Producteurs Laitiers : quelle gouvernance pour l’après-quota ?

Producteurs Laitiers : quelle gouvernance pour l'après-quota ? - Question au Ministre de l'Agriculture lors d'un débat sur la Réforme de la PAC (Flambo - https://www.pexels.com/fr-fr/@flambo-388007)

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre pays est le second producteur européen de lait, avec une collecte annuelle de plus de 20 milliards de litres. Le prix du lait en France, environ 30 centimes d’euros par litre, pourtant supérieur à la moyenne européenne, n’est pas suffisant pour couvrir les coûts de production et surtout rémunérer correctement nos producteurs. Et la volatilité dont vous avez parlé n’aide pas.

La dérégulation de la production laitière a des effets catastrophiques, avec, notamment, l’abandon, en 2015, des quotas laitiers, qui avaient été mis en place en 1984 pour réguler la production. Ces derniers ont eu l’avantage de maintenir un prix du lait pendant un quart de siècle environ.

Les laiteries poussent les producteurs à augmenter leurs volumes de lait dans les zones de production intensive, là où les vaches mangent plus de grains ou de farines végétales que d’herbe. Ce système alimentaire accroît pourtant les pollutions et les émissions de gaz à effet de serre.

Les différents acteurs de ce secteur dans le Morbihan m’ont présenté des leviers qu’il serait possible d’actionner, parmi d’autres, bien entendu.

Ainsi, la révision du mode de fixation du prix du lait, indexé sur le prix des marchés en aval, devrait être redéfinie, afin d’éviter le décalage dans le temps du mode de calcul.

De plus, il pourrait être envisagé la mise en place de la contractualisation, puisqu’elle permettrait aux producteurs un meilleur amortissement des investissements et un financement plus pérenne de leurs exploitations.

Les laitiers bretons et leurs collègues de l’ensemble du territoire français attendent des actes forts du Gouvernement et de l’Europe également.

Quelles mesures comptez-vous prendre pour rassurer, consolider et développer la filière laitière française ? Quelle nouvelle gouvernance souhaitez-vous mettre en place pour l’après-quota ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez concentré votre intervention sur la question laitière.

Je l’ai dit, on a commencé à débattre de l’après-quota, mais les discussions n’ont pas abouti. En effet, certains pays du Nord ont très clairement fait le choix de sortir des quotas et ne veulent pas y revenir. On est donc obligé de penser l’après-quota sans quotas, mais avec des systèmes de régulation permettant d’éviter, comme je l’ai expliqué tout à l’heure, que chacun – je le sens bien ! – soit tenté par la conquête des marchés internationaux. Le jour où se poserait un problème sur le marché international, la production excédentaire reviendrait sur le marché européen, ce qui entraînerait une crise extrêmement profonde.

Comment éviter que tout le monde ne parte à la conquête des marchés internationaux sans aucune coopération ni régulation à l’échelle européenne ? Telle est la question qui, selon moi, se pose.

Des échanges de courriers ont eu lieu, et nous avons fait des propositions plus techniques. Comme nous l’avons d’ailleurs fait pour ce qui concerne la réforme de la PAC, nous nous efforçons de trouver des alliés, de convaincre d’autres pays. Nous travaillons sur une plateforme, afin de pouvoir, au mois de septembre prochain, débattre de ce qui serait non pas simplement la position de la France, mais qui pourrait être la position de dix, douze ou treize pays. Voilà ce que nous allons faire.

Sur la question des prix et sur les mesures que nous envisageons, la modification de la loi de modernisation de l’économie, la LME, adoptée par l’Assemblée nationale et dont le Sénat sera saisi, intègre, cette fois-ci, dans la négociation commerciale, l’évolution des coûts de production, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

En effet, lorsque les coûts de production augmentent, vous ne renégociez rien du tout. Le prix de vente, qui a déjà été décidé, reste inchangé. Cela conduit au traditionnel effet de ciseaux que l’on observe aujourd’hui dans le secteur de l’élevage et qui remet en cause le rebut.

Concernant les contrats laitiers eux-mêmes, nous allons revoir, dans le cadre du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’agroalimentaire et la forêt, l’organisation de la filière et la manière de présenter ces contrats.

Premièrement, il importe d’intégrer dans ces contrats les coûts de production. Deuxièmement, il faut réfléchir à l’introduction de clauses de sauvegarde. Troisièmement, il faut envisager des clauses spécifiques pour les jeunes agriculteurs, qui méritent peut-être plus d’attention que les autres.

Nous devons également examiner l’organisation des producteurs. Peut-elle être plus transversale ? Peut-elle aller au-delà d’une laiterie ? Dès lors, comment fait-on ? Tous ces sujets seront débattus dans le cadre de ce projet de loi.

J’ajoute que, pour la première fois, le ministre s’est engagé dans une discussion globale sur le lait. Un médiateur a été nommé, qui a obtenu 25 euros de plus pour les mille litres de lait de vache. J’attends que toutes ces mesures soient appliquées de manière correcte. Certains, en effet, viennent me dire que cette mesure ne s’applique pas, mais ce n’est pas le ministre qui l’applique, ce n’est pas moi qui paie les éleveurs, ce sont les transformateurs.

La grande distribution a accepté, sous notre pression, 25 euros dans l’Orne. En Basse-Normandie, où je me suis rendu dernièrement, des problèmes d’application se posent, en particulier dans des laiteries organisées en coopératives.
Vous le confirmez, monsieur Lenoir. Il faut effectivement le dire, pour pouvoir faire pression.

Cela vaut également pour la production laitière caprine. Le médiateur, qui a fait un excellent travail, a proposé 60 euros pour les mille litres de lait, et cette mesure s’applique. J’ai constaté que deux ou trois coopératives se sont déjà engagées.

Nous devons en tout état de cause être vigilants sur l’application de ces mesures.

Nous allons appliquer ce système de médiation à la filière porcine française pour essayer de débloquer une situation qui le mérite.
C’est, là encore, un système nouveau, qui permet de répondre aux questions que vous vous posez.

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