Durée du mandat présidentiel : explication de vote

Durée du mandat présidentiel : explication de vote

par Robert Bret

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme d’un débat véritablement escamoté sur la réduction du mandat du Président de la République et, plus généralement, sur les institutions de notre pays.

Nous devons pourtant nous prononcer sur une réforme constitutionnelle lourde de conséquences. Nombreux sont ceux qui, comme nous, soulignent le présidentialisme renforcé qui va découler de l’instauration du quinquennat dit sec du fait de l’absence de toute autre réforme de nos institutions.
Le Président de la République ayant clairement indiqué qu’il refusait le vote d’un seul amendement a du même coup mis en cause le principe constitutionnel essentiel que représente le droit d’amendement pour les parlementaires.

M. Josselin de Rohan. Cela suffit, maintenant !

M. Robert Bret. Cette étrange conception du débat parlementaire augure mal du devenir des rapports entre l’exécutif et le législatif !
M. Chirac a, de toute évidence, anticipé sur le renforcement du pouvoir présidentiel (Protestations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l’Union centriste.)...

M. Jean Chérioux. C’est le Gouvernement !

M. Josselin de Rohan. Cela suffit ! Arrêtez !

M. Robert Bret. ... induit par la réforme qui nous est proposée.

M. le président. Monsieur Bret, ne provoquez pas vos collègues !

M. Robert Bret. Ce n’est pas de la provocation, ce sont des faits, monsieur le président !

M. Josselin de Rohan. On ne met pas en cause le Président de la République !

M. Robert Bret. Je tiens à rappeler, en cette fin de discussion, la concomitance de l’élection du chef de l’Etat et de l’élection des députés qui revient à placer la seconde sous l’influence de la première. La vie politique sera, durant les cinq annnées du mandat, centrée sur cette échéance électorale de plus en plus dominatrice.
La soumission du Parlement au Président de la République, déjà forte sauf en cas de cohabitation, sera totale.

En corollaire, c’est le pluralisme qui sera l’une des premières victimes de l’accentuation de la bipolarisation de la vie politique. Accentuer encore la dérive présidentielle de nos institutions débouchera inévitablement sur un appauvrissement de la démocratie.
Comment ne pas voir dans le peu d’intérêt manifesté par un Parlement bâillonné par avance le signe avant-coureur de cet appauvrissement ?

Nous considérons que l’argument unique avancé pour convaincre les Françaises et les Français de l’utilité de cette réforme, en l’occurrence leur volonté d’être consultés plus souvent, est totalement détourné. Oui, les Français veulent plus de démocratie. Ils veulent peser sur les choix et non pas les subir.

M. Jean Chérioux. C’est pour cela qu’ils vous donnent aussi peu de voix !

M. Robert Bret. Ils sont de plus en plus nombreux à refuser la délégation de souveraineté qui, trop souvent, a abouti à d’amères déceptions.
Or, cette réforme tend à pousser la délégation de pouvoir à son paroxysme, à l’opposé même des idées portées par la Révolution française, à l’opposé du concept même de la République.
Ce projet de loi constitutionnelle relève de manoeuvres politiciennes dont l’objectif unique est le prochain scrutin présidentiel, en 2002.
Les sénateurs communistes refusent de participer à cette mascarade...

M. Josselin de Rohan. Vous êtes au Gouvernement ! Vous êtes dans la majorité !

M. Jean Delaneau. Quittez le Gouvernement !

M. Robert Bret. ... qui tend à faire passer pour un progrès démocratique une menace lourde d’un renforcement du caractère autoritaire des institutions de la Ve République.
Pour cet ensemble de raisons, ils ne participeront pas au vote de ce projet de loi constitutionnelle.

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