Lettre au sujet des droits humains en Côte d’Ivoire

Lettre au sujet des droits humains en Côte d'Ivoire (Catalin Besleaga - https://www.flickr.com/photos/th3sly/)

Monsieur le Ministre,

Je me permets d’attirer votre attention sur des situations constatées en Côte d’Ivoire par des organismes de défense des droits de l’Homme, dont Amnesty International.
Selon ces associations au moins 50 personnes ont été placées en détention sans avoir été inculpées par les autorités ivoiriennes à la suite de l’arrestation de Laurent Gbagbo il y a trois mois.
Parmi eux figurent des hommes politiques connus, des députés, des syndicalistes, des anciens ministres, l’ancien directeur de la BCEAO et des ressortissants français.
Nombre d’entre eux sont détenus dans différents endroits du nord de la Côte d’Ivoire. Ni le CICR ni aucune autre organisation non-gouvernementale n’ont pu leur rendre visite. Par contre le directeur de la division des droits de l’homme de l’ONUCI a pu se rendre sur le site de Bouna. Il y a constaté que les personnes détenues faisaient l’objet de mauvais traitements et que l’incarcération se faisait dans des conditions humaines dégradantes. D’ailleurs certains de ces traitements contrevenant à l’article 1 de la Convention des Nations Unis contre la torture ont été filmés et mis en ligne sur Internet. On y voit certains de ces détenus - dont un ancien premier Ministre, un ressortissant français et des personnes souffrant de graves problèmes de santé - humiliés et contraints de faire des pompes par des membres des forces armées des actuelles autorités ivoiriennes. A Korhogo 23 détenus survivraient entassés dans un container.
Par ailleurs des associations de droits de l’homme ont exprimé l’exigence que tous ces détenus bénéficient de l’attention médicale et des soins dont ils ont besoin. L’état de santé de certains d’entre eux comme Mahan Gahé, président du syndicat « Dignité » membre de la CSI, et Maurice Louhourignon, directeur de l’aménagement du territoire, actuellement détenus à Boundiali, s’est brutalement dégradé.
Ces mêmes associations considèrent également que le maintien de personnes en détention sans inculpation relative à une infraction précise prévue par la loi serait une violation directe des normes internationales en matière de droits humains et ferait de celles-ci des prisonniers d’opinion qu’il faudrait libérer immédiatement.
Elles ont par ailleurs relevé que les soldats de la Licorne et de l’ONUCI étaient présents lors de l’arrestation de nombre de ces personnes mais qu’ils ne sont pas intervenus pour empêcher les mauvais traitements.
Je vous serais reconnaissante, Monsieur le Ministre, de me faire savoir la position du gouvernement français concernant l’ensemble des points soulevés et les initiatives qu’il compte prendre.
Pourriez-vous également m’indiquer, Monsieur le Ministre, les démarches entreprises en vue d’éclaircir les circonstances de la mort par balle le 31 mars dernier à Yamoussoukro de Philippe Rémond, ressortissant français exerçant le métier d’enseignant en Côte d’Ivoire ? Ce dernier déclarait le 17 janvier dernier avoir fait l’objet de menaces liées à ses opinions politiques.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes salutations les plus distinguées.

Nicole BORVO COHEN-SEAT

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