sur l’utilisation de ces armes de quatrième catégorie par l’ensemble des forces de l’ordre et des polices municipales.

Monsieur le ministre, nous serons très attentifs aux réponses que vous nous apporterez sur ces points sur lesquels le Gouvernement n’a pour l’instant pas encore tranchés.

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